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repères historiques, géographiques

l’Iran millénaire, la Perse éternelle

samedi 9 janvier 2010, par Frederic Praud

Eléments originaires du site CLIO

C’est à travers la révolution islamique de 1979 et à travers la crise ouverte par les ambitions nucléaires du gouvernement de Téhéran que les Occidentaux appréhendent aujourd’hui le plus souvent la réalité iranienne. La confusion établie entre l’islamisme chi’ite tel qu’il se manifeste en Iran et le « terrorisme international » entretenu par les mouvances wahhabite ou salafiste propres au monde sunnite, contribue à brouiller les pistes. Il en va de même des menaces proférées par Mahmoud Ahmadinedjad contre Israël, même s’il faut leur rendre leur juste mesure et les replacer dans la volonté de l’Iran de développer son influence dans le monde arabe, paralysé de fait par l’échec des nationalismes nassérien ou baasiste et par l’allégeance au camp occidental des régimes saoudien ou égyptien. Il convient donc d’aller au-delà de la dramatisation qui accompagne généralement l’information relative à l’Iran pour comprendre les ressorts profonds des politiques mises en œuvre par les dirigeants de ce pays grand comme trois fois la France, peuplé de 72 millions d’habitants et disposant d’ores et déjà d’une influence régionale qui le rend incontournable. C’est dans la longue histoire de ce pays qu’il faut chercher les clés susceptibles d’éclairer le présent et d’anticiper sur les grandes tendances appelées à s’affirmer dans l’avenir. « Gendarme du Golfe » à l’époque du chah pour le compte du camp occidental, l’Iran, riche de ses ressources pétrolières et gazières et bénéficiant d’une situation géopolitique majeure – au carrefour des mondes arabe, turc et indien – se perçoit naturellement comme une grande puissance en devenir et ce sentiment s’appuie sur la mémoire d’un passé d’une exceptionnelle richesse, qui vit s’établir là, sous les Achéménides, il y a plus de vingt-cinq siècles, le premier empire se percevant comme « universel ». Les quatre siècles de l’Empire sassanide, la place prise par l’Iran dans l’apogée abbasside de la civilisation arabo-musulmane et le rayonnement de la Perse des Safavides légitiment aux yeux des Iraniens leurs aspirations à la puissance, au moment où se clôt le cycle d’hégémonie occidentale ouvert au XVIe siècle, et où s’affirme le retour au premier plan des grands foyers civilisationnels orientaux et asiatiques de nouveau présents dans le monde multipolaire en train de se constituer.
Le pays et les hommes. Un vaste plateau, placé au carrefour de plusieurs mondes

Le territoire de l’Iran actuel dont les frontières n’ont quasiment pas changé depuis la perte des régions caucasiennes annexées par l’Empire russe lors de la signature, en 1828, du traité de Tourkmantchaï, s’étend sur 1 648 000 kilomètres carrés, soit une superficie équivalente à trois fois celle de la France. Installée au nord du pays, Téhéran, capitale depuis 1786, est, sur le 35e parallèle, à la même latitude que Gibraltar alors que les côtes du Makran à l’extrême sud-est se trouvent à 25° de latitude nord, juste au-dessus du tropique du Cancer. Du fait de la diversité de son relief et des climats que l’on y rencontre, le pays offre une grande variété de paysages, aménagés ou transformés par l’homme depuis une très haute antiquité. On peut ainsi distinguer un vaste haut plateau central, lui-même encadré de puissantes barrières montagneuses qui constituent, avec les plaines de la périphérie de l’espace iranien, les grands ensembles caractéristiques de ce pays installé au carrefour de plusieurs mondes.

D’une latitude moyenne de 900 mètres, le plateau – qui ne s’abaisse que très rarement en dessous de 600 mètres – occupe, au centre et au centre-est, la majeure partie de la surface de l’Iran. Cet immense espace aride et presque vide d’hommes est formé de vastes cuvettes sédimentaires désertiques où se perdent les eaux des rivières descendant des montagnes qui l’encadrent. Deux déserts salés, particulièrement hostiles, occupent les hauts plateaux centraux : le Dasht e kavir ou « Grand Désert », étendu au nord-est sur 80 000 kilomètres carrés et le désert de Sep, qui se trouve au sud-est, d’une superficie de 50 000 kilomètres carrés, formé de rocs, de sable et de sel qui font de lui l’un des milieux tropicaux secs les moins propices à la vie animale ou végétale, avec des écarts thermiques quotidiens pouvant aller jusqu’à 70° (50° de jour, -20° la nuit et un record de température à 71°…). D’autres cuvettes intérieures sont occupées par des lacs qui sont souvent marécageux, tels que le Jaz Muriân dans le Makran (au sud-est), les lacs de la région de Chiraz (au sud-ouest) ou le vaste lac d’Urmiah (au nord-ouest, entre Tabriz et la frontière turque). Ces régions, très peu accueillantes, ne sont guère peuplées ou sont même totalement vides, et les axes de communication très anciennement établis les contournent. Le plateau est entouré de hautes chaînes montagneuses. Au nord, il est séparé des rives méridionales de la mer Caspienne par l’Elbourz qui se prolonge vers l’est avec le Kopet dagh et les monts du Khorassan. L’Elborz (ou Alborz) est la plus haute formation montagneuse du Proche-Orient et sa crête sommitale descend rarement en dessous de 3 000 mètres dans sa partie centrale. Au nord-ouest de Téhéran, le massif du Takht-e Soleyman forme le cœur de la chaîne et compte plusieurs glaciers Des sommets granitiques – comme celui de l’Alam Kuh qui s’élève à 4 850 mètres – présentent d’imposantes murailles rocheuses comparables à celles des hautes Alpes centrales. Les points culminants de l’Elbourz sont des volcans éteints tels que le Sabala, proche d’Ardabil dans l’Azerbaïdjan iranien, qui s’élève à 4 811 mètres alors que le Damâvand, qui se dresse au nord de Téhéran, atteint, pour sa part, l’altitude de 5 610 mètres pour constituer le point culminant du pays. Barrière imposante, l’Elbourz marque aussi une limite climatique et humaine très nette, séparant le plateau aride (Téhéran n’a que vingt-sept jours de pluie par an) des plaines humides du Gilan et du Mazanderan qui bordent la mer Caspienne et bénéficient d’un climat subtropical humide. Vers l’ouest, la puissante chaîne des monts Zagros, orientée du nord-ouest au sud-est, apparaît comme un immense complexe montagneux étendu sur près de 1 500 kilomètres et séparant nettement le plateau iranien de la plaine mésopotamienne étendue à l’ouest. Formé de hauts plateaux et de chaînes à dominante calcaire, le système des Zagros s’élève jusqu’à 4 547 mètres au Zarde Kuh, au sud d’Ispahan. Du fait de leur extension en longueur, les monts Zagros comprennent plusieurs ensembles distincts. Les hautes terres aux hivers rigoureux du Kurdistan et du Sud de l’Azerbaïdjan présentent un relief assez confus qui fait, de ces régions, une montagne-refuge propice à la persistance des irrédentismes. La partie centrale de la chaîne, entre Ispahan et Chiraz, est la région la plus élevée (avec des sommets dépassant souvent 4 000 mètres) et fut longtemps fréquentée par les nomades – Bakhtiaris, Lors (installés dans l’antique Luristan) et Qashqaï – qui y trouvaient leurs pâturages d’été. L’altitude s’abaisse dans la partie méridionale de la chaîne qui s’oriente ensuite de l’ouest vers l’est pour rejoindre les montagnes de Kerman puis du Makran, dans la région du Baloutchistan. Ces murailles méridionales du plateau, sensiblement moins élevées en général, comprennent, cependant, des sommets impressionnants tels que le Kuh e Lalezar à 4 465 mètres d’altitude ou le Kuh e Taftan, un volcan de 3 941 mètres d’altitude qui se dresse au sud de Zahedan, à proximité de la frontière afghane. Vers l’est et la province aujourd’hui afghane de Hérat – qui fut longtemps une extension du monde persan dans cette direction – le relief demeure accidenté, mais son allure apparaît plus confuse et sa construction est plus récente, ce dont témoignent les multiples failles que l’on peut identifier et qui expliquent la très forte sismicité de la région, génératrice de catastrophes de grande envergure, comme le tremblement de terre survenu à Bam en 2003. Situés de part et d’autre des grandes formations montagneuses, les piedmonts bénéficient des eaux qui en descendent et accueillent les grandes agglomérations telles que Téhéran, Yazd, Chiraz, Meshed ou Ispahan, arrosée par le Zâyande Rud. C’est au long de ces régions que se sont établies depuis l’Antiquité les routes reliant les villes les unes aux autres, en évitant les terres répulsives des hauts plateaux arides. C’est au-delà des barrières montagneuses encadrant le plateau central que l’on trouve les plaines. Celle du Khouzistan s’étend au sud-ouest et apparaît géographiquement proche de la Mésopotamie arabe ; elle est riche de ses ressources en eau et, depuis un siècle, en pétrole. La plaine côtière qui s’étend au nord de l’Elbourz, sur les rives de la mer Caspienne, est située à vingt-huit mètres au-dessous du niveau des mers et correspond aux régions du Gilan et du Mazanderan. Son climat particulier en fait une région très favorable à l’agriculture. A l’inverse, le Makran – l’ancienne Gédrosie qui s’étend à l’extrémité sud-est du pays, sur les rives de l’océan Indien – est d’une grande aridité.

Plus de la moitié du pays (le centre, l’est et le sud-est) reçoit moins de 300 millimètres de précipitations annuelles mais, à la différence de ce que l’on observe dans la péninsule arabique voisine, l’eau n’est pas rare et certaines régions en sont même très bien pourvues. C’est notamment le cas des provinces riveraines de la mer Caspienne, qui reçoivent, du fait de leur climat subtropical humide favorable à la culture du riz ou du thé, jusqu’à 1 200 millimètres de précipitations annuelles. L’altitude élevée des régions montagneuses de l’Ouest et du Nord entraîne, par ailleurs, l’installation d’un important manteau neigeux dont la fonte alimente les rivières qui descendent vers les piedmonts voisins, y compris pendant l’été. La répartition des précipitations oppose toutefois nettement deux régions bien différentes. Plus élevé et plus humide, l’Iran septentrional et occidental accueille les deux tiers de la population sur un peu plus d’un quart du territoire, alors qu’à l’est d’une ligne allant des rives du Gorgan – qui se jette dans la mer Caspienne au sud de la frontière du Turkménistan – à Chiraz en passant par Ispahan, les précipitations sont toujours inférieures à 200 millimètres, la limite qui détermine l’appartenance d’une région à la zone aride. Les températures estivales peuvent être très élevées dans ces régions (jusqu’à 50° dans le Sud) alors que l’altitude et la sécheresse de l’air rendent le climat des grandes villes supportable (29° en moyenne de juillet à Téhéran). Le caractère continental du pays engendre de fortes amplitudes thermiques annuelles, et les hivers sont froids à Téhéran ou à Tabriz (respectivement 3° et -2° en janvier). A l’inverse, la température est de 18° en janvier à Bandar Abbas, sur la côte du golfe Persique, à hauteur du détroit d’Ormuz. La plupart des cours d’eau sont endoréiques et n’arrivent pas à la mer. Le Sefid rud, qui se jette dans la mer Caspienne dans le Gilan, est le seul grand fleuve issu du plateau qui arrive à la mer. Au sud-ouest, le Karun, qui descend des Zagros et traverse le Khouzistan, rejoint le Tigre à hauteur du delta qu’il forme avec l’Euphrate. Les eaux de surface sont concentrées à 60 % dans cette dernière région limitrophe de l’Irak – d’où l’importance des enjeux de la guerre qui a opposé Iraniens et Irakiens de 1980 à 1988 –, mais la structure géologique de l’Iran a permis l’existence d’importantes nappes d’eau souterraines exploitées grâce à des galeries, les qanât, constituant des réseaux de plusieurs dizaines de kilomètres permettant l’irrigation de régions entières qui, faute de ces installations, seraient condamnées à retourner au désert. Il s’agit de techniques très anciennement maîtrisées dont l’origine serait à rechercher en direction de l’ancien royaume d’Ourartou, étendu au début du premier millénaire à hauteur du lac de Van et de l’actuelle Arménie. La végétation naturelle varie selon les régions, mais les belles forêts de feuillus de l’Elbourz ou de l’ancienne Hyrcanie ont été très sérieusement détériorées par la surexploitation qui a sévi au cours des deux derniers siècles. Les anciennes chênaies du Zagros ne sont plus, elles aussi, qu’un souvenir, et la forêt n’occupe plus aujourd’hui que 11 % du territoire, alors que la steppe et le désert dominent les plateaux du Centre et de l’Est, ainsi que le Balaoutchistan étendu au sud-est. Les cultures et les activités pastorales traditionnelles correspondent aux diverses conditions régionales (pâturages des hautes terres de l’Ouest, palmiers-dattiers du Sud, du Khouzistan au Baloutchistan, riz et thé du Gilan, oranges du Mazandreran…)

Doté d’une identité géographique particulière du fait de son relief (qui le distingue des plaines voisines de la Mésopotamie et de l’Indus), de son climat (intermédiaire entre le milieu tropical des rives de l’océan Indien et les traits continentaux propres à l’Asie centrale), et de ses milieux naturels (montagnes, piedmonts irrigués et déserts contrastant avec les hautes terres afghanes et caucasiennes ou avec les vastes étendues désertiques et steppiques centre-asiatiques), l’Iran se situe au carrefour de plusieurs grands espaces civilisationnels. Il est entouré par les mondes indien, arabe et turc. Largement ouvert sur l’océan Indien, il n’exploita guère au cours de son histoire cette opportunité et les flottes achéménides ou sassanides ne jouèrent pas le rôle que pouvait leur accorder la géographie. L’Iran est en effet demeuré, pour l’essentiel, lors de ces périodes d’apogée successives, un empire continental qui fut en mesure de pousser très loin son expansion vers l’ouest, le nord et l’est à l’époque où Cambyse soumettait l’Egypte et où les armées de Darius et de Xerxès menaçaient Athènes, en même temps que la puissance du Grand Roi se projetait au-delà de l’Indus. Les Sassanides ou les Safavides régnèrent sur un espace territorial plus réduit, mais l’empire créé au IIIe siècle par Ardashir parvint à durer plus de quatre siècles. A l’inverse, l’Iran fut, en d’autres temps, confronté à de multiples menaces dont certaines se révélèrent mortelles. Les Macédoniens et les Grecs d’Alexandre, les Romains, les Byzantins et les Arabes furent de redoutables adversaires et l’ancienne Perse dut aussi compter avec les Turcs, les Mongols, les Turkmènes ou les Ottomans, sans oublier les Afghans avant que les deux derniers siècles ne vissent la Russie, l’Angleterre et, enfin, les Etats-Unis mettre en cause une indépendance fièrement revendiquée. Etape naturelle pour l’empire des tsars ou la puissance soviétique dans leur marche vers les mers chaudes, région placée sous contrôle par une Angleterre soucieuse de garantir la sécurité de sa route des Indes et désireuse d’exploiter à son profit le pétrole découvert à Abadan, enfin « gendarme du Golfe » pour le compte de l’Amérique durant la guerre froide, la situation de l’Iran lui a toujours valu d’être l’objet des ambitions des grandes puissances régionales ou mondiales. Ce sont cette situation particulière et la mémoire des épreuves du passé qui permettent sans doute d’expliquer la vitalité d’un nationalisme iranien qui s’exprime aujourd’hui dans une volonté d’indépendance et de puissance dont s’inquiètent certains de ses voisins.

Les Iraniens ont toujours désigné leur pays sous le nom d’Iran – issu de l’avestique Aryânâm qui signifie « le pays » ou « le berceau des Aryens » alors que le mot « Perse » correspond à l’hellénisation du nom du Fars, qui désigne la région dont sont originaires les Perses qui furent à l’origine des deux grands empires achéménide et sassanide. C’est cette dernière dénomination de « Perse » qui a été retenue pendant très longtemps par les Occidentaux – familiers des récits rapportés par Chardin de l’Ispahan safavide et des Lettres persanes de Montesquieu – et ce n’est qu’en 1935 que le nom d’Iran s’imposa, quand Reza Shah Pahlavi exigea des chancelleries étrangères qu’elles finissent par l’adopter. La réalité humaine qui se confond avec la construction historique de l’Iran apparaît diverse et ne se résume pas aux seuls « Perses ». La population iranienne se partage en effet entre plusieurs ethnies et plusieurs langues d’importances très inégales, mais qui n’en participent pas moins à une unité historique incontestable. Trois grandes familles linguistiques – celles des langues iraniennes, turques et sémitiques – coexistent en Iran et révèlent la composition ethnique du pays. Si l’on considère les langues iraniennes parlées par les deux tiers de la population, on distingue le persan – la langue de plus de la moitié des Iraniens, comprise par la quasi-totalité de la population –, le kurde – parlé par environ 9 % de celle-ci et partagé par les minorités kurdes de Turquie, d’Irak et de Syrie –, les dialectes du Gilan et du Mazanderan, utilisés par environ 8 % des Iraniens et, enfin, le baloutche, langue d’une minorité du Sud-Est du pays dont le territoire historique s’étend aussi au sud-ouest du Pakistan et au sud de l’Afghanistan. L’azéri est, par le nombre de ses locuteurs (environ le quart de la population du pays), la plus importante des langues turques parlées en Iran. Il faut y ajouter les langues turkmène et qashqaî pratiquées par de très petits groupes. L’arabe est enfin parlé par, environ, 3 % de la population dans le Khouzistan et dans quelques régions des rivages septentrionaux du Golfe Persique. Si l’on considère la répartition de ces grands groupes linguistiques, on constate que le centre du pays est persophone alors que les minorités linguistiques et ethniques sont réparties sur les périphéries du territoire iranien, en continuité avec des populations installées dans des Etats voisins. Cette diversité ne semble guère menacer l’unité nationale, si l’on excepte peut-être les Kurdes et les Baloutches, qui ne sont pas, pour autant, en mesure de donner une forme à leurs espoirs de dissidence et de réunion avec leurs frères turcs ou irakiens pour les uns, pakistanais ou afghans pour les autres. Même si les Azéris ont pu être tentés à certains moments par l’autonomisme, ils sont aujourd’hui attachés à un Iran dont le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, est lui-même l’un d’entre eux, alors que la population de Téhéran, la capitale, l’est pour une bonne moitié et que les Azéris iraniens sont plus nombreux que ceux de l’Azerbaïdjan ex-soviétique… Divers groupes d’origine nomade ont su préserver une certaine identité. Il s’agit des Bakhtiaris, qui font partie du groupe perse et sont installés dans le Sud-Ouest, et des Qashqaîs turcophones, proches des Azéris, qui nomadisent près de Chiraz. Ces nomades ne représentent plus qu’environ 2 % de la population iranienne. Le pays voit coexister diverses religions, mais près de 90 % des Iraniens sont des chi’ites duodécimains. Les sunnites se recrutent dans les minorités kurde, turkmène et baloutche. Outre les musulmans chi’ites et sunnites, l’Iran compte aussi une faible minorité de tenants d’autres religions que l’islam. Il s’agit des zoroastriens, lointains héritiers de la religion d’Etat des temps sassanides dont les Parsis indiens sont aujourd’hui les principaux représentants, des chrétiens des églises assyrienne, chaldéenne et arménienne, et des juifs. Enfin, les bahaïs, combattus par le régime islamique iranien, sont les tenants d’une religion syncrétique apparue au XIXe siècle, qui compterait quelques centaines de milliers de fidèles en Iran et plusieurs millions à l’étranger. La diversité ethnique et linguistique apparaît largement transcendée par l’adhésion très majoritaire à l’islam chi’ite installé depuis le XVIe siècle et par un puissant sentiment national né de la conscience d’une Histoire commune et de la conviction d’assumer l’héritage d’une très ancienne civilisation, enracinée depuis plus de vingt-cinq siècles au carrefour de plusieurs mondes. C’est là que réside la source de l’unité de cet « Empire du milieu » moyen-oriental, au moment où se clôt le cycle cinq fois séculaire de la domination occidentale et où s’amorce le grand retour des vieilles identités civilisationnelles appelées à se confronter dans le nouveau monde multipolaire qui se met aujourd’hui en place.

Des origines préhistoriques à l’aube des empires

Les vestiges d’une occupation paléolithique sont demeurés jusqu’à maintenant très rares. Roman Ghirshman a bien identifié, en 1949, des traces d’occupation humaine dans une grotte de Tang i Padban, dans les montagnes bakhtiaries du Zagros, mais il faut attendre le VIIe millénaire et l’aube du Néolithique pour en savoir davantage sur les occupants du plateau iranien et de ses marges. Les trouvailles réalisées dans les grottes de Belt et de Hotu, près de la mer Caspienne, montrent l’existence de plantes cultivées et d’animaux domestiqués. La figurine de sanglier et la « Vénus » de Tepe Sarab (près de Kermanshah) semblent indiquer des affinités avec le Néolithique anatolien de Hacilar. La céramique peinte est largement répandue dès le Ve millénaire avant J.-C., et le cuivre fondu était employé vers 4 000 avant J.-C. dans divers sites comme celui de Tal-i Iblis. C’est à la fin du IVe millénaire que s’amorce, au sud-ouest du pays, le processus d’urbanisation mais aussi – et c’est une découverte beaucoup plus récente – au sud-est, dans des régions demeurées longtemps inexplorées par les archéologues. Les sites de Tepe Yahya et Shahr-i Sokhta font ainsi écho aux centres identifiés en Susiane où l’urbanisation est longtemps apparue liée à l’influence mésopotamienne. Il est difficile de proposer un tableau cohérent de l’évolution qu’a connue l’Iran durant les millénaires obscurs qui précèdent l’avènement des grands empires, d’autant que la civilisation élamite développée en Susiane a été durablement considérée comme une extension vers le sud-est des civilisations sumérienne ou akkadienne. L’approche la plus prudente consiste sans doute dès lors à constater ce que fut le développement des principaux sites reconnus et étudiés sur le sol iranien. Fouillées par Roman Ghirshman entre 1933 et 1937, les collines de Tepe Sialk, situés près de Kashan, au sud de Téhéran, ont livré de nombreuses informations. Le tepe nord fut le premier occupé et la période dite « de Sialk 1 » est contemporaine de la période Hassuna-Samarra en Mésopotamie, c’est-à-dire du Ve millénaire avant J.-C. Il s’agit d’un village de huttes progressivement remplacées par des maisons en pisé construites par une population d’agriculteurs et d’éleveurs ; le cuivre apparaît alors, à la charnière du Néolithique et du Chalcolithique. Les niveaux plus récents de Sialk II (qui commencent avec la seconde moitié du Ve millénaire) voient l’apparition de la construction en briques crues et d’une céramique plus évoluée. Le décor comprend désormais des représentations animales schématisées. La période dite « de Sialk III » est caractérisée par les vestiges du tepe sud datés de -3800 à -3000. Les brique sont désormais cuites et la pierre fait son apparition dans l’architecture. Le décor de la céramique s’enrichit, mais Sialk III disparaît lors d’un incendie général et Sialk IV, qui lui succède, témoigne d’influences venues de l’Elam (notamment en matière de pratiques funéraires) à la fin du IVe millénaire et au début du IIIe. Il faut attendre ensuite la seconde moitié du IIe millénaire pour voir le site de nouveau occupé. Sialk V correspond à l’âge du bronze, mais divers objets de fer sont déjà présents. Au cours des siècles suivants, les tombes de cavaliers qui ont été mises au jour signalent peut-être la présence d’une population dans laquelle on peut voir l’ancêtre des Mèdes. Le site de Tepe Giyan, découvert en 1928 – au sud-ouest de Nehavend, en Iran occidental – et fouillé par Ghirshman et Georges Contenau au début des années trente, a livré des niveaux du Chalcolithique ancien contemporains de -4700 à -4400. Le décor animalier de la céramique révèle des affinités avec la culture des tumuli du site d’Anau, dans les steppes du Turkménistan, mais, au fil du temps, ce sont les influences mésopotamiennes qui s’imposent. Vers la fin du IIIe millénaire, les vestiges découverts à Tepe Giyan correspondent à ceux mis au jour sur le site d’Hasanlu. Tepe Hissar fut également fouillé dans la décennie 1830. Les niveaux les plus anciens remontent au milieu du IVe millénaire et révèlent l’existence de constructions en brique crue, remplacée par la brique cuite avec Hissar II, marqué par la présence de bagues et de bracelets d’or, d’argent et surtout de cuivre, ainsi que par un grand nombre de perles de lapis-lazuli. Hissar II se termine sur une destruction violente vers – 2300. La ville renaît deux siècles plus tard et atteint alors son apogée si l’on en croit l’importance de ses monuments, mais cette prospérité ne résiste pas à une ultime destruction, contemporaine du Bronze ancien. Les sites étudiés dans le Louristan, notamment celui de Tepe Guran, ont révélé pour leur part deux grandes périodes d’occupation, l’une néolithique, datée des VIIe et VIe millénaires avant J.-C., l’autre contemporaine de l’âge du bronze et du début de l’âge du fer, entre -1300 et -600. Les fameux bronzes du Louristan destinés au harnachement des chevaux étudiés par l’archéologue belge L. Van den Berghe datent des cinq premiers siècles de l’âge du fer et ont été réalisés par un peuple de cavaliers dont on peut imaginer qu’ils étaient les ancêtres des Mèdes. La confrontation des scènes qu’ils figurent avec les textes de l’Avesta a permis d’interpréter certaines représentations. Proche du lac d’Ourmiah, le site de Hasanlu présente de riches niveaux de l’âge du bronze, mais ce sont les restes d’une forteresse des débuts de l’âge du fer qui y sont le mieux conservés, alors que des tombes beaucoup plus anciennes rappellent celles de Sialk et de Tepe Giyan. Plus à l’ouest, Suse, qui sera une grande capitale achéménide, apparaît occupée dès le Ve millénaire avant J.-C. Les liens avec les cultures mésopotamiennes d’Obeid et d’Uruk ont été mis en lumière par les archéologues qui ont identifié là, avec l’apparition, au début du IIIe millénaire, de tablettes proto-élamiques, les débuts d’une histoire qui verra le roi d’Akkad Naram-Sin conquérir la cité avant que les souverains de la IIIe dynastie d’Ur ne viennent s’y imposer à leur tour, jusqu’à ce qu’une nouvelle dynastie locale parvienne à les remplacer vers -1850, pour constituer un royaume qui obtient de Babylone le paiement d’un tribut et qui rapportera même, en butin, de la capitale mésopotamienne, le célèbre code d’Hammurabi retrouvé à Suse. C’est, on le voit, dans une cité chargée d’une longue histoire, que Darius Ier fera construire l’un de ses palais. Etroitement liée à l’Elam après avoir été dominée par les rois d’Ur, Anshan (Tal-i Malyan, au nord de Chiraz) était occupée dès la fin du Ve millénaire, mais c’est avec le développement de la puissance néo-élamite, aux VIIe-VIe siècles avant J.-C., qu’elle atteint son apogée, avant d’être occupée par Teispès, le fils d’Achéménès, pour être à l’origine de l’Empire perse.

Ce sont surtout des sites de l’Ouest iranien, identifiés et fouillés durant la première partie du XXe siècle, qui ont permis de rassembler des informations significatives, quoique souvent incomplètes et décousues, sur le passé des vastes régions qui s’étendent à l’est des Zagros. Elles étaient enrichies des connaissances plus complètes à propos de l’Elam, généralement rattaché au monde mésopotamien et dont on a fait le principal foyer culturel et la première civilisation urbaine des temps « préiraniens », antérieurs à l’irruption, dans l’Ouest du plateau, des cavaliers indo-européens venus du nord pour prendre une part décisive à l’ethnogenèse des Mèdes et des Perses. Toute cette interprétation est aujourd’hui remise en cause par la véritable révolution qui est venue secouer le monde de l’archéologie à partir de 2003, quand les fouilles effectuées autour de Jiroft – dans la vallée du Halil roud, dans la province de Kerman, au sud-est du plateau iranien – ont révélé l’existence d’une civilisation jusque-là insoupçonnée, contemporaine, au IIIe millénaire, de celles de la Mésopotamie et de l’Indus. Les découvertes réalisées ont complété celles déjà effectuées sur les sites de Shahdad et de Tepe Yahya et ont permis de répondre à des questions demeurées depuis longtemps sans réponses, celles posées par la présence en Mésopotamie ou sur les côtes de la péninsule arabique d’objets de prestige importés tels que des vases en chlorite ornés de pierres semi-précieuses, objets dont l’iconographie semble avoir influencé ou même inspiré les décors sumériens. Cette nouvelle perspective laisse entrevoir la possibilité que la civilisation urbaine ainsi révélée correspondrait au royaume mythique d’Aratta, évoqué dans les légendes mésopotamiennes. Outre la production des objets de prestige qui alimentaient un commerce très actif, la civilisation découverte dans la vallée du Halil roud a, peut-être, fourni le modèle de la « tour à étages », de la ziqqurat mésopotamienne, puisqu’une gigantesque construction de briques est en cours de dégagement (un travail qui nécessitera une vingtaine d’années). Cet ensemble présente à sa base un côté long de 400 mètres, alors que le côté de la plus grande tour à degrés mésopotamienne n’en mesure que 120… Une plaine alluviale riche s’étendait alors là où règnent aujourd’hui la steppe ou le désert, et l’abondance de l’eau permettait l’existence d’une agriculture et d’un élevage caprin prospères. Entamés en 2003, les fouilles ont fait suite à une période de pillage étendue sur plusieurs années et ont déjà permis d’identifier quatre-vingts sites ainsi que les restes d’une ville entourée de remparts. Les décors identifiés là se révèlent extrêmement troublants, dans la mesure où il s’agit souvent d’illustrations de certains récits mythiques mésopotamiens figurés seulement six siècles plus tard sur les bords du Tigre. L’homme-scorpion, qui apparaît dans l’épopée de Gilgamesh, est ainsi représenté des dizaines de fois dans le Halil roud où les traces d’une écriture contemporaine du début du IIIe millénaire ont été identifiées. On imagine l’importance des découvertes ainsi réalisées ces dernières années. Elles remettent tout simplement en cause l’antériorité jusque-là attribuée à la Mésopotamie dans l’apparition de la civilisation urbaine, et révèlent l’existence, il y a cinq mille ans, de relations d’échanges très intenses entre cette région aujourd’hui retournée au désert et les foyers de civilisation, connus depuis longtemps, du bassin de l’Indus et du « pays d’entre les fleuves ».

La présence d’importantes cultures sédentaires établies en diverses régions depuis les VIe et Ve millénaires avant J.-C. témoigne de la place majeure qu’occupe le plateau iranien dans la genèse des grandes civilisations orientales. Suse et l’Elam d’une part – dont on peut penser qu’ils appartiennent davantage à l’espace culturel mésopotamien – les centres en cours de découverte du Halil Roud d’autre part montrent que de grandes civilisations urbaines contemporaines de l’Egypte de l’Ancien Empire, des cités-Etats sumériennes et des villes de l’Indus ont fleuri sur le sol iranien avant que n’intervienne, au cours du IIe millénaire, l’irruption des nomades indo-européens venus du Nord. C’est dans cette perspective de longue durée qu’il convient de replacer la formation des peuples appelés à jouer, à partir des VIIIe-VIIe siècles avant J.-C., le rôle que l’on sait dans la formation du grand Empire perse achéménide. Les archéologues étudient ainsi aujourd’hui les conditions dans lesquelles s’est produite l’émergence du Royaume perse et ses liens avec le Royaume élamite qui l’a précédé dans le Sud-Ouest de l’actuel Iran. Le scénario « classique » rendant compte de la naissance du Royaume perse – selon lequel les Perses, arrivés au nord-ouest de l’Iran au début du IIe millénaire, auraient migré vers le sud à travers les Zagros pour s’installer d’abord près du lac d’Urmiah, puis à proximité de Kermanshah avant de s’établir finalement dans le Fars pour y fonder au VIIe siècle av. J.-C. la dynastie achéménide – a été aujourd’hui fortement remis en cause, du fait des découvertes effectuées à Anshan (Tall-i Malyan). Il apparaît, selon Pierre de Miroschedji, directeur de recherches au CNRS, que « l’avènement de l’Empire perse est survenu au terme d’une longue crise qui a affecté l’ensemble du Sud- Ouest de l’Iran, entre le dernier quart du IIe millénaire et le VIIe siècle avant notre ère. Au Fars, cette crise a été marquée par un processus de désurbanisation enclenché dès le milieu du IIe millénaire et qui a abouti, vers -900, à l’abandon de toutes les villes, y compris la capitale Anshan, et à une quasi-disparition des établissements sédentaires. Cette évolution est allée de pair avec une forte augmentation du peuplement pastoral nomade qui a culminé pendant la première moitié du Ier millénaire et conduit à l’isolement du Fars par rapport au Khouzistan élamite où se trouvait concentrée désormais la majeure partie du peuplement sédentaire ». Occupé par de nouvelles populations proprement « iraniennes » à partir de la seconde moitié du IIe millénaire, le Fars demeure isolé jusqu’à la fin du VIIIe siècle, moment à partir duquel la renaissance éphémère de l’Elam le place de nouveau en situation de dominer la région. Pas pour longtemps puisque Suse, la capitale élamite, est mise à sac par les Assyriens en -646. La fin du VIIe siècle voit, en revanche, la chute de la puissance assyrienne, l’émergence d’un brillant Royaume néo-babylonien et la formation, à partir de la région centrale du Zagros, d’un Royaume mède. C’est également à ce moment, vers -635, que se constitue, au Fars, un royaume d’Anshan désormais indépendant de l’Elam, placé sous l’autorité d’une dynastie perse. La naissance de ce nouveau royaume d’Anshan correspond, l’archéologie en témoigne, à une sédentarisation massive, réalisée à partir de la fusion des populations autochtones longtemps demeurées sous la coupe de l’Elam et des populations nomades perses. La Perse historique naît ainsi de la symbiose réalisée entre traditions élamites et iraniennes. L’influence élamite l’emportera cependant à partir du règne de Darius Ier, qui voit les éléments iraniens s’imposer désormais sans partage, un processus facilité par la proximité du Royaume mède auquel les Perses sont liés par de nombreuses affinités.

De l’Empire achéménide à la puissance du Grand roi

Vers -860 : Les Perses s’établissent au nord-est de Suse, dans la région du Parsumach, près d’Anshan.

Vers -825 : Les Mèdes s’installent à proximité du lac d’Urmiah. Ils constituent un peuple qui appartient à la grande famille indo-européenne. C’est en 834 avant J.-C. qu’ils apparaissent dans l’Histoire, au nord-ouest de l’Iran, au moment où le roi d’Assyrie Salmanazar III entreprend contre eux une campagne militaire. On considère que leur origine géographique est à rechercher soit à proximité du Caucase, soit dans les steppes proches de la mer Caspienne d’où ils se seraient mis en mouvement vers la région du lac d’Urmiah. Comme les Perses, ils ont dû entrer sur le plateau iranien au début du premier millénaire avant J.-C. C’est ensuite qu’ils viennent s’installer non loin de l’actuelle Hamadan où ils établiront leur capitale, Ecbatane. Confrontés à des mouvements des tribus cimmériennes et scythes, ils ont surtout à faire face aux Assyriens qui constituent leur ennemi principal, qu’ils finiront par abattre en s’alliant au royaume néo-babylonien de Nabopolassar, avant de voir leur propre empire absorbé par la puissance perse sous Cyrus. Le terme « d’empire » utilisé à propos des Mèdes demeure discuté, car on soupçonne Hérodote d’avoir attribué à leur puissance les caractéristiques qui seront celles de l’Empire perse achéménide. Si l’on en croit les données archéologiques rassemblées dans l’Iran septentrional (Godin Tepe, Baba Jan, Nush-i Jan…) on retient plutôt l’existence de plusieurs pouvoirs locaux correspondant davantage à une confédération de tribus qu’à un « empire » unifié. Les nouveaux venus, peuples cavaliers réputés pour leurs troupeaux de chevaux, ont adopté pour une grande part la culture des peuples qu’ils ont subjugués, mais certaines de leurs productions – ainsi les fameux bronzes du Luristan – témoignent d’une profonde originalité. La puissance mède ne s’en étendit pas moins du centre de l’Anatolie jusqu’aux abords de la Bactriane, c’est-à-dire au cœur de l’Asie centrale. Ecbatane sera une résidence d’été des souverains achéménides, mais les Mèdes apparaissent ensuite assez peu dans l’Histoire de leur empire. En 330 avant J.-C., le satrape de Médie, Atropatès, combat contre Alexandre, mais il est maintenu en place après la conquête macédonienne et donne son nom à la partie septentrionale de la Médie, la Médie Atropatène, devenue, ensuite, l’Azerbaïdjan.

 728 -675 : Règne de Daïakku (peut-être le Déïocès d’Hérodote), le fondateur de l’Empire mède.

 715 : Daïakkû est vaincu par le souverain assyrien Sargon II. Sa capitale était installée à Ecbatane (l’actuelle Hamadan) dont le nom signifie « lieu du rassemblement ».

Début du VIIe siècle avant J.-C. : Invasion des Cimmériens dans les monts Zagros.

vers -675 : Khchathrita (le Phraorte d’Hérodote et le Kachtariti des textes assyriens) succède à Daïakkû. Il rassemble sous son autorité Mèdes, Mannéens et Scythes présents dans les régions du Zagros, puis soumet les Perses venus s’établir au nord-est de Suse, dans le pays de Parsumach (dont le nom est mentionné pour la première fois dans les inscriptions assyriennes en -692, quand il est allié à Anzan à la bataille de Halulé livrée à l’Assyrien Sennachérib dont le règne s’est étendu de -705 à -681).

 681-668 : Règne d’Assarhadon d’Assyrie, durant lequel une ambassade assyrienne est envoyée auprès de Khchathrita, ce qui indique l’importance que revêt, dès ce moment, le Royaume mède.

 675 -640 : Règne de Tchichpich (Teïspès) sur le Parsumach auquel il ajoute l’Anzan et le Fars. Il est l’héritier du clan d’Hakkâmanich (Achéménès) qui a donné son nom à la dynastie achéménide.

Vers -660 -583 : Dates présumées de naissance et de mort de Zarathoustra, le réformateur de la tradition mazdéenne.

 653 : Khchathrita est tué lors d’une incursion assyrienne réalisée sous le règne d’Assurbanipal (-668 -626). Le quart de siècle qui suit voit les Scythes dominer l‘Iran jusqu’à la mort, en -625, de leur roi Madyès. Cette période scythique est illustrée, sur le plan archéologique, par le trésor de Sakklez découvert au sud du lac d’Urmiah. Pendant ce temps, les Perses achéménides en profitent pour affirmer leur indépendance, sans pour autant entrer en conflit avec leurs puissants voisins.

 640 : A la mort de Teïspès, son royaume est partagé entre ses deux fils, comme il l’avait prévu. Ariaramne, qui règne de -640 à -590 sera « Grand Roi, roi des rois, roi du pays de Parsa » tandis que son frère Kûrach (Cyrus Ier, qui règnera de -640 à -600) est « Grand Roi du Parsumach et roi d’Anzan ».

 625 : C’est Uvakhchatra (Cyaxare), le fils de Khchathrita qui, à la faveur d’un banquet, fait enivrer et mettre à mort les chefs scythes. Cyaxare s’impose alors comme le maître de la partie occidentale du plateau iranien et se dote d’une armée comprenant des fantassins équipés sur le modèle assyrien et, surtout, d’une cavalerie nombreuse et très mobile qui va se révéler redoutablement efficace. C’est vers la Mésopotamie voisine qu’il va désormais conduire l’expansion de son royaume.

 615 : Cyaxare s’empare de Arrapha (l’actuelle Kirkouk), puis de Assur en août -614. Il s’allie ensuite avec le Babylonien Nabopolassar qui s’était vainement dressé contre les Assyriens en -616, une alliance confirmée par le mariage d’une petite fille du roi mède, Amyrtis, avec Nabuchodonosor, fils aîné de Nabopolassar.

 612 : Cyaxare et Nabopolassar s’emparent de Ninive, l’orgueilleuse capitale assyrienne, qui est détruite.

 610 : Cyaxare et les Babyloniens prennent Harran, la nouvelle capitale assyrienne où s’est réfugié le roi Assuruballit II. C’est la fin de l’Empire assyrien qui s’était étendu de l’Elam jusqu’à la Haute Egypte. Les Babyloniens annexent l’Elam et le Nord de la Mésopotamie alors que les Mèdes prennent le contrôle des régions montagneuses du Nord, dont le royaume d’Ourartou installé sur le territoire de la future Arménie, et les anciennes provinces assyriennes d’Asie Mineure, jusqu’à la frontière que forme vers l’ouest le cours de l’Halys (le Kizil Irmak qui s’écoule aujourd’hui, en effectuant une large boucle, au centre de l’Anatolie). Une frontière disputée durant sept ans avec le royaume de Lydie jusqu’à ce qu’une éclipse de soleil survenue en -585 impressionne à un tel point les adversaires qu’ils se décident à conclure la paix.

 600 -559 : Règne de Kambûjiya (Cambyse), successeur de Cyrus Ier, sur le Parsumach et l’Anzan. Il détrône ensuite, après -590, Arsame, fils d’Ariaramne, pour régner également sur la Perside (Parsua) ; le fils de cet Arsame, Hystaspe, aurait, selon Hérodote, régné ultérieurement sur la Perside au début du règne de Cyrus II le Grand. Cambyse épouse Mandane, la fille d’Astyage, roi de Médie, le plus puissant souverain de la région.

 585 : Mort de Cyaxare. Son fils Ichtûmegû (Astyage) lui succède pour régner jusqu’en -550. Long d’une trentaine d’années, le règne d’Astyage est pacifique et voit les Mèdes adopter les traditions auliques de l’ancienne Assyrie.

558-530 : Règne de Cyrus II le Grand, fils de Cambyse et petit-fils d’Astyage, roi de Médie. Il va réunir sous son autorité Perses et Mèdes. Après avoir conquis Hyrcanie et Parthie, il bat en -550 son grand-père et met fin à la puissance mède. Abandonnant sa capitale de Pasargades, Cyrus le Grand s’installe à Ecbatane, ancienne capitale mède devenue celle de l’Iran unifié.

 550 : Ecbatane est pillée par les Perses de Cyrus et ses richesses emportées en terre d’Anzan ainsi que le rapportent les annales du souverain babylonien Nabonide. C’est la fin de l’Empire mède, qui n’a pas laissé de vestiges nombreux mais qui a réalisé en Iran une première ébauche d’unité politique.

`-546 : Sardes, la capitale lydienne, est prise par Cyrus. Le roi Crésus, célèbre pour la richesse que lui valaient les paillettes d’or recueillies dans le fleuve Pactole, est tué. La Lydie devient une satrapie, c’est-à-dire une circonscription administrative confiée à un gouverneur perse. Les cités grecques de la côte ionienne sont annexées à leur tour et sont réparties entre la satrapie lydienne et une autre satrapie, celle dite « de la Mer » (il s’agit de la mer Noire).

 545 -539 : Une série de campagnes permet l’expansion vers l’est du royaume de Cyrus II le Grand. La Bactriane (région de l’actuelle Balkh), l’Arachosie (région de l’actuelle Kandahar, au sud de l’Afghanistan), la Margiane (région de l’actuelle Merv) et la Drangiane deviennent de nouvelles satrapies. Cyrus s’avance ainsi jusqu’à l’Iaxartes (le Syr Daria) qui forme la limite nord-orientale de son empire. Après y avoir installé des forteresses chargées de contenir la pression des nomades d’Asie centrale, il se retourne vers l’ouest.

 539 : Cyrus s’empare de Babylone que son souverain, Nabonide, n’a guère défendue. Le vainqueur se place sous la protection du dieu Mardûk. A la mort de Nabonide, l’année suivante, Cyrus prend le titre de « roi de Babylone, roi des pays ». Le souverain perse n’impose pas la religion mazdéenne aux Babyloniens et aux autres peuples et il rétrocède même aux peuples étrangers les statues de leurs dieux emportées comme butin à Babylone au cours des décennies précédentes. Cyrus fonde Pasargades et Persépolis.

 537 : Cyrus autorise les Judéens déportés à Babylone à regagner la Palestine en emmenant avec eux les objets précieux qui avaient été arrachés au temple de Jérusalem. Cyrus meurt ensuite en -530, au cours d’une campagne menée contre les nomades Massagètes menaçant l’Est de l’empire. Véritable fondateur de l’Empire perse, ce souverain a su soumettre la Médie, la Lydie et la Babylonie et s’est partagé entre trois capitales : Ecbatane, Suse et Babylone auxquelles il faudrait ajouter la résidence moins officielle de Pasargades. Son autorité semble avoir été aisément acceptée, notamment en Mésopotamie ; c’est ce que confirme ce texte de l’époque, cité par R. Girshman : « Mardûk a visité la totalité des pays et a vu celui qu’il cherchait pour être un roi juste, un roi d’après son propre cœur, qu’il guiderait par la main. Il a prononcé son nom, Cyrus d’Anshan, et il a désigné son nom pour la royauté sur tout… ».

 529 -522 : Règne de Kambûjiya (Cambyse II), fils aîné de Cyrus, qui avait été, huit années durant, vice-roi de Babylone sous l’autorité de son père. Il doit imposer sa propre autorité en faisant assassiner son frère Bardiya qui encourageait diverses révoltes dans les provinces orientales de l’empire. Cambyse entreprend la conquête de l’Egypte du pharaon Amasis. Une fois la victoire obtenue contre le pharaon – aidé de mercenaires grecs mais abandonné par son allié le tyran Polycrate de Samos –, il déporte à Suse Psammétique III, le fils et successeur d’Amasis. Trois garnisons suffisent pour tenir le pays, mais une expédition envoyée vers l’oasis d’Amon se perd dans le désert et le souverain perse renonce au projet visant à imposer son autorité à la lointaine Carthage, les marins phéniciens de sa flotte refusant d’engager la lutte contre la cité-sœur punique. Les Grecs de Cyrène se soumettent et une expédition conduite jusqu’en Nubie aboutit à la fondation de la ville de Méroé.
 522 : Cambyse apprend que le mage Gaumata, ressemblant étrangement à son frère, s’est fait passer pour Bardiya et s’est proclamé roi à la faveur de son absence. Le souverain disparaît en Syrie dans des conditions obscures en se donnant peut-être la mort au cours d’une crise de folie. L’armée demeure fidèle aux Achéménides et refuse de reconnaître l’autorité de l’usurpateur Gaumata. C’est alors que sept jeunes princes pouvant prétendre au trône s’entendent pour choisir l’un d’entre eux en recourant à l’hippomancie. Le cheval de Darius étant le premier à hennir au lever du soleil, c’est lui qui est choisi (mais, selon Hérodote, le palefrenier du jeune prince n’était pas étranger à cette issue heureuse ; il aurait, la veille, emmené à l’endroit choisi pour le rite prévu le cheval de son jeune maître, en ayant pris soin d’y faire conduire, en même temps, une jument…).

 521 -486 : Règne de Dâryav (Darius Ier), fils de Hystaspe, gouverneur de la Perside au début du règne de Cyrus le Grand. Il établit rapidement, en deux ans, son autorité dans l’empire en se débarrassant de neuf prétendants dressés contre lui. Il conduit ensuite une campagne jusqu’aux rives de l’Indus, qu’il fait descendre par une flotte placée sous le commandement du Grec Scylax de Caryande. En Egypte, il fait réaliser les travaux nécessaires pour rendre à la navigation le canal que le pharaon Néchao avait fait creuser entre le Nil et la mer Rouge.

 516 : Darius fait, le premier, frapper des « dariques » en or inspirées des monnaies inventées en Lydie et en Ionie.

 514 : Darius entreprend une campagne contre les Scythes de Russie méridionale, et la colonie grecque de Byzance reconnaît, à cette occasion, sa suzeraineté. L’entreprise conduite au nord de la mer Noire se solde par un échec, car les Scythes reculent devant l’armée perse en pratiquant une stratégie de « terre brulée » et l’immensité de leur territoire interdit aux envahisseurs d’espérer emporter la décision. Cette expédition demeure sans lendemain, mais le franchissement du Bosphore et la progression des Perses tout au long des côtes de la mer Noire, sans doute au-delà de l’embouchure du Dniestr, ont conduit le roi Amyngtias de Macédoine à reconnaître à son tour la souveraineté perse, alors que la Thrace est intégrée à l’empire.

 512 : Création, dans le bassin de l’Indus, de la satrapie de l’Hepthendon, étendue jusqu’au Pendjab (région partagée aujourd’hui entre le Pakistan et l’Inde).

 499 -494 : La révolte des cités ioniennes marque le début des « guerres médiques » qui vont opposer la Grèce des cités au puissant Empire perse. Déjà, au début du règne de Darius, le frère du défunt tyran de Samos avait sollicité le parrainage du Grand Roi pour pouvoir régner à son tour sur l’île… A la veille d’engager la campagne contre les Scythes, Darius envoie son médecin grec Démocédès reconnaître les eaux de l’Egée et de la mer Ionienne jusqu’à Tarente, en même temps qu’une flotte croise dans la mer Noire où de nombreuses colonies helléniques sont installées sur les côtes pour y échanger le blé local contre le vin ou la céramique produits en Grèce. Contre Sparte, championne de l’indépendance grecque, Athènes semble prête, sous la tyrannie de Hippias, à accepter la suzeraineté perse et envoie, même dans ce but, une ambassade à Suse, mais le renversement du tyran écarte l’établissement de tels liens.

 490 : Victorieux des cités grecques d’Ionie révoltées contre leur souverain avec l’aide des cités de Grèce continentale, les Perses s’emparent de Chio et de Lesbos et entendent imposer leur suzeraineté aux cités qui continuent à les défier, mais une tempête disperse leur flotte. Ils débarquent ensuite en Eubée et assiègent Erétrie dont ils finissent par s’emparer pour la mettre à sac et réduire en esclavage une bonne partie de sa population. La menace encourage alors les Grecs à s’unir, et Miltiade remporte, contre les forces ennemies très supérieures en nombre et commandées par le Mède Datis, la victoire de Marathon. Cet échec a des échos en Egypte où le satrape Aryandès doit faire face à une révolte et y laisse la vie avant que Darius ne vienne en personne y rétablir son autorité.

 486 : Mort de Darius Ier qui a donné à l’Empire perse sa plus grande extension territoriale en même temps qu’il l’a doté d’une puissante administration, fondée localement sur le partage du pouvoir entre le satrape et le chef des troupes, tous deux dépendant étroitement du « Grand Roi » qui les faisait contrôler par un représentant sur place. L’aménagement d’un vaste réseau routier et la mise sur pied d’un système efficace de poste aux chevaux concourt également à la solidité de l’Empire et au rendement élevé des tributs payés par les diverses provinces.

 486 -465 : Règne de Khchayarchâ (Xerxès). Petit-fils de Cyrus, il avait été chargé de régner sur Babylone douze années durant avant la disparition de son grand-père. Il doit tout d’abord briser brutalement des révoltes survenues en Egypte et en Mésopotamie.

 481 : Xerxès entreprend une campagne contre les Grecs. Il engage une immense armée placée sous le commandement de Mardonios et réunissant des contingents fournis par tous les peuples de l’empire.

 480 : Après le franchissement de l’Hellespont, la Thessalie et la Macédoine n’opposent aucune résistance. Les Spartiates de Leonidas défendent héroïquement le défilé des Thermopyles, mais Athènes est prise et les monuments de l’Acropole sont incendiés. Les Grecs continuent cependant la lutte sur mer sur le conseil de Thémistocle et détruisent, à Salamine, un bon tiers de la flotte perse. Xerxès rentre alors en Asie en laissant à Mardonios le soin de poursuivre la campagne.

 479 : Mardonios, le commandant des forces perses, est vaincu et tué à Platées alors qu’au même moment, la majeure partie de la flotte de Xerxès est détruite au cap Mycale, près de Samos.

 466 : Les Grecs remportent une nouvelle victoire sur les Perses sur les bords de l’Eurymédon, en Pamphylie.

 465 -424 : Règne d’Artakhchathrâh (Artaxerxès) surnommé « Longue Main ». Fils de Xerxès, il doit briser une révolte de son frère qui gouvernait la Bactriane (région d’Asie centrale étendue au nord de l’Hindou-Kouch, sur les deux rives de l’Oxus – l’actuel Amou daria – dont Balkh sera, pour longtemps, le centre principal) avant de faire assassiner tous ses autres frères.

 464 -454 : Révolte d’Inaros, en Egypte, soutenue par les Athéniens. Artaxerxès et le satrape Mégabyze en viennent à bout.

 451 : Une trêve de cinq ans est conclue entre le Grand Roi et ses adversaires grecs. Les Perses abandonnent les cités grecques de la côte ionienne, et la frontière occidentale de l’empire est ramenée sur l’Halys.

 424 : Mort d’Artaxerxès. Son fils Xerxès II ne règne que six semaines. Il est assassiné par Sogdianos, le fils d’une concubine de son père, avant que l’un de ses frères, Vahûka (Okhos), satrape d’Hyrcanie, ne s’empare, en 423, du pouvoir pour régner jusqu’en -405 sous le nom de Darius II, avec le surnom de « Nathos » qui signifie le « Bâtard ». Il intervient dans les luttes qui déchirent alors la Grèce et soutient Sparte engagée contre Athènes dans la guerre du Péloponnèse.

 405 -359 : Règne d’Artaxerxès II, fils aîné du précédent, surnommé « Mnemon » en raison de sa mémoire exceptionnelle. Son frère Cyrus, préféré de leur mère Parysatis, tente vainement de l’assassiner lors de son couronnement dans le temple de Pasargades, mais le souverain pardonne au rebelle et l’envoie reprendre le gouvernement des satrapies de Lydie, Phrygie et Cappadoce qui lui avaient été confiées jusque-là. Mal lui en prend, car son frère félon récidive avant d’être, finalement, tué au combat. C’est à ce moment que se place l’épisode des Dix Mille, ces mercenaires grecs de l’armée de Cyrus qui, sous le commandement de Xénophon – qui a immortalisé leur aventure dans son Anabase – se replient vers leur patrie à travers l‘Asie Mineure.

 404 : L’Egypte se soulève et proclame son indépendance. Dans le même temps, le Spartiate Agésilas l’emporte sur les Perses, mais sa cité le rappelle car l’or du Grand Roi est devenu son moyen d’action principal au moment où ses armées ne sont plus invincibles. Artaxerxès II encourage et soutient également Thèbes dans sa lutte contre Athènes. Plusieurs révoltes menacent cependant dangereusement l’unité de l’empire qui demeure, pourtant, finalement préservée à la mort d’Artaxerxès.

 401 : Cyrus le Jeune s’insurge contre son frère Artaxerxès II Mnemon, mais il est tué lors de la bataille de Kounaxa, au nord de Babylone.

 387 : La « paix du Roi », dite aussi « paix d’Antalcidas », du nom du négociateur spartiate, rétablit la mainmise perse sur l’Asie Mineure.

 359 -338 : Règne d’Artaxerxès III Ochos. Il se débarrasse de tous ses frères susceptibles de se transformer en rivaux et réprime les révoltes des satrapes.

 353 : Le Grand Roi échoue dans sa tentative de reconquérir l’Egypte. Il brûle Sidon et massacre ses habitants qui s’étaient alliés aux Egyptiens révoltés.

 343 : La résistance égyptienne est vaincue avec l’aide de Mentor de Rhodes. L’empire est ainsi rétabli quand Athènes, menacée par Philippe de Macédoine, envoie de nouveau une ambassade à Suse pour rechercher l’alliance perse. En -338, Philippe met cependant fin à l’indépendance grecque, l’année qui voit la mort d’Artaxerxès III, empoisonné en même temps que son fils cadet et successeur Arsès par l’eunuque Bagoas.

 335 -330 : Règne de Darius III Codoman, le dernier souverain achéménide qui va être vaincu par Alexandre.

 334 : L’armée d’Alexandre franchit l’Hellespont. Le jeune roi macédonien bat une première fois les forces perses à la bataille du Granique. Il s’empare de Sardes, de Milet et d’Halicarnasse et soumet la Carie avant de traverser la Lycie, la Pamphylie et la Pisidie pour arriver à Gordion – la capitale de la Phrygie où intervient l’épisode fameux de la rupture du célèbre « nœud gordien » – pendant que son lieutenant, Parménion, s’empare de la Phrygie hellespontique et de la Lydie. Au printemps de -333, le jeune roi macédonien est ainsi devenu le maître de toute l’Asie Mineure.

 333 : Victoire d’Issos au nord de la Syrie, remportée par Alexandre sur les troupes de Darius, qui doit repasser l’Euphrate et battre en retraite vers l’est. Alexandre conquiert ensuite la Phénicie et s’empare notamment de Tyr, prise à l’issue de sept mois de siège. A deux reprises, il repousse les offres de compromis de Darius, prêt à lui abandonner l’Asie Mineure et une lourde rançon pour obtenir la liberté de sa famille capturée à Issos. Le conquérant prend Gaza après deux mois de siège et pénètre ensuite en Egypte où il passe l’hiver -332 -331. C’est à cette occasion qu’il pousse jusqu’à l’oasis d’Amon dans le désert occidental.

 331 : Alexandre franchit l’Euphrate, puis le Tigre et repousse une nouvelle offre de paix de Darius, prêt désormais à fixer sur l’Euphrate la frontière occidentale de son empire. Le souverain perse est de nouveau battu à la bataille de Gaugamèles et, en octobre, il doit fuir Arbèles où son trésor tombe aux mains du souverain macédonien qui entre bientôt sans combat dans Babylone, puis dans Suse. Le vainqueur s’empare ensuite de Persépolis, la capitale de l’empire, qui sera bientôt détruite dans un gigantesque incendie. Il prend ensuite Pasargades, avant de marcher sur Ecbatane.

 330 : Darius, qui s’est enfui vers l’est, est finalement assassiné par le satrape de Bactriane, Bessos. Sa mort signifie la fin de la dynastie achéménide qui avait fait de l’Iran le premier grand empire de l’Antiquité dans la mesure où l’espace dominé allait de l’Indus au Nil, et de la mer Caspienne à l’océan Indien et où une multitude de peuples très divers se trouvaient réunis dans un même ensemble politique qui dépassait largement les dimensions des grands royaumes antérieurs.
Respectueux des particularismes ethniques et religieux, l’empire du Grand Roi n’en était pas moins divisé en satrapies confiées à des Perses dépendant directement du souverain et, au fil du temps, les rapports de type féodal de l’époque mède et des débuts de l’ère achéménide avaient fait place à une monarchie administrative capable d’obtenir le paiement régulier des tributs. L’élamite, l’araméen et le vieux perse sont les principales langues utilisées dans l’empire où la religion du peuple dominant était le mazdéisme réformé par Zarathoustra (Zoroastre).

D’Alexandre au temps des Parthes et des Arsacides

Hiver -330 -329 : Alexandre s’installe à Alexandrie du Caucase, au sud de l’Hindou- Kouch, après avoir créé Alexandrie d’Ariane (Hérat), Alexandrie de Margiane (Merv) et Alexandrie d’Arachosie (Kandahar). Il franchit ensuite l’Hindou-Kouch pour gagner l’Asie centrale, y vaincre les Sogdiens et pousser au nord de l’Oxus (Amou daria) et de l’Iaxartes (Syr daria).

 327 : Alexandre épouse Roxane et donne à son père la satrapie de Bactriane avant de créer une Alexandrie d’Iaxartes (Khodjend).

 326 : Alexandre soumet le royaume de Taxila (Pakistan) et bat le souverain indien Poros avant de s’avancer jusqu’au fleuve Hyphase (l’actuelle Setledj, affluent de l’Indus) au-delà duquel son armée refuse de progresser. Après avoir descendu l’Indus, il ordonne la construction d’une flotte qui, confiée à Néarque, devra rallier le golfe Persique. Il divise ensuite son armée en deux parties dont l’une reviendra vers la Mésopotamie par l’Arachosie alors que l’autre traversera la Gédrosie en suivant la côte, en liaison avec la flotte. Les deux armées se rejoindront effectivement à hauteur de l’actuelle Bandar Abbas pour poursuivre en direction de Pasargades puis de Suse, atteinte en -324. Le nouveau maître de l’empire réorganise alors celui-ci en conservant le découpage en satrapies et en maintenant en place certains gouverneurs perses. Il adopte, en même temps, l’étiquette de la cour achéménide. Il organise l’union de nombre de ses généraux et d’une partie de ses soldats avec des femmes perses, et épouse lui-même, en secondes noces, Stateira, une fille de Darius.

 323 : Mort d’Alexandre à Babylone. Cette disparition prématurée condamne à l’échec l’immense empire qui venait d’être bâti par le conquérant. L’assassinat de Roxane et de son fils en -309-308 et la disparition du demi-frère du roi macédonien amènent les compagnons de celui-ci à s’affronter pour le pouvoir.

 312 : Seleucos Ier Nikator s’installe à Babylone et introduit l’hellénisme en Iran où il épouse Apamée, issue de la noblesse iranienne.

 311 : Seleucos conduit une campagne contre le souverain indien Chandragupta, fondateur de la dynastie des Mauryas avec qui il conclut la paix en -304, en renonçant à l’actuel Afghanistan.

 301 : Bataille d’Ipsos. Elle scelle le partage de l’empire d’Alexandre en trois grands ensembles revenant aux Antigonides en Grèce et en Macédoine, aux Ptolémée ou Lagides en Egypte et aux Séleucides en Syrie et en Perse. Seleucos Ier, compagnon d’Alexandre et satrape de Babylone, marié à une princesse perse, reçoit donc l’héritage des Achéménides, amputé de l’Egypte, de la Palestine, du Sud de la Syrie et d’une partie de l’Asie Mineure. A l’est, il doit céder au roi indien Chandragupta des territoires prélevés sur les provinces de Gédrosie et d’Arachosie. Seleucos fonde deux capitales, l’une sur le Tigre, Séleucie, qui absorbe l’ancienne Babylone, et l’autre sur l’Oronte, Antioche. Ce royaume comprend donc deux ensembles de territoires bien distincts dont le premier tombera, un siècle et demi plus tard, aux mains des Parthes alors que l’autre se réduira à une Syrie rapidement absorbée par Rome.

 281 -262 : Règne d’Antiochos Ier Sôter. C’est à ce moment que la Perside, trop éloignée de la Syrie, devenue le cœur territorial de la dynastie, prend progressivement son indépendance de fait.

 260 -246 : Règne d’Antiochos II. Il voit la Bactriane, la Parthie et l’Hyrcanie échapper à l’autorité du souverain vers -250 -249. Un royaume gréco-bactrien indépendant fondé par Diodote se maintiendra jusqu’à la fin du IIe siècle avant J.-C. Vers la même époque, le satrape de Parthie Andragoras se dresse contre le souverain séleucide, mais il succombe en -239 face à l’invasion des Parnes commandés par Arsace. Ces semi-nomades iraniens installés au nord du Kopet Dag conquièrent alors l’Hyrcanie. Rapidement assimilés aux populations locales, ils en adoptent la langue ainsi que le nom pour devenir les « Parthes ».

 246 -227 : Règne de Seleucos II Kallinikos. Il doit compter, vers l’est, avec la menace parthe et perd, vers l’ouest, l’Asie Mineure.

 227 -223 : Règne de Seleucos III Sôter.

 223 -187 : Règne d’Antiochos III le Grand. Il voit la dynastie séleucide rétablir pour un temps sa situation. Molon, le satrape rebelle de Médie, est vaincu en -220 près d’Apollonia, en Babylonie, et les Parthes sont tenus en respect. Au cours d’une longue campagne de huit années, le souverain oblige le roi d’Arménie à reconnaître son autorité, parcourt l’Iran où, de Suse à Ecbatane, il restaure son pouvoir. Le Parthe Arsace II (Artaban) doit se soumettre. Antiochos III pénètre également en Bactriane où la dynastie grecque, issue de Diodotos, a été remplacée par une autre lignée royale apparue avec Euthydème qui va être contraint de se soumettre. Le mariage de Démétrios, fils d’Euthydème, avec la fille d’Antiochos scelle le retour des Séleucides en cette région et l’on voit même Antiochos III franchir l’Hindou Kouch et traiter avec le souverain maurya qui contrôle alors toute l’Inde du Nord.

 205 : Antiochos III prend le titre de « Grand Roi » et regagne les régions occidentales de son empire en traversant la Perside et en visitant les centres commerciaux du golfe Persique.

 190 : Entraîné dans les affaires de Rhodes et de Pergame, Antiochos III est vaincu par les Romains à la bataille de Magnésie.

 188 : La paix d’Apamée scelle la défaite du souverain séleucide face à Rome, qui a soutenu le royaume attalide de Pergame. Il doit lui abandonner ses possessions d’Asie Mineure et payer un lourd tribut. La puissance séleucide est désormais sur la défensive et Antiochos sera tué lors d’une révolte survenue en Susiane l’année suivante. Le pouvoir des Séleucides est désormais limité à la Syrie et à la Cilicie.

 187 -176 : Règne de Seleucos IV Philopator.

 175 -164 : Règne d’Antiochos IV Epiphane, qui fut le dernier grand souverain séleucide. Il ne pourra cependant conjurer la décomposition de son royaume. Les Parthes s’emparent de la Mésopotamie peu après sa disparition, et les satrapes des diverses provinces parviennent à conquérir une autonomie presque totale. Bientôt, l’Etat séleucide se réduit à la seule Syrie. Profitant de l’héritage laissé par les Achéménides, les Séleucides ont réussi, pendant près de deux siècles et demi, à établir une administration régulière qui leur garantit d’importantes ressources fiscales. Le grec s’est substitué à l’araméen comme langue officielle. Sur le plan culturel, la période est marquée par une incontestable hellénisation de l’Orient, mais, dans le même temps, les Grecs se familiarisent avec les traditions iraniennes et adoptent ainsi, entre autres choses, la déification des souverains. Florissante au début de la période, la vie économique s’est détériorée avec l’aggravation des menaces extérieures, romaine à l’ouest et parthe à l’est.

 163 -162 : Règne d’Antiochos V Eupator.

 162 -150 : Règne de Démétrios Ier Sôter, suivi par ceux d’Alexandre Bala (-150 -145) et Démétrios II Nicator (-145 -125).
vers -145 : Destruction d’Aï Khanoum, sur les rives de l’Oxus, avant-poste de la civilisation hellénique au cœur de l’Asie centrale, balayé par les envahisseurs nomades venus du Nord.
Les Parthes sont des nomades installés à l’est de l’Iran, apparentés aux populations scythiques qui occupaient l’espace s’étendant depuis les plaines fertiles du nord de la mer Noire aux vastes régions steppiques séparant la mer Caspienne de la mer d’Aral. Le nom qui leur est attribué par les sources occidentales est peut-être issu d’un terme les identifiant comme des « cavaliers ». Ils ont constitué une menace permanente pour l’Empire achéménide sur sa frontière nord-orientale. Vers le milieu du IIe siècle avant J.-C., ils occupent la Parthie, ou Parthiène, une ancienne satrapie de l’empire où ils se sont installés pour échapper à l’autorité de Diodote, le roi de Bactriane, qui avait lui-même conquis son indépendance en rejetant l’autorité du souverain séleucide Antiochos II. L’un des chefs parthes, Arsace, fonde une dynastie vers -250, et son frère Tiridate lui succède. Pour donner à leurs ambitions un semblant de légitimité, ils prétendent descendre des Achéménides. A leur arrivée dans l’Iran hellénisé par les Séleucides, les Parthes conservent la structure territoriale antérieure, héritée elle-même du découpage en satrapies de l’époque achéménide. Sept grandes familles nobles s’approprient les meilleures terres et constituent des pouvoirs susceptibles de mettre en cause celui de la royauté. Spécialiste de cette période, l’historien T. Cuyler Young affirme « qu’il serait erroné de considérer les Parthes comme les héritiers des Achéménides. La Parthie n’était pas un empire puissant. Il s’agissait plutôt de provinces et de principautés entretenant divers rapports de soumission au roi parthe. Il serait plus correct de parler d’hégémonie parthe que d’Empire parthe ». Confrontés aux Romains sur l’Euphrate et en Arménie, les Parthes durent également compter avec les menaces venant des confins septentrionaux et orientaux de leur Empire. Luttes successorales et conflits internes à la noblesse dominèrent l’Histoire de celui-ci. La civilisation parthe demeure marquée par l’hellénisme, ce dont témoignent la numismatique et le surnom de « philhellène » que s’attribuent les souverains. La fusion des éléments iraniens et grecs s’affirme dans des cités telles que Hatra ou Doura Europos. Dans le domaine religieux, c’est la diversité qui prévaut, dans la mesure où les Parthes adoptent souvent les divinités et les croyances des régions qu’ils dominent, et c’est à cette époque que se développe le culte de Mithra appelé à rencontrer un grand succès dans l’Empire romain. Il ne reste rien de la Ctésiphon parthe, mais le roi Vologèse construit Vologesocerta pour remplacer Séleucie et l’art parthe est à l’origine d’innovations décisives telles que la représentation de face en sculpture ou l’emploi de l’iwan (vaste vestibule) et de la voûte en architecture.

 248 -214 : Règne de Tiridate. Les Parthes s’emparent alors de toutes les régions étendues de la mer Caspienne à la mer d’Aral et ajoutent à leurs conquêtes l’Hyrcanie. Tiridate installe une première capitale à Arsak, puis une seconde à Hécatompylos.

 214 -196 : Règne d’Artaban Ier, qui est battu par Antiochos III lors de la grande expédition que celui-ci conduit sur les marges orientales de son royaume. Artaban doit se soumettre mais, à la faveur des luttes opposant Séleucides et Romains, son fils Priapatios soumet la région de l’actuel Mazandéran.

 196 -180 : Règne de Phripatès.

 180 -174 : Règne de Phraate Ier.

 174 -136 : Mithridate Ier « Philhellène » profite de la désagrégation du Royaume séleucide en pleine crise et prend le titre de « Roi des rois ». Il annexe la Médie, l’Elymaïde, la Perside, la Gédrosie et, peut-être, une partie de l’Ariane. Les Parthes poussent alors vers l’ouest jusqu’à l’Euphrate, sans réussir cependant à s’emparer de Séleucie sur le Tigre, mais ils établissent, non loin de cette ville, sur la rive gauche du fleuve, une forteresse, Ctésiphon, appelée à devenir leur capitale. Mithridate se heurte cependant à de fortes résistances et l’irruption des Parthes en Mésopotamie n’est pas perçue comme une libération par les populations. La résistance du prince séleucide Démétrios sera cependant vaine. Habile politique, Mithridate le mariera à sa fille et lui confiera le gouvernement de l’Hyrcanie.

 136 -127 : Règne de Phraate II qui a succédé à son père Mithridate Ier. Il en hérite un empire qui s’étend de l’Euphrate à l’Ariane, mais doit faire face à une réaction séleucide puisque Antiochos VII Sidète tente de récupérer les territoires perdus et d’obtenir le retour de son frère Démétrios. Il reconquiert effectivement la Mésopotamie et bat à plusieurs reprises son adversaire avant de traiter à Ecbatane avec lui. Phraate fait mine d’accepter sa défaite et de satisfaire les exigences du vainqueur, mais il l’attaque par surprise et lui inflige une défaite complète qui voit, en -129, la mort d’Antiochos. Les Parthes ont ainsi reconquis tout le terrain perdu et menacent directement la Syrie. Phraate doit cependant faire face à un nouveau péril, l’irruption, dans tout l’Est de son empire, de populations scythiques surgies d’Asie centrale. Le sort des armes lui est alors défavorable. Il est tué et son oncle et successeur Artaban II l’est à son tour.

 127 -124 : Règne d’Artaban II.

 124 -91 : Règne de Mithridate II. Il prend le pouvoir à un moment qui voit la puissance parthe contestée par de nombreuses révoltes à l’ouest et menacée de plus en plus dangereusement par les peuples nomades qui envahissent régulièrement les régions orientales où le Royaume gréco-bactrien est détruit par ces nouveaux venus. Mithridate réussit à contenir leur poussée et à reprendre le contrôle de la Margiane, de l’Ariane et de la Gédrosie, mais la menace demeure sur le cours de l’Oxus (Amou Daria). Elle est le fait des Scythes Sacarauques et des Tokhariens (Yué Tché). Ceux-ci établiront dans le Nord-Ouest de l’Inde diverses principautés ou royaumes liés aux Parthes mais demeurés durablement indépendants.

 115 : Mithridate II conclut avec Wu-ti, l’empereur Han de Chine, un traité qui doit faciliter le commerce appelé à se développer à travers l’Asie centrale, tout au long de la célèbre « route de la soie ».

 113 : Mithridate II s’empare de Doura sur l’Euphrate et fait construire à Nisa une nouvelle capitale.

 112 : Mithridate Eupator crée le royaume du Pont qui domine toute l’Asie Mineure et va constituer, pour les Romains engagés dans la conquête de ces régions, un adversaire redoutable de -89 à -63. Il s’allie avec Tigrane d’Arménie entré en conflit avec son suzerain parthe, au point d’aller s’emparer d’Ecbatane et de prendre, en -83, le titre de « Roi des rois ».

 96 : L’envoyé parthe Orobazès rencontre Sylla, propréteur romain en Cilicie.

 91 -80 : Règne de Gotarzès. Lui succèdent Orodès Ier jusqu’en -76, Sinetrocès jusqu’en -69, Phraate III jusqu’en -60, Mithridate III jusqu’en -56, Orodès II jusqu’en -37.

 88 -64 : Confrontés à des troubles intérieurs, les Parthes demeurent neutres durant toute la durée du conflit qui oppose les Romains au roi du Pont, Mithridate.

 69 et -66 : Des traités sont conclus par les Parthes avec Lucullus et Pompée. Ils fixent sur l’Euphrate la frontière entre les domaines parthe et romain.

 53 : Bataille de Carrhae (Harran) au cours de laquelle les légions romaines de Crassus sont vaincues par les Parthes de Suréna que le roi Orodès II fera ensuite exécuter, car il juge qu’il est devenu dangereux pour son autorité.

 40 : Orodès et son fils Pacorus envahissent la Syrie puis poussent leur avantage en Asie Mineure et en Syrie, ce qui signifie la perte d’une grande partie de l’Orient romain. La réaction romaine, conduite par C. Ventidius Bassus, est rapide et les Parthes sont vaincus. Pacorus est tué à Gindarus en -39 et Orodès assassiné par ses autres fils.

 37 : Avènement de Phraate IV qui règnera jusqu’en 2 avant J.-C. Il devra compter avec un rival, Tiridate II, finalement rallié à Rome. De -36 à -34, Antoine pénètre dans le Caucase et impose la suzeraineté de Rome à l’Arménie, mais s’avance trop profondément en Médie Atropatène (l’actuel Azerbaïdjan) et se voit contraint à la retraite. L’année suivante, le rétablissement de l’alliance entre Arméniens et Parthes condamne toute nouvelle tentative.

 20 : Auguste conclut la paix avec Phraate IV qui lui rend les aigles prises à Crassus. L’Arménie fait désormais fonction d’Etat-tampon. La frontière avec la puissance romaine est stabilisée sur l’Euphrate.

A partir de -2 : Règnent successivement Phraate V, qui a empoisonné son père et recherché l’alliance romaine, de 2 avant J.-C. à 5 après J.-C., puis Orodès III de 5 à 7, puis Vononès Ier de 8 à 11. La noblesse parthe se soulève contre ce dernier souverain qui a été éduqué à Rome et se voit remplacé par Artaban III.

11- 40 : Règne d’Artaban III durant lequel s’impose la langue pehlevie. Tiridate III, Cinnamus, Vardanès Ier, Gotarzès II et Vononès II se disputeront ensuite le pouvoir jusqu’en 51.

37 : Artaban et le gouverneur romain de Syrie, Vitellius, trouvent un accord sur la question arménienne.

51-75 : Règne de Vologèse Ier. C’est à ce moment qu’aurait été rédigé l’Avesta. Pacorus II, Artaban IV et Vologèse II succéderont à Vologèse Ier alors que l’Iran oriental est occupé par les Kouchans, qui vont bâtir un empire indo-scythe.

63-66 : Par le traité de Rhandeia, l’Arménie demeure aux mains des Arsacides, mais sous domination romaine et c’est Tiridate, frère de Vologèse Ier, qui reçoit à Rome, des mains de Néron, la couronne des rois d’Arménie.
après 75 : L’Empire parthe est fragilisé par les invasions des Alains, la sécession de l’Hyrcanie et les querelles dynastiques.

106-129 : Règne d’Osroès.

114 : Conquête de l’Arménie par Trajan.

117 : Mort en Cilicie de l’empereur romain Trajan, qui s’est emparé en 116 de Ctésiphon et de Séleucie du Tigre et a poussé jusqu’au golfe Persique mais a vu sa victoire sur les Parthes compromise par la multiplication des révoltes en Orient.

118 : Hadrien signe la paix avec Osroès. Il doit évacuer les territoires conquis par Trajan sauf l’Arménie.

125 : Avènement de Kanishka à la tête du Royaume kûchân établi à l’est de l’Empire parthe. Le peu d’intérêt porté par les Indiens à l’Histoire et à la chronologie laisse planer beaucoup d’incertitudes quant aux dates de la dynastie (certains placent ainsi en 140, voire en 172, l’avènement de Kanishka). Les Kouchân sont une dynastie d’origine tokharienne et ont étendu leur autorité dès l’époque de leur premier souverain, Kujuila Kadphisés, sur toutes les régions allant de la Margiane (actuelle région de Merv) à l’Indus. Wima-Kadphisés, le fils du précédent, a ensuite annexé, au détriment de l’Empire parthe, l’Ariane (région d’Hérat), l’Arachosie (région de Kandahar) et l’actuel Séistan (la Sakasthène, au sud-est de l’Iran). Maîtres pour un temps de la route de la soie, l’Empire kûchân se tourne davantage vers l’Inde que vers le plateau iranien et apparaît, ainsi, comme un ennemi moins dangereux que ne l’est l’Empire romain à l’ouest. Kanishka établit sa capitale à Purushapura (Peshawar) et sa capitale d’été à Begram (Kapici, près de l’actuelle Kaboul). Il était ainsi installé au centre d’un royaume qui s’étendait vers le nord jusqu’en Sogdiane et se prolongeait vers les oasis du Tarim en même temps qu’il dominait l’Inde septentrionale jusqu’à Bénarès et jusqu’au cours de la Narbada dans le Deccan. Kanishka réunit sur sa tête les titres indiens de maharadjah (« grand roi »), parthe et iranien de chahenchah (« roi des rois ») et chinois de « fils du Ciel », ce qui témoigne du caractère cosmopolite de ce royaume qui va régulièrement décliner à partir du milieu du IIIe siècle pour voir finalement son pouvoir se limiter à la région de Kaboul et à la vallée supérieure de l’Oxus, avant sa disparition finale vers le milieu du Ve siècle. A ce moment, l’influence iranienne était dominante dans les régions d’Asie centrale, mais aussi sur une partie de l’Inde du Nord où avait fleuri précédemment le Royaume kouchan.

129-147 : Règne de Mithridate V, marqué surtout par les luttes internes qui constituent une source d’affaiblissement chronique pour l’Empire parthe.
147-191 : Règne de Vologèse III.

162 : La lutte reprend avec Rome. Les Parthes envahissent l’Arménie, la Cappadoce et la Syrie, mais les armées d’Antonin le Pieux l’emportent à Dour et les vainqueurs poussent au-delà du Tigre.

165 : Ctésiphon est prise et incendiée par Avidius Cassius, mais la peste contraint, en 166, les Romains à la retraite.
Sous Marc-Aurèle, fixé par les Germains sur le Rhin et le Danube, les Parthes reprennent l’initiative et envahissent la Syrie et l’Arménie.

191-209 : Règne de Vologèse IV, les Parthes sont de nouveau menaçants.

197 : Ctésiphon est de nouveau prise et détruite par les Romains sous le règne de Septime Sévère, mais la ville de Hatra parvient à résister.

216 : Caracalla envahit de nouveau la Mésopotamie alors que s’affrontent pour le pouvoir Vologèse V et Artaban V qui, après la mort de Caracalla, assassiné en 217, bat à deux reprises l’empereur Macrin.

224 : Le 28 avril, Artaban V est tué en Susiane, dans la plaine d’Hormizdaghan, par l’un de ses vassaux révoltés qui sera à l’origine de la dynastie sassanide. Les siècles durant lesquels l’Histoire iranienne s’est confondue avec la puissance parthe s’inscrivent dans une certaine continuité, qui relie l’Empire achéménide, premier grand empire « universel » de l’Histoire à l’Empire sassanide qui va incarner à son tour, pendant quatre siècles, la vitalité de la civilisation perse. Les Parthes ne sont cependant pas parvenus à pousser jusqu’aux côtes de la Méditerranée et de la mer Noire et à rétablir ainsi les anciennes frontières occidentales de l’Empire achéménide. La langue dominante à l’époque parthe est le pehlevi arsacide, pratiqué originellement dans l’Iran central (elle sera remplacée au IIIe siècle par le pehlevi sassanide parlé dans le Fars, au sud-ouest du pays). Les populations des régions orientales du monde parthe utilisent le sogdien, qui restera longtemps une grande langue « internationale » pour toute l’Asie centrale (rôle imparti ultérieurement au persan). Sace et tokharien étaient, pour leur part, pratiqués au nord-est, dans les régions contrôlées par les différents peuples scythes et par les Tokhariens ou Yue-Tché. Sur le plan religieux, la déesse Anahita et le très ancien dieu indo-iranien Mithra semblent avoir été les plus honorés, avant que le zoroastrisme ne s’impose comme religion d’Etat sous les Sassanides.

L’Empire sassanide

Les Sassanides qui vont succéder aux Arsacides à la tête du monde iranien sont des Perses, originaires du Fars comme les Achéménides ; la lignée a, pour ancêtre éponyme, Sassan, prêtre du temple d’Anahita à Istakhr, la capitale religieuse de la Perside, héritière de l’ancienne Persépolis. En 208, un fils de Sassan, Pâbhagh, règne sur une partie du Fars, plus précisément sur la région de l’actuelle Chiraz. Son fils cadet Artakhchatr (Ardachîr) se rend maître de plusieurs autres villes du Fars et soumet la Susiane et le petit royaume de Mésène établi par des Arabes à l’embouchure du Tigre, en même temps que son père accroît sa puissance, au point de réclamer au roi parthe Artaban V de reconnaître son autorité sur les régions qu’il contrôle, ainsi que le droit d’en hériter pour son fils aîné Châhpûhr. Artaban V refuse et traite Pâbhagh en rebelle. A la mort de celui-ci, Châhpûhr lui succède, mais son frère Ardachîr se dresse contre lui et profite bientôt de la mort accidentelle de son aîné. Reconnu par ses autres frères, Ardachîr les fait cependant assassiner pour éviter toute concurrence avant de vaincre et de tuer Artaban de sa propre main en 224, en Susiane, dans la plaine de Hormizdaghan. Entré en vainqueur à Ctésiphon, il s’y fera couronner après avoir épousé une parente d’Artaban. Ardachîr est dès lors en mesure de créer un nouvel Etat, qui va mettre en œuvre une puissante réaction « nationale » perse qui aboutira au rejet de bon nombre d’éléments issus de la civilisation hellénistique. Une réaction qui ira de pair avec une nouvelle politique religieuse fondée sur l’adoption du mazdéisme comme religion d’Etat et sur la rupture avec la traditionnelle « tolérance » montrée jusque-là par les Perses ou les Parthes vis-à-vis des diverses autres croyances.

Le vaste empire constitué par les Sassanides est appelé à durer pendant plus de quatre siècles. Il tire une partie importante de ses ressources de sa situation sur les routes commerciales qui, à travers le continent (la fameuse route de la soie) ou par mer (le commerce de la mer Erythrée, c’est-à-dire l’océan Indien), permettaient d’apporter vers le bassin méditerranéen les produits de l’Orient lointain. Cette position privilégiée est menacée car, si les Sassanides cherchent à atteindre le littoral oriental de la Méditerranée, les Romains tentent, pour leur part, de s’ouvrir directement, au-delà de Palmyre et de l’Euphrate, les voies du commerce oriental. Finalement vainqueurs de l’empire indo-scythe des Kouchans, les Sassanides doivent également compter ensuite avec les peuples nomades d’Asie centrale tels que les Alains ou les Saces qu’ils parviendront à tenir en respect. Vainqueurs éphémères de l’Empire romain d’Orient au début du VIIe siècle, ils devront renoncer à leurs conquêtes avant de succomber, de manière tout à fait inattendue, à l’islam apparu au sud-ouest de leur empire. La force de l’Etat sassanide repose sur un système de castes issu de la tradition indo-iranienne. Le clergé est dirigé par un Grand Mage, deuxième personnage de l’Etat après le roi. Les mages mazdéens ou zoroastriens constituent une véritable Eglise nationale.

Regroupés en communautés dans des temples dotés d’immenses ressources, ils entretiennent le feu sacré et accomplissent les rites en même temps qu’ils dispensent l’enseignement. La deuxième caste est celle des nobles, propriétaires de la terre et chargés d’encadrer l’armée. La centralisation accrue du pouvoir les a privés de la large autonomie dont ils disposaient à l’époque parthe. La masse paysanne constitue la majeure partie de la population, mais la royauté sassanide a également favorisé le développement d’une importante bureaucratie de scribes dirigée par un « Grand Commandeur » qui fournira ultérieurement le modèle du vizir musulman, assisté de secrétaires d’Etat responsables de conseils spécialisés qui deviendront les diwan de l’époque abbasside. La fiscalité est rigoureusement organisée. La capitation (gezit) et l’impôt foncier (kharag) seront ensuite perçus par les califes musulmans. L’économie est organisée autour de grands monopoles d’Etat encadrant l’extraction minière, la fabrication des armes ou des produits de luxe tels que la soie. Une administration nombreuse veille, par ailleurs, à l’entretien des routes et au bon fonctionnement d’un service postal analogue à celui mis en place sous les Achéménides. Au sommet de la pyramide sociale, le chah, ou « roi des rois », réside dans ses palais de Bishapur ou de Ctésiphon dont les dimensions témoignent de la puissance qui était la sienne, de même que les grands reliefs rupestres rappellent ses victoires sur les Romains ou ses exploits de chasseur. Créée par Zarathoustra au VIe siècle avant J.-C., le mazdéisme (ou zoroastrisme) est la religion officielle et la seule autorisée dans l’Empire sassanide. C’est elle qui donne sa légitimité au souverain, appelé à exercer le pouvoir par la volonté du dieu suprême Ahura Mazda. Dans le même temps, la religion « nationale » ne tolère plus les autres cultes pratiqués sous les Arsacides. Juifs, bouddhistes, chrétiens et manichéens connaissent ainsi à divers moments des persécutions plus ou moins violentes. C’est ainsi que Manés, le fondateur du manichéisme, initialement bien accueilli par Châhpûhr Ier, est finalement exécuté.

226 : Ardachîr est couronné « roi des rois » à Ctésiphon, non loin de l’emplacement de la future Bagdad, qu’il adopte comme capitale (là où s’élèvera ensuite – en Irak, sur les rives du Tigre – la capitale du Califat abbasside. Il va régner jusqu’à sa mort, survenue en 241.

230-232 : Première offensive des Perses en Mésopotamie, près de Nisibe et de Carrhes, mais l’armée romaine rétablit la situation, et Sévère Alexandre obtient le triomphe, avec le titre de Persicus Maximus.

241 : Avènement de Châhpûhr Ier, qui est couronné à Ctésiphon le 20 mars 242. Le nouveau souverain s’entretient la même année avec Mani, le fondateur du manichéisme, né en 216.

243-244 : Première campagne de Châhpûhr contre les Romains, qui sont battus à Misiché, sur la rive gauche de l’Euphrate. L’empereur Gordien IV est tué et son successeur Philippe l’Arabe accepte de payer un tribut au vainqueur. Cette défaite correspond sans doute à l’abandon du protectorat romain sur l’Arménie.

251-254 : Intervention de Châhpûhr en Arménie. Le jeune Arsacide Tiridate se réfugie en territoire romain.

253 : Châhpûhr conduit une deuxième campagne sur l’Euphrate contre les Romains, qu’il bat à Barbalissos. Les Perses peuvent alors occuper temporairement une partie de la Syrie, de la Cappadoce et de la Cilicie. Antioche tombe entre leurs mains en 253, puis Dura en 256, mais ils doivent affronter à Emèse (l’actuelle Homs, en Syrie) une vigoureuse résistance romaine.

259 ou 260 : Au cours d’une troisième campagne engagée contre les Romains en Haute Mésopotamie, Châhpûhr les écrase à Edesse où l’empereur Valérien est fait prisonnier.

261-267 : Le chef palmyrénien Odheinat reconquiert les zones frontalières perdues par Rome et reçoit de l’empereur Gallien le titre de Corrector Orientis, mais il est tué en 267, un an avant la disparition de Gallien.

268-271 : Gallien est remplacé par Claude II le Gothique, puis par Aurélien. Palmyre accroît alors sa puissance, sous l’autorité de Zénobie, la veuve d’Odheinat, et de son fils Wahballat qui s’octroient, en 270, les titres royaux.

270 : Un général au service de Zénobie, Zabdas, occupe Alexandrie et l’Egypte, ce qui entraîne la rupture entre Rome et le Royaume palmyrénien.

272-273 : Campagne d’Aurélien contre Palmyre. La ville est prise en 272, puis détruite à l’issue d’une révolte.

272 : Mort de Châhpûhr Ier.

274 : Aurélien triomphe à Rome où il fonde le temple du dieu Sol Invictus, qui reçoit la statue du Bêl palmyrénien.

272-273 : Règne d’Hormizd Ier, fils de Châhpûhr. Son frère Vahram Ier lui succède de 273 à 276.

276 : Les persécutions engagées contre le manichéisme à l’instigation du clergé mazdéen aboutissent à l’emprisonnement et au supplice de Mani en février 277.

276-293 : Règne de Vahram II. Devenu grand prêtre mazdéen, Kartir fait expulser d’Iran les propagateurs des religions étrangères.

283 : Mort de l’empereur romain Carus au cours de la campagne qui a vu la prise de Ctésiphon.

287 : A la suite d’un accord conclu entre Vahram II et l’empereur romain Dioclétien, Tiridate est installé comme roi d’Arménie, mais sous l’autorité romaine, et les Sassanides renoncent à la Mésopotamie.

293 : Vahram III ne règne que quatre mois, avec le titre de Saghanchah, « Roi des Saces ».

293-302 : Règne de Narseh, fils de Châhpûhr et grand oncle du jeune Vahram III à qui il a ravi la couronne.

296-297 : Rupture avec Rome. Narseh est finalement battu par Galère, le César de Dioclétien, et sa femme, Arsane, est faite prisonnière. Par le traité de Nisibe, le souverain sassanide est contraint de céder à Rome cinq districts de Petite Arménie.

297 : Dioclétien promulgue, à Alexandrie, un édit interdisant la propagande manichéenne dans l’Empire romain.

301-302 : Conversion de Tiridate III et du peuple arménien au christianisme, sous l’inspiration de Grégoire l’Illuminateur. La même année voit, avec l’édit de Nicomédie, le début, dans l’Empire romain, d’une vague de persécution contre les chrétiens.

303-309 : Règne de Hormizd II, fils de Narseh. Ses tentatives de reprise de la lutte contre Rome aboutissent à un échec. Il épouse une princesse kouchane pour conjurer les menaces qui se dessinent à l’est de son royaume.

309-379 : Règne de Châhpûhr II qui accède au trône alors qu’il n’est encore qu’un enfant.

309-335 : Longue période de régence, marquée par la conclusion d’une trêve avec l’Empire romain et par le début de la persécution des chrétiens dans le Royaume sassanide où la persécution des manichéens reprend, par ailleurs, de plus belle. La conversion, en 312, de l’empereur romain Constantin au christianisme et la promulgation de l’édit de Milan autorisant la pratique de la nouvelle religion encouragent les chrétiens iraniens persécutés à gagner les territoires romains.

343-350 : Nouvelle période de tensions entre Romains et Perses. Ceux-ci parviennent à reconquérir l’Arménie.

343 : Constance II envahit l’Adiabène.

346 : Echec de Châhpûhr II devant Nisibe et conclusion d’un armistice.

348 : Bataille de Singara.

350 : Nouvel échec de Châhpûhr II devant Nisibe. A partir de ce moment, les Sassanides doivent aussi compter avec la menace des Huns sur leur frontière orientale.

355-356 : Châhpûhr II intervient en Arménie et en Mésopotamie. Son frère Hormizd, qui vit réfugié auprès des Romains, accompagne Constance II dans la visite que celui-ci effectue à Rome en 357.

356 : Echec de l’ambassade de Musonianus. Châhpûhr II maintient ses prétentions sur l’Arménie et la Mésopotamie.

359 : La guerre reprend entre Perses et Romains. Châhpûhr assiège et prend la forteresse d’Amida (Dyarbékir, dans l’actuel Kurdistan turc) établie sur le cours supérieur du Tigre.

362-363 : Devenu empereur, Julien l’Apostat reprend l’offensive contre les Perses après la mort de Constance, mais il est tué en 363 en combattant sur le front de l’Euphrate, sans être parvenu à s’emparer de Ctésiphon. Jovien, son successeur, choisit de renoncer et traite avec Châhpûhr, contre la restitution des places de Nisibe et de Singara et des districts situés au-delà du Tigre.

363 : Les Sassanides soumettent les tribus arabes du Sud-Ouest et se font des alliés des Arabes Lakhmides de Hira (aujourd’hui au sud de l’Irak).

371-377 : Nouvelle campagne des Perses contre l’Arménie, partagée de fait avec Rome.

379-383 : Règne d’Ardachîr II, frère présumé de Châhpûhr II.

383-388 : Règne de Châhpûhr III, fils de Châhpûhr II.

388-399 : Règne de Vahram IV, un autre fils de Châhpûhr II.

399-421 : Règne d’Yazdgard Ier.

410 : Les chrétiens d’Iran s’organisent en Eglise autocéphale lors du concile de Seleucie et adoptent le Credo établi au concile de Nicée en 325. L’Eglise de Perse, établie au-delà des frontières orientales de l’Empire romain, apparaît, du fait de l’hostilité entre les souverains romains et sassanides, comme une rivale de la chrétienté romaine dont elle accueillera, à partir du Ve siècle, les dissidents nestoriens puis monophysites. Le christianisme ne s’installe solidement en Perse qu’avec les IIIe et IVe siècles, mais il est apparu dès le premier siècle dans l’espace iranien, dans la communauté juive du royaume d’Adiabène (au nord-est de la Mésopotamie) et dans la région d’Edesse en Oshroène. Des sièges épiscopaux auraient alors été établis à Arbèles et dans la capitale de Séleucie-Ctésiphon, mais les données relatives à ce passé très lointain demeurent très incertaines. Présents en Perse avant la « révolution » sassanide, les chrétiens y sont beaucoup plus nombreux durant le IIIe siècle, au cours duquel ils sont persécutés à l’initiative du Grand Mage mazdéen Kartir. Le transfert de nombreux prisonniers raflés dans la région d’Antioche et dans les provinces frontières de l’Empire romain explique pour une part le développement de cette communauté qui s’accroît notamment en Susiane. Les persécutions intervenues sous Bahram II ou Châhpûhr II et reprises à divers moments au cours des siècles suivants (généralement quand l’Empire était en guerre contre les Romains ou les Byzantins) sont séparées par de longues périodes de paix – dont rendent compte les sources chrétiennes – au cours desquelles les disciples du Christ affirment leur loyauté à l’égard du souverain sassanide. Cette Eglise conservera cependant sa langue et ses traditions syriaques sans s’iraniser pleinement et sans s’intégrer complètement dans la société sassanide. Le concile de Séleucie de 410 établit la hiérarchie des différents évêchés, placés sous l’autorité de l’évêque de la capitale, proclamé « grand métropolitain et chef de tous les évêques ». Il reconnaît également au roi de larges pouvoirs sur l’Eglise perse (décider de la réunion des conciles, les faire présider par des fonctionnaires séculiers, assurer aux décisions conciliaires la force de la loi).

421-439 : Règne de Vahram V, fils de Yazdgard, arrivé au pouvoir grâce au soutien militaire du prince arabe de Hira. Il se montre « tolérant » sur le plan religieux.

422 : La paix est conclue avec l’Empire romain à l’issue d’une courte guerre. Elle prévoit la garantie de leur liberté de culte aux chrétiens du Royaume sassanide.

427 : Les Huns Hephtalites pénètrent dans l’Est de l’Iran et constituent désormais une menace permanente.

439-457 : Règne d’Yazdgard II qui est très attaché au zoroastrisme.

442 : Guerre contre l’Empire romain d’Orient (que nous avons pris l’habitude, acquise bien plus tard, de désigner sous le nom d’Empire « byzantin » par référence au nom de la cité grecque qui avait précédé Constantinople) alors qu’au nord-est, le Royaume sassanide doit faire face aux tribus hunniques des Kidarites.

457-459 : Règne d’Hormizd III.

459-484 : Règne de Péroz Ier, un frère d’Hormizd révolté contre lui. Il persécute les juifs alors que les chrétiens d’Iran se divisent entre nestoriens et monophysites. Il envoie par ailleurs une ambassade en Chine.

465 : Victoire des Huns Hephtalites ou « Huns blancs » contre Péroz.

484 : Péroz meurt lors d’une campagne conduite contre les « Huns blancs » Hephtalites.

484-488 : Règne de Valash.

488-531 : Règne de Kavadh, fils de Péroz. Ce souverain met en œuvre une partie du programme révolutionnaire de la secte religieuse mazdakite, ce qui suscite l’opposition de la noblesse. Un soulèvement populaire s’est, en effet, rallié à Mazdak qui réclamait une plus juste répartition des biens. Soutenue dans un premier temps par le roi, cette insurrection aboutit ensuite, en 496, à sa destitution et à son remplacement par son frère Zamasp. Revenu au pouvoir en 499, avec le soutien des Hephtalites, Kavadh se retourne contre les insurgés et noie la révolte dans le sang avec son fils, le futur Khosro Ier.
500 : Le nestorianisme devient la seule Eglise chrétienne acceptée en Iran.
503-505 : La paix est rompue avec l’Empire romain d’Orient. Une première paix est conclue en 505, mais l’empire doit faire face vers l’est aux Huns Hephtalites.

518 : Ambassade iranienne en Chine. Deux autres suivront en 528 et 531.

527-528 : Nouvelle guerre avec l’Empire romain à propos du statut des chrétiens de Perse.

531-579 : Règne de Khosro Ier, fils de Kavadh. Il rompt l’accord établi par son père avec les mazdakites et impose de nombreuses réformes économiques et militaires qui passent par une plus grande centralisation.

532 : Première guerre de Khosro contre l’Empire romain. Elle aboutit à une « paix éternelle » conclue avec Justinien.

540-557 : Reprise de la guerre contre l’empereur Justinien à propos de l’Arménie et du contrôle du pays des Lazes, situé sur le littoral oriental de la mer Noire. En Syrie, Khosro Ier s’empare en 540 d’Antioche – qu’il détruit et dont il déporte les habitants – puis bat les troupes de l’empereur en Arménie trois ans plus tard.

558-562 : Khosro anéantit le royaume des Huns Hephtalites, avec l’appui des Turcs occidentaux.

562 : « Paix de cinquante ans » avec l’Empire romain, impliquant le paiement des tributs dûs aux Sassanides et garantissant la liberté de culte pour les chrétiens en Iran et pour les mazdéens dans l’Empire romain d’Orient.

571 : Les Sassanides s’emparent de l’Arabie du Sud et en expulsent les Ethiopiens axoumites alliés de l’Empire romain.

572-579 : La guerre reprend avec l’Empire romain au cours de laquelle Khosro subit une lourde défaite à Mélitène en 575.

578 : Nouvelle ambassade iranienne en Chine, suivie de deux autres en 605 et 616. Expédition maritime perse jusqu’à Ceylan.

579-590 : Règne d’Hormizd IV, fils de Khosro Ier. La guerre se poursuit avec l’Empire romain jusqu’en 582. En 581, l’empereur Maurice s’approche de Ctésiphon, la capitale sassanide, qui est dangereusement menacée.

588 : Les Sassanides doivent faire face à la menace turque apparue en Asie centrale.

591-628 : Règne de Khosro II qui a pu s’installer sur le trône avec le soutien de l’empereur de Constantinople à qui il cède une partie de l’Arménie contrôlée jusque-là par les Perses, ce qui porte la frontière au voisinage du lac de Van. C’est grâce à l’Empire romain que Khosro II a pu se débarrasser d’un prétendant, Vahram VI Tchobin.

602 : Après le renversement de son allié Maurice par Phocas, Khosro II reprend la lutte contre l’Empire romain.

604-609 : Les Perses enchaînent plusieurs victoires qui les conduisent d’Edesse jusqu’à Chalcédoine, à proximité de Constantinople menacée dans le même temps par les Avars.

610 : Révolution à Constantinople et couronnement d’Héraclius, qui accentue l’effort de guerre contre la Perse pour des raisons autant politiques et territoriales que religieuses, au nom de la défense des chrétiens d’Iran.

614 : Khosro II s’empare de Jérusalem puis de l’Egypte en 619, ce qui aboutit à la reconstitution territoriale de l’ancien Empire achéménide. Le souverain sassanide emporte les reliques de la Sainte Croix à Ctésiphon (l’épisode sera immortalisé par les fresques réalisées à Arezzo par Piero della Francesca).

622-626 : Héraclius conduit plusieurs campagnes victorieuses jusqu’en Médie, mais les Perses réagissent et se retrouvent en 626 à proximité de Constantinople. Héraclius reprend alors l’initiative et reconquiert tous les territoires perdus précédemment. Khosro est alors renversé et assassiné en 628 par son fils Siroy, à la faveur d’une révolte nobiliaire.

628-632 : Le Royaume perse plonge dans l’anarchie. Des usurpateurs non sassanides alternent alors au pouvoir avec des princes légitimes, mais trop faibles pour imposer une quelconque autorité. On voit ainsi se succéder Kavadh II Shéroé (628), Ardachîr III, un enfant tué au bout d’un an et demi d’un règne placé sous la tutelle d’un échanson, Khosro III, la reine Bûrân en 629-630, Hormizd V et, enfin, Khosro IV (631-632). La noblesse, dirigée par Rostam, installe alors sur le trône Yazdgard III. Une douzaine de souverains éphémères se sont succédé depuis la mort de Khosro II.

632-651 : Règne de Yazdgard III, le dernier souverain sassanide. Ce roi semble devoir réaliser une restauration de l’autorité monarchique, mais il va devoir compter avec le péril arabo-musulman. Quand la Perse sera tombée sous le contrôle de ceux-ci, la date de l’avènement de Yazdgard III sera considérée comme marquant le début d’une ère nouvelle pour les sectes zoroastriennes.

635 : Victoire musulmane sur les Sassanides à Buwayb.
juin 637 : Yazdgard III est vaincu à Qâdissiya et Ctésiphon tombe en août. Ahwaz et le Khûzistân sont occupés en 639.

642 : Les troupes sassanides sont écrasées à Djalula et à Nehavend par l’armée arabe envoyée contre la Perse par le calife Omar, le deuxième successeur du Prophète. Les Musulmans sont désormais maîtres de la Mésopotamie et de la Perse occidentale. Yazdgard III s’enfuit vers l’est de son royaume et se réfugie à Merv, l’ancienne Alexandrie de Margiane. Il est assassiné en 651. Le fils de Yazdgard, Peroz, trouve alors refuge à la cour chinoise où il mourra en 672. A ce moment, l’Iran sera devenu une partie de l’empire des califes omeyyades installés à Damas.

La Perse devient musulmane

660 : Après l’arbitrage d’Adhruh, l’Omeyyade Mo’awiya est proclamé calife et reconnu en Syrie, en Palestine, en Egypte et dans le Hedjaz alors que Ali, le gendre du Prophète, est reconnu en Irak et en Iran.

661 : Assassinat d’Ali à Kufa par un kharidjite (ceux qui s’étaient opposés à Ali et à sa volonté de trouver un compromis avec les Omeyyades après la bataille indécise de Siffin, livrée en 657). La communauté musulmane est, dès lors, divisée entre sunnites, acquis à Mo’awiya, chi’ites, partisans d’Ali et de ses descendants, et kharidjites, qui ne reconnaissent aucun des deux autres camps. Dans un premier temps, Hassan et Hussein, les héritiers d’Ali, acceptent de reconnaître Mo’awiya, qui évite de s’affirmer comme autorité religieuse et gouverne en chef tribal, s’appuyant sur l’armée de Syrie, mais, dès 671, des fidèles d’Ali sont exécutés et le gendre du Prophète, assassiné dix ans plus tôt, fait l’objet d’une malédiction publique. En 678, Mo’awiya exige que son fils aîné, Yazid, soit désigné comme son successeur, ce qui rallume la lutte entre les Omeyyades et les chi’ites conduits par Hussein.
665 : Ziyad ben Abou Sufyan est nommé gouverneur de Bassorah et des provinces iraniennes. Peuplement du Khorassan, dans l’Est iranien, par cinquante mille familles arabes.

10 octobre 680 : Hussein est tué à Kerbala. Son martyre est commémoré par les chi’ites le jour de l’Achoura.

Début du VIIIe siècle : Développement, au sein des communautés musulmanes, spécialement chez les chi’ites, d’une eschatologie développant les idées « d’occultation » (ghayba) et de « retour » (radj’a) du « Mahdi ».

706-715 : Conquête de la Transoxiane à partir de l’oasis de Merv, par Qutayba ben Muslim. Samarcande et le Khwarezm sont conquis en 712, le Ferghana en 714.

710 : L’expansion arabo-musulmane atteint, à l’est, le delta de l’Indus.

716 : Fondation du mouvement abbasside (da’wa) en faveur des descendants de la famille du Prophète.

716 : Emigration des Parsis (zoroastriens) de Perse vers le Gudjurat, au nord de l’Inde.

733 : La limitation fixée du nombre de soldats pensionnés par le califat favorise la révolte des Arabes du Khorassan.

736 : Implantation de la da’wa, au Khorassan, dans l’est du plateau iranien. Les chi’ites sont alors très proches des Abbassides qu’ils vont soutenir dans leur lutte contre le Califat omeyyade.

745 : Abou Muslim devient chef militaire de la dissidence constituée au Khorassan.

747 : Arrestation de l’imâm Ibrahim au nom duquel se développe la da’wa. Il meurt dans les prisons omeyyades. Le 9 juin, la révolte se déclenche au Khorassan au nom de « l’imâm attendu ».

749 : Prise de Kufa et proclamation d’Abdul Abbas comme calife.

750 : Bataille du Grand Zab. Défaite et mort de l’Omeyyade Marwan II. Massacre de la lignée omeyyade.

751 : Les musulmans sont victorieux des Chinois lors de la bataille de Talas, au cœur de l’Asie centrale.

755 : Exécution d’Abou Muslim. L’alliance entre Abbassides et chi’ites est, de fait, rompue. Le pardon est accordé aux anciens partisans des Omeyyades et un régime de type marwanide est rétabli. Une révolte éclate alors au Khorassan au nom d’Abou Muslim considéré comme « occulté ».

762 : Fondation de Bagdad. Le nouveau centre de gravité du monde musulman va voir se reconstituer, au profit de la dynastie abbasside, l’appareil d’Etat sassanide, notamment sur le plan fiscal. Les musulmans l’ont emporté, mais cela n’exclut pas la permanence d’une identité proprement iranienne et le maintien d’un sentiment « national » qui est aussi un sentiment de supériorité par rapport aux « mangeurs de lézards » arabes. Une réalité que résume la réponse attribuée à un noble persan, une fois la conquête arabo-musulmane réalisée : « … Si vous cherchez le gouverneur qui a richesses, serviteurs, suite, majesté, gloire et belle vie, c’est l’Arabe Duwaï, dans la ville d’Amol. Mais si vous cherchez celui qui, jour et nuit, est avec ses faucons, ses guépards et ses chiens, alors c’est moi… ».
On constate cependant le développement d’un rapide processus d’iranisation des conquérants sémites venus de l’ouest. C’est en Iran – celui du Nord-Est, du Khorassan – que les Abbassides ont recruté une bonne partie de leurs forces et c’est également de là que viendra leur personnel administratif ; c’est là enfin que fleuriront certaines des plus belles réussites de la civilisation musulmane. C’est donc tout naturellement que les anciennes élites persanes font le choix de s’intégrer à la civilisation nouvelle en voie de formation, tout en conservant leur identité particulière. La proximité de Bagdad, la nouvelle capitale perçue comme l’héritière de Ctésiphon, facilite évidemment la fusion qui s’opère alors. Ce sont les Tahirides du Khorassan – qui ont transféré leur capitale de Merv à Nishapur – qui commandent ainsi les troupes du calife abbasside de Bagdad. Il est également significatif que les émirs qui s’imposent localement dans le Séistan et à Boukhara avec les dynasties saffaride et samanide se fabriquent une généalogie... sassanide pour justifier leur pouvoir. Bientôt, les émirs bouyides qui se sont imposés au calife de Bagdad prendront le titre de « roi des rois » qui renouait, lui aussi, avec le passé sassanide.

786-809 : Califat d’Haroun al-Rachid à Bagdad.
Début du IXe siècle : Essor du mouvement littéraire dit « chu’ûbiyya » chez les lettrés d’origine iranienne.

809-813 : Ma’mûn, gouverneur du Khorassan, se révolte.

839-840 : Révolte du prince iranien Mazyar.

844 : L’autorité du calife abbasside n’est plus reconnue que pour la forme en Iran où gouvernent les Tahirides qui s’étaient vus confier la région par le pouvoir califal à partir de 820.

836 : Fondation de la nouvelle capitale abbasside de Samarra.

864 : Constitution d’un premier émirat chi’ite sur la côte de la mer Caspienne
.
873 : Yakub al-Saffar met fin au gouvernement des Tahirides et conquiert Nîchâpûr. L’Iran confié à son frère Amr à partir de 876, passe sous l’autorité des Saffarides, placés à la tête d’un émirat dissident affirmant l’identité persane, mais le calife al Mu’tadid vient à bout des Saffarides en 892.

873 : La disparition du douzième imâm chi’ite marque le début de la « petite occultation ». Dès 765, lors de la mort de l’imâm Dja’far al-Sadiq, la dissidence chi’ite avait vu naître sa division entre ismaélisme, zaydisme et imâmisme. Les chi’ites sont donc désormais séparés entre « septimains » (ismaéliens) fidèles à la mémoire du septième imâm et « duodécimains » attendant le retour du douzième.

Vers 885 : Les Samanides commencent à affirmer leur autonomie à Nîchâpûr.
892 : Retour des Abbassides à Bagdad qui connaît alors son apogée.
Le Xe siècle voit la crise de l’Etat abbasside. Durant la seconde moitié du siècle, celui-ci tombe sous l’influence des Bouyides, qui détiennent la réalité du pouvoir.

904-954 : Apogée de Nîchâpûr, la capitale des Samanides.
Première moitié du Xe siècle : Apogée de la langue néo-persane, qui comprend une forte composante lexicographique arabe et soumet la poésie à la prosodie arabe.

930-935 : Révolte iranienne de Mardâwidj. Rétablissement du trône d’or et du titre de « châhanchâh ».

940 : Le quatrième représentant de l’imâm caché des chi’ites duodécimains meurt sans désigner de successeur. C’est le début de la « Grande Occultation ».

963 : Etablissement par les Bouyides des fêtes chi’ites de l’Achoura. Ils favorisent ensuite régulièrement les chi’ites.
Fin du Xe siècle : Réveil de la poésie persane, notamment avec Daqîqî, à la cour des Samanides.

977-997 : Sabüktekin gouverne Ghazni (en Afghanistan) au nom des Samanides et lance de fréquentes razzias contre l’Inde. L’Histoire de la dynastie ghaznévide s’étend de 962 à 1186.

980 : Restauration par le Bouyide Adud al-Dawla des formes sassanides du pouvoir, avec le titre de châhanchâh, le diadème traditionnel, le recours aux inscriptions pehlvies. De fait, la royauté prend des allures persanes alors que la dimension prophétique et religieuse demeure le fait du calife.

980-1037 : Abou Ali Husayn ibn Sina (Avicenne), médecin au Khorassan, rédige une grande encyclopédie médicale, le Qânûn.

992 : Occupation de Boukhara par des émirs turcs islamisés. Les Qarakhanides remplacent les Samanides en Asie centrale.
Tout au long du Xe siècle, les Samanides ont entretenu des relations commerciales continues avec la Chine et l’Inde, mais aussi avec les Scandinaves qui leur fournissaient fourrures et esclaves, ce dont témoigne l’abondance des dirhams samanides retrouvés dans les trésors monétaires découverts sur le cours supérieur de la Volga et sur les côtes baltiques.

999 : Le calife de Bagdad reconnaît les conquêtes de Mahmûd de Ghazni, puis son indépendance. Mahmûd fait construire une superbe capitale et multiplie les raids contre l’Inde du Nord, régulièrement mise au pillage.

1004 : Firdousi dédie à Mahmûd de Ghazni la grande épopée néo-persane du Châh-nâmeh.
Début du XIe siècle : Mise en place en Irak et en Iran des grands centres de pèlerinage correspondant aux tombeaux des imâms chi’ites (à Karbala, Meshed ou Qom…).

1034 : Pénétration en Iran des Turcs Oghuz, commandés par Seldjouk, qui avaient franchi l’Oxus (l’Amou Daria) dès 1025.

1040 : Bataille de Dandâniqân. Les Seldjoukides rejettent les Ghaznévides, qui perdent le Khorassan, hors d’Iran.

1050 : Le chef seldjoukide Tughril beg reçoit du calife abbasside les titres de « pilier de la foi » et de sultan. Il entre en vainqueur à Bagdad en 1055, élimine les Bouyides et épouse la fille du calife en 1062. C’est le début du sultanat seldjoukide associé au califat.
Les Seljoukides Alp Arslan puis Malik Châh s’imposent au Proche-Orient en tenant tête victorieusement aux Fatimides chi’ites d’Egypte et en battant les Byzantins à Mantzikert, en 1071.

1060 : Mort du grand poète persan Nâsir-i Khusraw, figure de l’ismaélisme septimain et auteur du Safar-nâme, un récit de son voyage à la Mecque.

1078 : Fondation du sultanat seldjoukide de Rûm (en Asie Mineure, dont le nom rappelle que ces territoires faisaient naguère partie de l’Empire « romain »).

1088 : Construction de la Grande Mosquée d’Ispahan, sous le règne de Malik Chah.

1090 : Début de la révolte de Hasan al-Sabbah qui s’empare de la forteresse d’Alamut au nord de l’Iran. Dès 1092, le grand vizir Nizam al-Mulk est tué par ses « assassins ». Ceux-ci appartiennent à la secte chi’ite des Nizarites et vont semer la terreur dans l’Orient musulman – mais ils n’épargneront pas les royaumes des croisés – au cours des XIIe et XIIIe siècles, jusqu’à ce que leur repaire soit détruit par les Mongols. Selon une étymologie admise au XIXe siècle mais aujourd’hui discutée leur nom viendrait de « haschichin » et aurait signifié qu’ils perpétraient leurs attentats sous l’effet de la drogue.

1098-1099 : Irruption des croisés occidentaux en Orient. Ils prennent Edesse, Antioche puis Jérusalem où Baudouin est sacré roi en 1100.

1126 : Mort d’Umar al Khayyam de Nîchâpûr, disciple d’Avicenne, mathématicien, réformateur du calendrier persan et poète, auteur de célèbres « Quatrains » (Nawruz-nâme).

1153 : Sandjar, sultan seldjoukide de Perse, est vaincu par les Ouïghours, qui pillent le Khorassan.

1171 : Saladin, fondateur de la dynastie kurde des Ayyubides, abolit le califat fatimide d’Egypte.

1187 : Saladin bat les croisés à Hattîn puis s’empare de Jérusalem, ce qui entraîne la formation de la troisième croisade.

1190 : Les Ghurides afghans s’emparent du Khorassan.

1190 : Mort de al Anwari, astrologue et poète de la cour de Sandjar, originaire du Khorassan.

1193 : Le Khwarezmien Ala al-Dîn s’empare à son tour du Khorassan et chasse, l’année suivante, les Seldjoukides de Perse. La fin du XIIe et le début du XIIIe siècle voient le déferlement des Turcs du Khwarezm sur le plateau iranien.

1203 : Mort de Nizâmî, poète persan né en 1140 et auteur de cinq grands poèmes épiques.

1206 : Le Mongol Temudjin prend le titre de Gengis Khan. Il soumet le Turkestan en 1208.

1220 : Les Mongols prennent Balkh et Nîchâpûr, puis Kaboul l’année suivante.

1235-1239 : Les Mongols achèvent la conquête de l’Iran.

1242-1258 : Règne d’al Musta’sim, le dernier calife abbasside de Bagdad.

1243 : Les Seljoukides de Rûm, qui ont connu l’apogée de leur puissance au début du XIIIe siècle, sont écrasés par les Mongols à Köse Dagh et sont de nouveau vaincus en 1256 à Aksaray.

1244 : Arrivée à Konya, en Anatolie, du mystique persan Chams al-Dîn Tabrîzî. Il exercera une forte influence sur Djalâl al-Dîn Rûmi, qui sera à l’origine de l’ordre des derviches mevlevis.

1256 : Hulagu fonde la dynastie mongole de Perse et prend la forteresse d’Alamut aux assassins.

1257 : Le poète persan Sa’di, de Chiraz, écrit le Bustân (« Le Jardin »), suivi du Gulistân (« La Roseraie ») l’année suivante.

1258 : Prise et destruction de Bagdad par les Mongols.

1260 : Victoire des mamelouks sur les Mongols à Ayn Djalut.

1277 : Les mamelouks d’Egypte commandés par Baybars battent les Mongols à Elbistan.

1291 : Echange de lettres entre l’il-khan Arghoun et Philippe le Bel à propos d’un projet d’offensive commune contre les Mamelouks égyptiens.

1294 : Marco Polo traverse la Perse au retour de son voyage en Chine.

1295 : Ghazan khan, fils d’Arghoun, devient il-khan et installe sa capitale à Tabriz. Converti à l’islam, il organise son gouvernement sur des bases islamiques. Il bat en 1299 les Mameluks d’Egypte à Hims.

1304 : Un autre fils d’Arghoun, devenu il-khan de Perse, Uldjaytu Khudâbanda, tente d’officialiser le chi’isme duodécimain.

1313 : Inauguration de Sultâniyeh, nouvelle capitale des Mongols de Perse.

1317-1335 : Règne d’Abou Saïd, premier souverain ilkhanide à porter un nom musulman.

1324 : Installation d’un résident vénitien à Tabriz.

1362 : Prise d’Andrinople par les Ottomans.

1365 : Début des conquêtes de Tamerlan. Il s’empare du Khorassan en 1369, puis du Khwarezm en 1378.

1380 : Tamerlan occupe Hérat, puis atteint les rivages de la mer Caspienne en 1383.

1386-1387 : Le conquérant turco-mongol s’empare d’Ispahan, de Chiraz et de Bagdad, puis occupe le Fars, le Louristan et l’Azerbaïdjan.

1390 : Mort du poète et panégyriste persan Hafiz.

1400-1401 : Tamerlan met à sac Alep, Hama et Damas.

1402 : Le sultan ottoman Bayezid Ier est vaincu et fait prisonnier par Tamerlan à Angora (l’ancienne Ancyre, l’actuelle Ankara).

1404 : Tamerlan est de retour à Samarcande où il reçoit le voyageur espagnol Ruy Gonzalez de Clavijo.

1405 : Mort de Tamerlan. La tribu turcomane des Qaraqoyunlu (Moutons noirs) prend l’Azerbaïdjan aux Timourides.
Au début du XVe siècle, la ville d’Ardabil, en Azerbaïdjan, voit l’essor d’un ordre mystique sunnite qui, fondé par le cheikh Safi al-Dîn, prendra le nom de Safâwî. La secte rencontre un grand succès auprès des tribus turcomanes puis s’oriente vers le chi’isme ; son chef est considéré comme une incarnation de Dieu, dans la mesure où l’on voit en lui un descendant des imâms husseinites issus d’Ali, le gendre du Prophète. C’est en affirmant cette identité religieuse particulière que les tribus turcomanes regroupées sous le nom de Kizilbach (Têtes rouges) vont entamer une lutte qui les conduira, au XVIe siècle, à la tête de la Perse.

1449 : Mort d’Ulugh Beg, petit-fils de Tamerlan. Fin de l’Empire timouride.

1453 : Prise de Constantinople par le sultan ottoman Mehmed II.
Milieu du XVe siècle : Construction de la Mosquée bleue de Tabriz.
Troisième quart du XVe siècle : Apogée de la dynastie turcomane des Aqqoyunlu (Moutons Blancs) qui règne sur une partie de la Perse.

1478 : Révolte de Chah Ismaïl Safawi contre les Aqqoyunlu.

1499 : Fondation de la dynastie safavide par Chah Ismaïl, guide spirituel et chef temporel des Qizil-bach (les Têtes rouges, ainsi désignées en raison de la couleur de leur turban caractéristique).

1501 : Chah Ismaïl entre à Tabriz et en fait sa capitale où il est intronisé comme premier chah de la dynastie safavide. Il y proclame le chi’isme duodécimain comme religion d’Etat. Ce choix peut surprendre quand on sait que la nouvelle dynastie était issue des confréries soufies turques d’Asie centrale et appartenait donc au monde sunnite. Les hypothèses avancées pour interpréter cet épisode sont multiples. Certains y ont vu la volonté d’établir un contrepoids religieux au sunnisme qui dominait alors le monde islamique et dont les Ottomans, en pleine ascension, se faisaient les hérauts. D’autres ont supposé que les nouveaux dirigeants ont voulu, grâce au chi’isme, unifier religieusement l’empire qu’ils venaient de se constituer pour renforcer sa cohésion et contribuer ainsi à son unité. La Perse, où les chi’ites étaient depuis longtemps nombreux, n’était pas moins encore en grande partie sunnite et la conversion des populations fut souvent forcée, les Safavides n’hésitant pas à faire appel à des « missionnaires » extérieurs venus des vieilles terres chi’ites d’Irak ou de Bahrein. Ces efforts ne purent empêcher le maintien, à la périphérie de l’empire, de minorités sunnites turkmène, kurde, baloutche ou arabe. Même si la conversion au chi’isme ne fut pas totale, l’adhésion ou la conversion plus ou moins forcée de la majorité de la population amorcèrent un processus d’identification entre le chi’isme et l’iranité qui s’était affirmée sous des formes diverses depuis deux millénaires. Comme le signale le géopoliticien François Thual, ce n’est qu’assez récemment que l’assimilation entre Iran et chi’isme est devenue effective, ce dont témoigne la relative fragilité du chi’isme au XVIIIe siècle, quad Nadir Shah tentera sans succès de rétablir le sunnisme. Il se heurtera en effet à la résistance d’un clergé déjà très bien organisé. Ce n’est ainsi que sous la dynastie des Qadjar que la fusion entre iranité et chi’isme duodécimain sera complète.

L’Empire safavide et la splendeur d’Ispahan

1503 : Défaite de l’Akkonyulu Murad face au Safavide Ismaïl, désormais maître de l’Iran central et méridional.

1508 : Chah Ismaïl prend Bagdad et occupe le Fars. Vainqueur des Ouzbeks en 1510, il annexe le Khorassan et règne désormais sur l’ensemble de la Perse.

1510 : Chah Ismaïl prend Hérat et introduit le chi’isme dans l’ouest de l’Afghanistan.

1512 : Les Ouzbeks prennent leur revanche à Meshed, et Chah Ismaïl doit conclure une trève.

1514 : Les Ottomans du sultan Sélim Ier battent les Persans de Chah Ismaïl à Tchaldiran et les écartent ainsi de Mésopotamie. Les vainqueurs occupent Tabriz, puis le Kurdistan. La Perse chi’ite est désormais prise en étau entre la menace ottomane à l’ouest et la menace ouzbèke à l’est, c’est-à-dire entre deux puissances sunnites.

1517 : Après avoir vaincu les Mameluks, le sultan ottoman Sélim Ier entre en vainqueur au Caire.

1524 : Mort de Chah Ismaïl. Son fils Tahmasp lui succède, mais n’est âgé que de dix ans et n’exerce réellement le pouvoir qu’à partir de 1533. Cette décennie est marquée par les luttes qui opposent les différents clans Kizilbach (« Têtes rouges »).

1526 : Babûr fonde l’Empire moghol, qui comprend Kaboul et l’Est afghan, alors que Hérat et le Séistan sont occupés par les Persans qui se disputent Kandahar avec les Moghols, les Ouzbeks occupant, pour leur part, le Nord de l’Afghanistan, au-delà de la barrière de l’Hindou Kouch.

1534 : Conquête de l’Irak et prise de Bagdad par les Ottomans. Thamasp transfère sa capitale de Tabriz à Ghazvin et mate les rébellions organisées par ses frères.

1548-1549 : Campagne ottomane contre l’Iran. Occupation de l’Azerbaïdjan et prise de Van.

1555 : Signature de la paix d’Amasya entre Ottomans et Séfévides. Elle va durer près d’un quart de siècle.

1558 : Tahmasp s’empare de Kandahar, qui restera persane pendant une quarantaine d’années, puis sera disputée aux Moghols jusqu’en 1637, qui verra le Grand Moghol Chah Djahan la reprendre avant que le Séfévide Abbas II ne s’en empare de nouveau en 1648.
Milieu du XVIe siècle : Renaissance des arts iraniens (peinture, enluminure, céramique, textiles, tapis). La culture persane va influencer dans une large mesure, au cours des décennies suivantes, la civilisation de l’Inde moghole.

1576 : Mort de Thamasp.

1578-1588 : Règne de Muhammad Chah.

1578 : Expédition ottomane contre l’Iran. Prise de Tiflis.

1585 : Annexion de l’Azerbaïdjan par les Ottomans qui occupent Tabriz.

1587 : Mort de Muhtacham de Kachan, le plus grand poète séfévide, auteur d’ouvrages célébrant Ali et les martyrs du chi’isme.

1588-1629 : Règne de Chah Abbas Ier. Ce long règne correspond à l’apogée de la dynastie safavide, qui bénéficie toujours des ressources que procure à la Perse le grand commerce caravanier reliant l’Inde et la Chine à l’Orient arabe et turc.

1589 : Création d’une armée permanente. De nombreuses terres deviennent biens de la Couronne.

1590 : Nouvelle paix entre l’Empire ottoman et la Perse, favorable aux Turcs.

1598 : Victoire persane sur les Ouzbeks, reprise de Hérat. La capitale persane est transférée de Ghazvin à Ispahan où un grand programme de travaux publics est mis en œuvre.

1603 : Reprise de la lutte entre Perses et Ottomans. Les Persans s’emparent de Tabriz. La même année commence la construction du masdjid-i Chaykh Lutfallah d’Ispahan.

1607 : Arrivée à Ispahan des ambassadeurs espagnol, portugais et anglais. Des couvents sont fondés par des ordres religieux européens.

1612 : Nouvelle paix turco-persane, suivie, de 1615 à 1618, par une nouvelle guerre au cours de laquelle Erevan résiste aux Ottomans.

1612 : Début de la construction de la mosquée royale d’Ispahan.

1620 : Construction du Grand Bazar d’Ispahan.

1624 : Les Persans prennent Bagdad et occupent l’Irak, qu’ils reperdent en 1638.

1629-1642 : Règne de Safi Ier.

1639 : Paix de Qasr e Chirin entre Turcs et Persans. L’Irak et Tabriz restent au sultan ottoman, Erevan et une partie du Caucase reviennent aux Iraniens.

1642-1666 : Règne de Chah Abbas II.

1666-1694 : Règne de Chah Suleyman. La corruption affecte l’Etat, et le gouvernement est dominé par les intrigues de harem, alors que l’armée s’affaiblit.

1694-1722 : Règne de Sultan Husayn.

1706 : Construction, à Ispahan, de la madrasa Mader-i Chah et du caravansérail voisin.

1709 : Les Afghans Ghalzay prennent Kandahar que tenaient les Séfévides depuis 1648, alors que les Afghans Abdâli ravagent le Khorassan.

1716 : Les Afghans Abdâli prennent Hérat et sa région qui sont séparés de la Perse.

1719 : L’Afghan Ghalzay Mahmûd occupe le Kirman.

1722-1729 : Ispahan est occupée par les Afghans.

1723 : Chah Tahmasp II se proclame souverain à Ghazvin.

1723-1727 : Nouvelle guerre entre Turcs et Persans, à l’initiative des premiers. La paix de Hamadan marque la victoire des Ottomans sanctionnée, pour les Iraniens, par la perte de territoires en Iran occidental et dans le Caucase méridional. Le souverain afghan Achraf doit reconnaître la domination ottomane sur l’Ouest et le Nord de l’Iran.

1729 : Le chef afchâr Nadir Khan chasse les Afghans d’Ispahan et y rétablit la monarchie séfévide avec Tahmasp II.

1731-1737 : Nouvelle guerre turco-persane, à l’issue de laquelle le fleuve Araxe marque désormais la frontière entre les deux Etats dans le Sud du Caucase.

1732 : Déposition de Tahmasp II. Accession au pouvoir d’Abbas II, dont Nadir Khan est le régent.

1733 : Victoire persane sur les Ottomans.

1736 : Déposition de Abbas II. Nadir Khan monte sur le trône et prend le nom de Nadir Chah. C’est la fondation de la dynastie Afchâr. Nadir Chah va régner de 1736 à 1747. La restauration de la puissance et du prestige iraniens qui accompagne l’avènement de cette nouvelle dynastie vont de pair avec une pression fiscale très lourde, un appauvrissement du pays et la décadence de l’administration.

1738 : Les Persans prennent Kandahar, Ghazni et Peshawar.

1739 : Transfert de la capitale persane d’Ispahan à Machhad. Nadir Chah bat la même année l’armée moghole, entre à Delhi et annexe tous les territoires situés à l’ouest de l’Indus. Il envahit ensuite le Turkestan et le Khwarezm, mais échoue dans la campagne engagée en 1741 au Daghestan.

1746 : Nouvelle paix entre Turcs et Persans, marquée par le retour aux frontières de 1639.

1747 : Nadir Chah est assassiné par des officiers, ce qui ouvre une période d’anarchie et de guerre civile. Les Zand s’affirment dans le Sud du pays. Les Afghans Abdâli proclament alors Ahmed Durrani souverain d’Afghanistan. Il choisit Kandahar pour capitale et étend son autorité sur Ghazni, Kaboul et Peshawar.
Deuxième quart du XVIIIe siècle : Une nouvelle école poétique, caractérisée par le retour aux formes littéraires traditionnelles, s’affirme à Ispahan avec Muchtâk et à Chiraz avec Chu’la, morts respectivement en 1757 et 1747. 1766 voit la disparition de Ali Hazîn, auteur du Tadkhirat al-Ahwâl, qui est une description de l’Iran au cours des premières décennies du XVIIIe siècle.

La Perse affaiblie et menacée sous les Qadjar

Le temps des Qadjar apparaît aujourd’hui comme une période marquée, pour la Perse, par une succession d’échecs et d’humiliations. Objet, sous Napoléon, des rivalités franco-anglaises, elle devient l’un des enjeux majeurs du « Great Game » anglo-russe tout au long du XIXe siècle. La perte d’Hérat et celle des territoires arméniens et azéris passés aux Russes correspondent à un affaiblissement incontestable, mais, si l’on compare la situation de la Perse à celle de l’Empire ottoman voisin, on constate que les souverains Qadjar sont parvenus à maintenir, pour l’essentiel, l’intégrité territoriale du pays et que la révolution constitutionnaliste de 1906 précède de deux ans celle des « Jeunes Turcs ».

12 mars 1786 : Aga Muhammad Khan, chef de la tribu Qadjar, s’empare du pouvoir, installe sa capitale à Téhéran, fonde, en 1794, la dynastie Qadjar et dote l’Etat d’une administration centralisée. Les Persans envahissent la Géorgie et mettent à sac Tiflis.

1797 : Le souverain qadjar Aga Mohammad Khan est assassiné. Son neveu, Fath Ali Châh lui succède pour régner jusqu’en 1834. La Perse va bientôt se trouver sous la pression des grandes puissances, notamment l’Angleterre et la Russie, engagées toutes deux dans le « grand jeu » eurasien.

1800 : Annexion de la Géorgie par la Russie.

1801 : Pillage de Kerbala – lieu saint chi’ite situé en Mésopotamie où Hussein, deuxième fils d’Ali, subit le martyre – par les Arabes wahhabites d’Abd el Aziz ibn Saoud Ier. Pour les wahhabites, adeptes de l’école juridico-théologique hanbalite, qui s’inscrivent dans la tradition d’Ibn Taimiyya puis d’Abdul Wahhab, les chi’ites sont considérés comme de dangereux hérétiques et les relations entre les fidèles de l’Imam caché et les tenants de la version la plus radicale et la plus fondamentaliste du sunnisme seront toujours marquées du sceau de l’hostilité la plus totale.

1804 : Premières campagnes du Caucase. Abbas Mirza est assiégé dans Erevan mais les Russes doivent renoncer.

1805 : La lutte reprend dans le Caucase entre Persans et Russes. Ceux-ci débarquent à Anzali mais sont contenus. Les Qadjar conservent leurs possessions caucasiennes mais de nombreux princes locaux acceptent la protection russe.

4 mai 1807 : Traité franco-persan de Finkenstein (un château polonais où réside alors Napoléon engagé dans la campagne contre la Russie) conclu entre Napoléon et l’envoyé persan Mohammad Mirza Reza. Cet accord s’inscrit dans les vastes projets auxquels songe Napoléon pour priver l’Angleterre de l’Inde et pour bâtir une alliance regroupant la France, le sultan ottoman et le shah de Perse. Fath Ali Shah avait déjà reçu, en 1805-1806, deux envoyés français, Romieu et Jaubert dont l’action avait permis de préparer la signature du traité de Finkenstein. Une fois celui-ci conclu, l’Empereur envoie en Perse le général de Gardane dont le grand-père y avait déjà été envoyé par Louis XIV comme ministre plénipotentiaire et ambassadeur mais la situation évolue très vite puisque, après Friedland et Tilsitt, Napoléon, vainqueur, devient, de fait, l’allié du tsar Alexandre. Gardane est dès lors chargé d’encourager le souverain persan à faire la paix avec la Russie. Fath ali Shah décide alors de se rapprocher de l’Angleterre et les tentatives de pourparlers engagées à Paris entre l’ambassadeur de Perse Askar Khan et son homologue russe, le comte Tolstoï, ne débouchent sur rien, les Russes se refusant à la moindre concession à propos de la Géorgie qu’ils viennent de conquérir. En 1809, Gardane préfère rentrer en France. Sa mission a été un échec, mais a permis d’obtenir sur la Perse de nombreuses informations utiles. Son étendue et, surtout, l’absence d’un réseau routier utilisable en vue du déplacement d’un corps expéditionnaire de type européen ont convaincu Napoléon qu’il ne fallait pas chercher là le chemin permettant d’atteindre l’Inde pour y détruire la puissance anglaise.

1811 : Guerre entre Perse et Russie qui se conclut, en octobre 1813, par le traité de Golestan, qui voit la Perse perdre ses provinces du Caucase.

1812 : Traité de Téhéran entre le gouvernement persan et le représentant britannique, sir Gore Pouseley.

1826 : Nouvelle guerre russo-persane qui se conclut, en février 1828, par le traité de Tourkmantchaï. La Perse perd l’Arménie, la frontière des deux empires est fixée sur l’Araxe. Les Russes bénéficient en Iran de « capitulations » avantageuses sur le plan commercial.

1828-1829 : Affaire Griboiedov. Ministre plénipotentiaire à Téhéran, Alexandre Griboiedov a été l’un des négociateurs russes du traité de Tourkmantchaï. Il devait veiller au paiement des réparations dues par la Perse et au rapatriement des prisonniers. Il entend compter au nombre de ceux-ci les captives arméniennes et géorgiennes enlevées par les Persans et gardées dans les gynécées princiers de Téhéran. Il veut imposer de manière maladroite et arrogante la mise en œuvre de ce dernier point, ce qui déclenche une émeute, la foule persane refusant que l’on rende aux Russes des femmes nées chrétiennes, mais devenues musulmanes et mères d’enfants musulmans. La légation russe est mise à sac et Griboeidov est tué, ainsi que plusieurs de ses collaborateurs. Les Persans doivent réparer cet affront en envoyant à Saint-Pétersbourg une ambassade chargée de somptueux cadeaux. Grand spécialiste de l’Histoire iranienne, Yann Richard remarque que « cette violation des garanties accordées aux ambassades anticipe curieusement la prise de l’ambassade américaine en 1979. L’irruption du droit musulman, qui allait à l’encontre des conventions internationales, mettait la Perse dans la position où le pays se retrouvera en 1989 lors du lancement de la fatwa contre Salman Rushdie ».

1833 : Siège de Hérat.

1833 : Mort du prince héritier Abbas Mirza, qui avait introduit dans l’armée des réformes inspirées de l’exemple ottoman.

1834-1848 : Règne de Mohammad Chah.

1834 : Mohammad Chah tente vainement de récupérer les territoires conquis par les Afghans avec l’aide des Anglais, mais les Persans ne peuvent reprendre Hérat en 1837-1838.

1844 : Prédication du bâb, qui prend la forme d’une révolte politico-religieuse. Ses partisans, qui se séparent de l’islam chi’ite officiel et veulent une plus grande justice sociale, sont victimes, à partir de 1848, d’une vigoureuse répression, et le bâb lui-même est exécuté à Tabriz, le 9 juillet 1850. Ce mouvement, régulièrement persécuté, donnera naissance à celui des ba’hais, toujours suspects, dans l’Iran d’aujourd’hui, de sympathies pro-occidentales.

1848-1896 : Règne de Naseroddin Chah.

1848-1851 : Le premier ministre Amir Kébir entame la mise en œuvre d’une politique de réformes.

1852 : Attentat manqué des bâbis contre le chah.

1852 : Les Persans parviennent à reprendre Hérat, mais, en 1856, lors de la conclusion du traité de Paris, l’indépendance de l’Afghanistan, qui récupère Hérat, est reconnue.

1855 : Première mission du comte de Gobineau en Perse.

1862 : Première concession d’une ligne de télégraphe aux Anglais.

1869-1872 : La Perse connaît plusieurs années de sécheresse et de famine.

1871-1873 : Gouvernement du grand vizir Mirza Hosein Khan Sepâhsalar, renversé à la suite d’une intrigue montée par Anisa od Dowla, la favorite du chah.

1872 : L’octroi au baron Julius von Reuter d’une concession en vue de l’exploitation des ressources du sous-sol iranien, de la création d’une banque et de l’installation d’un réseau télégraphique et de voies ferrées suscite le mécontentement de la Russie, et le gouvernement persan annulera la concession en 1899.

1879 : Création d’une Brigade cosaque chargée d’assurer la sécurité du chah.

1883-1885 : Mirza Yusof Ashtiyani exerce les fonctions de grand vizir. Mirza Ali Asqar Khan Amin o Soltan lui succède de 1885 à 1897.

1889 : Les Britanniques créent la Banque impériale de Perse, et les Russes la Banque des Prêts.

1890 : Le monopole des tabacs est accordé à une compagnie britannique, mais cette mesure est annulée l’année suivante sous la pression de l’opinion publique, hostile à tout abandon de souveraineté, les Persans allant jusqu’à boycotter l’achat du tabac pour manifester leur opposition. Les dernières années du XIXe siècle voient en effet se développer un mouvement constitutionnel et nationaliste qui conteste l’autorité de la dynastie Qadjar, jugée incapable de résister aux pressions étrangères.

1894 : La France obtient le monopole des fouilles archéologiques en Perse. C’est ainsi que Jacques de Morgan dirigera les fouilles de Suse de 1897 à 1912.

1er mai 1896 : Assassinat de Naseroddin Shah par un proche de Jamaloddin Asadabadi « al Afghani », un opposant nationaliste panislamiste expulsé du pays en 1890.

1896-1907 : Règne de Mozaffar od-Din Chah. Mirza Ali Asqar Khan Amin os-Soltan demeure premier ministre jusqu’en 1903.

28 mai 1901 : La concession naguère attribuée au baron Reuter est donnée à William Knox d’Arcy.

1905 : Développement d’un mouvement révolutionnaire revendiquant l’établissement d’un système judiciaire et d’un régime constitutionnel.

9 août 1906 : Publication d’un décret royal concédant le principe d’une constitution.

7 octobre 1906 : Réunion d’une première Assemblée nationale (« Majlis »). Le chah Mozaffar al din, confronté à une situation, insurrectionnelle, a dû se résoudre à convoquer une assemblée de notables qui a exigé et obtenu la réunion d’un Parlement qui adopte une constitution le 30 décembre suivant.

8 janvier 1907 : Mort de Mozaffar al-Din Shah. Mohammad Ali Shah lui succède.

12 janvier 1907 : Installation du Parlement à Téhéran dans le palais de Baharistan.

Mai 1907 : Amin os-Soltan retrouve son poste de premier ministre, mais il sera assassiné après la conclusion de la convention anglo-russe du 31 août.
1907 : Mohammad Châh cherche à s’opposer à la constitution et à la mise en œuvre des lois votées par le Majlis. Au cours de l’été, les religieux fondamentalistes obtiennent l’adoption – dans le supplément à la Loi fondamentale signé le 9 novembre par le chah – de l’article 2, qui établit le contrôle de cinq théologiens sur les décisions du Majlis.

31 août 1907 : Convention anglo-russe de Saint-Pétersbourg prévoyant le partage de l’Iran en deux zones d’influence séparées par une zone neutre. Cet accord semble marquer la fin du « grand jeu » qui, depuis plusieurs décennies, oppose les deux puissances en Asie. Les Russes renoncent à conquérir l’Afghanistan et reconnaissent la souveraineté chinoise sur le Tibet, mais obtiennent une vaste zone d’influence dans le Nord de la Perse. Celle qui revient à l’Angleterre dans le Sud du pays, à hauteur de la rive septentrionale du détroit d’Ormuzd, est moins étendue, mais permet de mieux contrôler l’accès au Golfe.

26 mai 1908 : Le prospecteur G.B. Reynolds fait jaillir le pétrole à Masjid-Suleiman, au pied des monts Zagros. Vingt ans plus tard, la production s’élèvera à sept millions de tonnes. La Compagnie de Recherche de William Knox d’Arcy et la Burmah Oil Company vont se charger de l’exploitation du gisement.

23 juin 1908 : Instauration de la loi martiale à Téhéran. Suspension du Majlis.

9 novembre 1908 : Le chah Mohammad Ali suspend la constitution.

14 avril 1909 : Création de l’Anglo Persian Oil Company (APOC).

10 mai 1909 : Mohammad Ali accepte de rétablir le régime constitutionnel dans l’espoir de sauver son pouvoir.

16 juillet 1909 : Les insurgés constitutionnalistes qui s’étaient emparés de Tabriz au mois d’octobre précédent prennent Téhéran et exigent la déposition du chah. Son fils, Ahmad, lui succède. Fazlollah Nuri, qui avait été l’homme de confiance du souverain dans sa tentative de réaction autoritaire, est exécuté à Téhéran.

1909-1925 : Règne d’Ahmad Shah, qui sera couronné en 1914 après avoir atteint l’âge de monter sur le trône.

1909 : Réunion d’un deuxième Majlis qui se séparera en 1911.

Juillet 1911 : Echec de la tentative de reprise du pouvoir par le chah Mohammad. Intervention des Russes qui exigent la dissolution du Majlis, effective le 24 décembre. Le même jour, l’Américain Morgan Shuster, qui avait été chargé en mai de réorganiser les finances, est congédié. Les Russes occupent le Nord du pays, de Tabriz à Meched.

29 mai 1912 : A Meched, les Russes bombardent le mausolée de l’imam Reza.
1913 : L’Anglo Persian Oil Company met en service la raffinerie d’Abadan.

20 mai 1914 : L’Amirauté britannique devient actionnaire majoritaire de l’APOC. Winston Churchill, alors Premier Lord de l’Amirauté, et l’amiral Fisher, Premier Lord de la Mer, ont bien évalué le rôle qui allait être désormais celui du pétrole au moment où le mazout se substitue au charbon dans les bâtiments de la Royal Navy.

21 juillet 1914 : Couronnement du nouveau chah de Perse, Ahmad Shah Qadjar. Un troisième Majlis est élu la même année.

Février 1915 : Les Anglais occupent Ahwaz à la suite de la coupure du pipeline d’Abadan.

1916-1921 : Mouvement jangali de Mirza Kucek Khan dans l’intérieur de la province du Gilan. Il s’agit d’une insurrection nationaliste panislamiste qui persistera, avec l’aide des bolcheviks russes, jusqu’en 1921.

9 août 1919 : Percy Cox, le représentant de l’Angleterre dans le Golfe, arrache au chah et à son premier ministre Vosuq od-Dowla un accord en dix articles assurant à Londres le contrôle de l’administration et de l’armée et lui permettant d’imposer ses « experts » pour engager, aux frais du pays, des réformes discutables.

9 avril 1920 : Révolte « démocratique » de Khiabani à Tabriz. Elle est rapidement écrasée.

Juin 1920 : Avec l’aide de l’Armée rouge, une république soviétique du Gilan est proclamée à Anzali, un port de la mer Caspienne où est alors fondé un Parti communiste d’Iran.

Septembre 1920 : A Kachan, au Luristan et au Khouzistan, les Anglais favorisent l’agitation contre l’Etat central qu’ils comptent affaiblir au maximum.

Novembre 1920 : Ahmad Chah consent, sous la pression anglaise, à renvoyer le général russe Starosselsky qui commande la Brigade cosaque, une décision qui exaspère tous les nationalistes, déjà révoltés par l’accord conclu en août 1919.

Décembre 1920 : Le limogeage du général Sardar Homayoun, exigé par le général anglais Ironside, conduit plusieurs officiers généraux – Amir Thamassebi, Amir Ahmadi et Yazdan Panah – à se concerter. Ahmir Ahmadi rencontre à Ghazvin le commandant de la Brigade cosaque Reza Khan, qui poursuit alors dans le Gilan les bandes du mouvement jangali. Ils s’accordent sur la nécessité de relever le pays et Amir Ahmadi obtient de Sardar Azam, le commandant en chef, la promotion de Reza Khan au grade de général (mirpandj). Originaire du Mazanderan où il est né le 16 mars 1878, ce chef militaire a accédé, au bout de vintg-sept ans de service, au grade de colonel au sein de la Garde cosaque. Engagé dans la répression de l’insurrection communiste du Gilan, il apparaît rassurant aux Anglais qui voient à tort en lui un chef énergique capable de rétablir l’ordre, sans remettre en cause pour autant le quasi-protectorat qu’ils entendent exercer sur la Perse.

21 février 1921 : 2 500 Cosaques venus de Hamadan et aux ordres de Reza Khan s’emparent de Téhéran. Seyyed Ziya, un patriote soucieux de réformes et de modernisation du pays, devient premier ministre alors que Reza Khan est fait commandant en chef. La constitution est suspendue, mais les milieux religieux s’opposent à la création d’une République. Le coup de force ainsi réalisé correspond aux vœux des Britanniques (le témoignage du général Ironside le confirme) qui voient dans un pouvoir central suffisamment fort une garantie face au péril bolchevique, à un moment où ils ont, eux-mêmes, fort à faire pour juguler les révoltes chi’ites et kurdes, qui secouent l’Irak voisin, territoire qu’ils ont reçu mandat d’administrer par la conférence de la Paix et la conférence de San Remo. Ils peuvent, a priori, compter sur Seyyed Ziya qui est, certes, un patriote persan, mais qui pense que la coopération avec l’Angleterre et la mise en œuvre des réformes qu’elle conseille (celles prévues dans l’accord d’août 1919) sont un gage d’accès à la modernité.

26 février 1921 : Signature, quatre jours après le coup d’Etat, d’un traité soviético-persan fixant les frontières de la Perse et de la nouvelle Russie soviétique. Celle-ci renonce au remboursement des dettes contractées par la Perse auprès de l’ancienne Russie impériale. Symbole de l’impérialisme tsariste, la Banque de Crédit de Perse est dissoute. Chacune des deux parties s’engage à interdire sur son sol toute formation politique hostile à l’autre.

27 février 1921 : le souverain qadjar Ahmad Chah nomme Reza Khan général en chef des armées (Sardar Sepah). En décembre, le nouveau commandant en chef fera passer sous son autorité la gendarmerie créée par des conseillers suédois.

24 avril 1921 : Reza Khan devient ministre de la Guerre. Le 25, un contrôle financier révèle l’ampleur de la dette du pays (près de 3 500 000 livres dues à l’Angleterre). Des sommes qui ont surtout servi à financer les voyages prolongés des trois derniers souverains Qadjar.

25 mai 1921 : Seyyed Ziya est écarté et remplacé au poste de premier ministre par Qavam ol-Saltaneh.

juin 1921 : Le gouvernement persan décide de faire appel aux Etats-Unis pour organiser son redressement financier, confié à une mission dirigée par A. Millspaugh, qui s’y consacrera de 1922 à 1927. La tâche est considérable, dans un pays endetté qui ne compte, en 1921, que neuf hôpitaux, quarante dispensaires et douze médecins, où n’existe aucun système d’enseignement moderne et où les trois quarts du produit national proviennent de l’exportation des tapis et des ressources du sous-sol.

septembre 1921 : Le gouvernement persan refuse aux Anglais une concession pétrolière dans le Nord du pays.

décembre 1921 : La mort de Mirza Kuchek Khan marque la fin du mouvement jangali (de djangal, « la forêt », où ses militants trouvaient refuge), un mouvement qui mêle nationalisme anti-anglais, populisme, islamisme, communisme et banditisme.

juillet 1922 : La rébellion de Simko est écrasée au Kurdistan, après celle d’Ismaïl Simitghou au mois de février précédent.

1922 : Début de la mission de l’Américain A. Millspaugh, chargé de réorganiser les finances de l’Etat.

26 octobre 1923 : Reza Khan est nommé premier ministre par Ahmad Chah, qui s’apprête à partir pour la France deux jours plus tard pour y prendre les eaux.

5 avril 1924 : Reza Khan abolit les titres et les charges héréditaires. Il doit cependant, au cours des semaines suivantes, renoncer à son projet de proclamer une république, car il se heurte à l’opposition de l’aristocratie traditionnelle et à celle du clergé. Dès ce moment, Reza ne cache pas à ses proches sa conviction qu’il faudra briser les tenants du passé, un clergé qui a fait condamner en 1923 un journaliste prônant l’éducation des filles.

7-8 avril 1924 : Après qu’il a agité la menace de sa démission (la rumeur a couru que le chah, en villégiature sur la côte d’Azur, avait l’intention de le remplacer), l’ayatollah de Qom et les députés du Majlis apportent leur soutien à Reza Khan qui décide de demeurer au pouvoir.

6 mai 1924 : Instauration de la conscription.

Avril 1925 : Reza Khan fait arrêter Cheikh Khaz’al, l’homme-lige des Anglais dans le Khouzistan pétrolier. Le pouvoir central ne pouvait plus tolérer la quasi-indépendance de ce grand chef tribal disposant d’une milice de plusieurs dizaines de milliers d’hommes.

Juin 1925 : Adoption du calendrier solaire et du système métrique et établissement de l’état-civil.

15 décembre 1925 : Après que l’Assemblée constituante a voté, le 13, la déposition d’Ahmad Chah, Reza Khan est proclamé chah par le Majlis, devenant ainsi le premier souverain de la dynastie Pehlevie (terme désignant une forme particulièrement vénérée de l’ancienne langue persane), sous le nom de Reza Chah Pahlavi. Le 17, son fils, Mohammad Reza, âgé de six ans, est proclamé prince héritier.

Entre tradition et modernisation sous les Pahlavi

Avec l’avènement des Pahlavi, l’Iran semble entrer enfin dans la modernité, selon un modèle autoritaire analogue à celui que met en œuvre Mustapha Kemal dans la Turquie voisine. De nombreux succès seront au rendez-vous et la Perse, devenue l’Iran, n’hésitera pas à défier l’Angleterre sur le terrain pétrolier, mais la seconde guerre mondiale et l’importance géostratégique que revêt l’Iran dans ce conflit seront fatales au colonel cosaque devenu le fondateur d’une nouvelle dynastie.

25 avril 1926 : Couronnement de Reza Chah. S’inspirant de la révolution kémaliste engagée dans la Turquie voisine, Reza Chah supprime les titres de noblesse, élimine les féodaux, confisque près d’un million d’hectares aux grands propriétaires, abolit les traités accordant aux étrangers des privilèges d’extraterritorialité, interdit aux femmes le port du voile, surveille la propagande religieuse, organise la conscription, crée une marine, construit le réseau ferré transiranien, multiplie les écoles publiques et fonde plusieurs universités…

Août 1926 : Le pouvoir central doit mater les velléités de dissidence entretenues dans les tribus du Sud du pays par les Anglais. Initialement favorables à la prise de pouvoir de Reza Khan, qui leur apparaissait comme une garantie contre d’éventuels désordres nuisibles à leurs intérêts pétroliers, les Britanniques s’inquiètent désormais de l’émergence d’un pouvoir fort.

1927 : Etablissement d’une première liaison aérienne entre la Perse et l’Europe.

mars 1927 : Création d’un ministère de la Justice, dirigé par Ali Akbar Davar, un juriste formé à Genève. Cette création fait suite à celle d’une école de droit en 1923, l’objectif du pouvoir étant de remplacer la charia islamique par un code civil moderne inspiré des modèles occidentaux dont la rédaction sera terminée en 1935. La réforme fait perdre leurs fonctions judiciaires – et donc une part de leurs revenus – à 90 % des religieux.

10 mai 1928 : Reza Chah met fin aux capitulations, les accords commerciaux favorables aux puissances étrangères.

19 septembre 1928 : Le gouvernement de Reza Chah rappelle à la Grande-Bretagne ses droits historiques sur Bahrein que les Anglais occupent.

27 décembre 1928 : le Majlis vote une loi imposant l’européanisation du vêtement et l’adoption, comme couvre-chef, d’un képi appelé à remplacer les coiffes traditionnelles. Les mollahs doivent solliciter l’obtention d’un permis spécial pour continuer à porter le turban.

7 février 1929 : Loi abolissant l’esclavage qui sévissait encore dans le Sud arabophone du pays.

20 mars 1929 : La culture et le commerce du tabac passent sous le contrôle de l’Etat. Une mesure symbolique forte en ce qu’elle renvoie à la crise de 1891-1892, qui avait vu la population résister à l’attribution de la fabrication et de la vente du tabac à une compagnie anglaise.

24 février 1930 : Le gouvernement de Reza Chah proteste contre l’occupation par les Anglais des îlots de Tomb et Abou Moussa à l’entrée du golfe Persique.

27 février 1930 : Ahmad Shah, le dernier souverain Qadjar, meurt en exil à l’hôpital américain de Neuilly.

Octobre 1930 : Téhéran soutient la répression engagée par le régime kémaliste au Kurdistan turc.

1931 : Dissolution du parti communiste dont une cinquantaine de dirigeants sont emprisonnés.

1932 : Adoption d’une législation, complétée en 1934, visant à la sédentarisation des nomades, dans un pays dont la population dépasse alors onze millions d’habitants.

21 mars 1932 : Une nouvelle monnaie, le rial, remplace le gharan et le monométallisme or est adopté.

26 novembre 1932 : Dénonciation de la concession de William Knox d’Arcy. Conclusion d’un nouvel accord avec l’Anglo Persian Oil Company.

Décembre 1932 : La Cour internationale de justice de La Haye est saisie par l’Angleterre à propos d’un conflit qui oppose l’Anglo Persian Oil Company à l’Etat persan soucieux de bénéficier plus largement des revenus du pétrole. Les Anglais font valoir l’existence d’un contrat alors que le gouvernement de Téhéran affirme que celui-ci a été établi sous les Qadjar, hors de tout cadre légal, à un moment où la constitution désormais en vigueur n’était pas encore adoptée.

Février 1933 : L’armée doit se déployer au Khouzistan et dans l’Est du pays pour faire face à des troubles suscités par les services anglais.

28 août 1933 : Le Majlis ratifie l’accord conclu sous l’égide de la SDN entre Téhéran et l’APOC, qui devient désormais l’Anglo Iranian Oil Company (AIOC) et accorde une part des bénéfices nettement plus favorable par rapport à ce qui était convenu dans l’accord conclu en 1901.

1933 : Sortie en salle du premier film parlant iranien.

11 août 1934 : Fondation de l’agence de presse Pars.

juin 1934 : Voyage de Reza Chah en Turquie où il peut constater l’ampleur de l’œuvre accomplie sous l’impulsion de Mustapha Kemal.

12 octobre 1934 : Reza Chah inaugure le mausolée à la gloire de Firdousi, symbole du rayonnement de la littérature persane à l’époque médiévale.

5 février 1935 : Inauguration de l’université de Téhéran et fondation, le 20 mai suivant, de l’Académie de langue persane.

21 mars 1935 : Suite à la décision de Reza Chah annoncée le 27 décembre 1934, la Perse devient officiellement l’Iran dans l’usage imposé aux chancelleries occidentales.

Juillet 1935 : Des émeutes, brutalement réprimées, éclatent à Meched, en réaction contre les lois vestimentaires. Le leader du mouvement sera exécuté en décembre.

17 juillet 1935 : Ouverture de la Banque de l’Agriculture. Elle témoigne – après la création, en 1929, d’une école d’agronomie installée à Karadj – de la volonté du pouvoir de développer et de moderniser la production agricole.

1er août 1935 : Abolition des titres et distinctions traditionnels.

15 octobre 1935 : Création de l’Union des femmes, qui milite pour la généralisation de l’éducation des filles. Le 7 janvier suivant, l’épouse de Reza Chah et ses deux filles se rendent, sans porter le hidjab traditionnel, mais coiffées de chapeaux à l’européenne, à l’Ecole normale de Téhéran.
3 décembre 1935 : Mahmoud Djam, réputé pour ses opinions modernistes, remplace Mohammad Ali Foroughi au poste de premier ministre.

1936 : Interdiction faite aux femmes de continuer à porter le voile islamique.
21 juin 1936 : Ouverture des premières classes d’alphabétisation destinées aux adultes.

4 février 1937 : Le Majlis vote la concession des gisements de pétrole du nord du pays à la compagnie nationale Iranian Oil Company, associée à deux filiales de la Continental Oil américaine, ce qui a de quoi irriter Staline.

18 février 1937 : Traité d’amitié irano-irakien fixant la frontière du Chatt el Arab.

8 juillet 1937 : Pacte de Saadabad entre l’Iran, l’Irak hachémite, la Turquie kémaliste et l’Afghanistan qui reconnaissent leurs frontières respectives et s’engagent à lutter contre les autonomistes kurdes.

30 septembre 1937 : Création des ministères du Commerce et de l’Industrie.

1938 : Découverte de nouveaux gisements de pétrole à Aqa-Jari, ce qui permet une nette augmentation de la production.

21 août 1938 : Inauguration du chemin de fer transiranien, dont la construction avait commencé en octobre 1927. Longue de près de 1 400 kilomètres, la voie ferrée relie Bandar Chapour, au fond du golfe Persique, à Bandar Chah sur la mer Caspienne, en passant par Ahwaz, Dezfoul, Qom et Téhéran avant de gagner le Mazanderan et les rives de la mer Caspienne. 224 tunnels et ponts ont dû être réalisés, 90 gares ont été construites, le tout financé entièrement par l’Etat iranien.

25 septembre 1938 : Inauguration de l’Ecole normale de jeunes filles.

11 novembre 1938 : Un mois de deuil national est décrété en Iran pour la mort de Mustapha Kemal Ata Turk.

Décembre 1938 : Le terminal pétrolier d’Abadan est doté de la plus grande raffinerie du monde.

15 mars 1939 : Mariage du prince héritier Mohammad Reza avec Fowziéh, la sœur du roi d’Egypte Farouk.

3 septembre 1939 : Le Premier ministre annonce la neutralité de l’Iran au moment où la guerre commence en Europe. Le pays entretient alors des relations industrielles avec l’Allemagne et abrite des experts et des conseillers allemands, ce qui inquiète les Anglais.

1939 : Le revenu national croît désormais plus vite que la population et, en moins de vingt ans, la part de la production agricole passe de 80 % à 50 % du PNB. C’est le résultat de la modernisation à marche forcée réalisée sous l’autorité sans partage de Reza Chah.

24 avril 1940 : Inauguration de Radio Téhéran.

16 août 1941 : Ultimatum anglo-soviétique à l’Iran, décidé à conserver sa neutralité. Dès le 26 juin, quelques jours après l’attaque allemande contre l’URSS, le gouvernement iranien s’est vu presser de s’engager aux côtés des Alliés, sa neutralité, réaffirmée le 19 juillet, étant interprétée comme une marque de sympathie pour l’Axe, quatre mois après l’échec du coup d’Etat engagé en Irak contre la présence anglaise par des officiers nationalistes. Un ralliement de l’Iran à la cause alliée est considéré comme indispensable pour sécuriser la route des Indes et pour écarter les éventuelles menaces allemandes sur le pétrole de Bakou, en Azerbaïdjan soviétique.

25 août 1941 : Invasion de l’Iran par les troupes britanniques et soviétiques. Ali Mansour, Premier ministre depuis le 26 juin 1940, est informé par les représentants des deux puissances qu’il s’agit « d’empêcher tout agissement subversif des Allemands ». Le prétexte est un peu léger quand on sait qu’il n’y avait, à l’époque, en Iran, que 470 Allemands, des civils employés comme conseillers techniques dans le domaine industriel, du fait, notamment, de la part prise par la firme Krupp dans la mise en place d’une sidérurgie nationale.

28 août 1941 : Mohammad Ali Foroughi remplace Ali Mansour et se voit contraint d’accepter le 30, les exigences anglo-soviétiques. Des villes d’Azerbaïdjan sont bombardées par les Soviétiques alors que les Anglais ont détruit cinq navires iraniens et confisqué deux cargos emmenés vers Bassorah. L’Iran semble revenir à la situation née du partage anglo-russe de 1907 en zones d’influence, mais Foroughi a obtenu des Anglais et des Soviétiques l’engagement que l’Iran sera évacué, au plus tard, six mois après la conclusion d’un armistice avec les puissances de l’Axe.

16 septembre 1941 : Abdication de Reza Chah en faveur de son fils Mohammad. Né le 27 octobre 1919, le nouveau souverain, qui n’a que 22 ans, a fait ses études en Suisse à Rosey, puis à l’Ecole militaire de Téhéran. Foroughi s’est habilement joué des Anglais qui rêvaient de rétablir un Qadjar vivant à Londres et ne parlant même pas le persan. Il a convoqué en urgence le Majlis pour faire introniser comme souverain Mohammad Reza. Ce dernier prête serment dès le 17 septembre, au moment où les forces d’occupation anglo- soviétiques pénètrent dans Téhéran. Embarqué à Bandar Abbas, Reza Chah est d’abord conduit en Inde avant d’être exilé à l’île Maurice, puis de gagner Durban en Afrique du Sud le 30 mars 1942. Installé ensuite à Johannesburg, il y mourra le 26 juillet 1944. Ses cendres ont été déposées dans un imposant mausolée érigé le 7 mai 1950, à Rey.

6 février1942 : Le président américain F.D. Roosevelt assure l’Iran qu’il retrouvera, après la guerre, sa pleine souveraineté.

10 mars 1942 : Foroughi est écarté au profit d’Ali Soheili, lui-même remplacé en août par Ahmad Ghavam, le candidat imposé par le Majlis. Le pays connaît, au cours des mois suivants, de graves difficultés (famine consécutive à la confiscation, le 12 juin, par les Anglais, des réserves de céréales, épidémie de typhus, troubles en de nombreuses provinces).

23 avril 1942 : L’Iran rompt ses relations diplomatiques avec le Japon.

27 août 1942 : Anglais et Soviétiques exigent du chah qu’il leur livre un certain nombre d’officiers jugés hostiles aux occupants, pour les interner dans des camps (Ahwaz et Arak pour les Britanniques, Racht pour les Soviétiques). Le souverain cède aux exigences des Anglais, mais rejette celles des Soviétiques.

Octobre 1942 : Libérés par l’amnistie décrétée en septembre 1941, les militants communistes du parti Toudeh (« masses »), créé en janvier, lancent un journal avec le soutien des Soviétiques.

Décembre 1942 : Emeutes de la faim à Téhéran où la maison du Premier ministre est pillée. Désigné par l’opinion comme responsable des difficultés de la vie quotidienne, Ahmad Ghavam est remplacé, le 16 février 1943, par Ali Soheili.

Août 1943 : Les tribus Gachgaïs s’agitent de nouveau entre Ispahan et Chiraz et bénéficient pour cela des armes et de l’argent fournis par les Anglais intéressés au maintien de l’anarchie dans le pays.

14 septembre 1943 : En déclarant la guerre à l’Allemagne, l’Iran entre officiellement dans le second conflit mondial aux côtés des Alliés.

29 novembre-2 décembre 1943 : La conférence de Téhéran réunit Churchill, Roosevelt et Staline. Présentée comme un « pont de la victoire alliée » pour laisser transiter par son territoire le soutien matériel apporté à l’URSS, l’Iran se voit promettre de nouveau son retour à une pleine souveraineté à l’issue de la guerre.

8 août 1944 : Accord anglo-américain pour le contrôle de la production de pétrole. Le 6 septembre, l’URSS demande la concession d’une exploitation dans le Nord de l’Iran, mais, le 2 décembre, le Majlis accepte un projet de loi présenté par le docteur Mossadegh, porte-parole du courant nationaliste, qui interdit aux ministres de signer tout accord de concession pétrolière.

Décembre 1944 : Le pays est confronté à une situation économique difficile et à une vive agitation sociale. C’est dans ce contexte que Mortéza Gholi-Bayat devient premier ministre. Un conseil supérieur de l’économie est créé le 28 mars 1945 pour élaborer désormais la politique économique du pays. Chef de file du courant nationaliste, le docteur Mossadegh fait adopter une loi interdisant tout octroi d’une concession pétrolière tant que des troupes étrangères stationneront sur le territoire national.

Eté 1945 : L’Iran est confronté à une crise ministérielle prolongée.

20 novembre 1945 : Annonce de la sécession de la République kurde formée à Mahabad par le Parti démocratique du Kurdistan (émanation du Komal, un mouvement nationaliste créé en 1942) soutenu par Moscou. Les Kurdes revendiquent l’autonomie et la reconnaissance de leur langue comme langue officielle. Leur chef de file est un religieux, Ghazi Mohammad.

12 décembre 1945 : Le Parti démocratique d’Azerbaïdjan s’est emparé de Tabriz avec le soutien des Soviétiques, et le communiste Djaffar Pichévari est élu premier président de la République d’Azerbaïdjan. Il impose la langue azérie à la nouvelle administration, et Moscou pousse les communistes du Toudeh, pourtant favorables à un Iran centralisé, à se joindre au mouvement. A la fin du mois, l’armée iranienne a dû abandonner la région. L’Armée rouge s’est retirée de Téhéran et de Ghazvin, mais demeure en Azerbaïdjan, alors que les Anglais évacuent, pour leur part, le pays le 31 décembre. Le gouvernement iranien proteste mais une réunion des Alliés tenue à Moscou le 28 décembre n’a rien donné et la situation reste bloquée.

26 janvier 1946 : Ahmad Ghavam redevient premier ministre et se rend à Moscou en février pour négocier l’évacuation des forces soviétiques d’Azerbaïdjan où une puissante famille légitimiste, les Zolfaghari, engage ses forces contre les milices communistes. Le 24 janvier, Vychinski, vice-commissaire soviétique aux Affaires étrangères, n’a pas hésité à nier devant l’ONU toute ingérence soviétique en Iran…

25 mars 1946 : Les Soviétiques, pressés par le président américain Harry Truman, entament l’évacuation du Nord de l’Iran. Elle sera terminée dans le courant du mois de mai. En contrepartie, Staline a obtenu, le 5 avril, un accord en vue d’une concession pétrolière dans le Nord du pays.

11 juin 1946 : Une délégation du pouvoir central entame des discussions avec des délégués kurdes de la république de Mahabad.

13 juin 1946 : Ahmad Ghavam conclut un accord avec Pichévari, le chef du Parti démocratique d’Azerbaïdjan. Le pouvoir central consent à accorder une assez large autonomie à la région, mais le persan et l’azéri seront utilisés à égalité dans l’administration. Au mois de décembre suivant, c’en est fini, le 8, de la dissidence azérie quand l’armée est accueillie en libératrice par une population hostile aux tendances communisantes de Pichavéri qui est contraint de fuir en URSS. Localement, l’ayatollah Shariat Madari a pris une part importante à la réaction antisoviétique pendant qu’à Téhéran, le chef de la mission militaire américaine – le général Norman Schwarzkopf, le père de celui qui commandera en 1990 l’opération « Tempête du désert » contre Saddam Hussein – a conseillé les responsables iraniens. Le temps de la domination anglo-russe est révolu, ce sont désormais les Etats-Unis qui deviennent la puissance extérieure la plus influente en Iran.

15 décembre 1946 : Quelques jours après le retour de l’Azerbaïdjan sous l’autorité du pouvoir central, c’est le tour du Kurdistan où l’armée met fin à la « République de Mahabad ». Ghazi Mohammad et les principaux chefs de la dissidence kurde sont pendus le 1er mars suivant. Les bandes kurdes de Mustapha Barzani se replient alors en Irak.

Juin 1947 : Une tournée du chah dans les provinces du Nord symbolise le rétablissement de l’unité nationale.

5 novembre 1947 : Le Majlis refuse de ratifier l’accord pétrolier conclu à Moscou par Ahmad Ghavam, mis en minorité par les députés le 10 décembre suivant, sous le reproche d’avoir trop concédé aux autonomistes azeris et à Staline. Un désaveu qui suscite la colère de l’ambassadeur Sadtchikov et de la radio de Moscou.

Juillet-août 1948 : Voyage officiel du chah en Europe (Angleterre, France, Italie et Suisse).
18 novembre 1948 : Annonce de la séparation du couple impérial. Fowzieh rentre en Egypte.
4 février 1949 : Le Parti communiste Toudeh est déclaré hors la loi, le jour où échoue une tentative d’attentat contre le chah. Instauration de la loi martiale.
Mai 1949 : Le chah réduit les pouvoirs du Majlis, dont les jeux politiciens stériles entretiennent l’instabilité gouvernementale.
Octobre 1949 : Le docteur Mossadegh réclame des élections libres et organise une grève de la faim de quatre jours devant le palais impérial. Le 18 octobre voit la fondation du Front national. Mohammed Hedayat, dit Mossadegh, est né en 1881. Issu d’une famille aisée, il étudie à Paris et a entamé une carrière de serviteur de l’Etat quand il rentre, en 1915, en Perse. Hostile aux projets de protectorat anglais, il a soutenu Reza Chah, mais s’en est séparé quand celui-ci a établi sa dynastie. Ecarté du pouvoir de 1925 à 1941, il revient dans le jeu politique en étant élu au Parlement en 1944. Il se fait ensuite le champion de l’indépendance pétrolière du pays. Son entreprise se conclura par un échec et, chassé du pouvoir en 1953, il demeurera à l’écart de la politique jusqu’à sa mort, survenue en 1967.
5 novembre 1949 : Un ancien premier ministre, Adbol Hossein Hajir, est assassiné par un « fou de Dieu » armé par les religieux ultras.
Novembre-décembre 1949 : Voyage du chah aux Etats-Unis dont il attend une aide économique et militaire.
23 mars 1950 : Signature d’un accord de défense entre l’Iran et les Etats-Unis.
13 avril 1950 : Constitution d’un gouvernement Ali Mansour, qui ne comprend pas de représentants du Front national. Il démissionne le 26 juin, après l’assassinat du directeur d’un journal nationaliste. C’est le général Hadji Ali Razmara qui est investi par le Majlis le 10 juillet suivant.
12 février 1951 : Mariage du chah avec Soraya Esfandiari.
7 mars 1951 : Assassinat d’Ali Razmara par un militant religieux. La victime s’opposait à la nationalisation du pétrole. Pour l’ayatollah Kachani, « cet assassinat était une nécessité ».
15 mars 1951 : Le Majlis vote la nationalisation du pétrole, deux jours après la formation d’un cabinet Hossein’Ala au sein duquel siègent des ministres du Front national. L’agitation sociale s’étend d’Abadan à l’intérieur du pays.
29 avril 1951 : Deux jours après la démission d’Hossein’Ala, Mohammad Mossadegh, le leader du Front national, devient premier ministre. La loi d’application de la nationalisation du pétrole est votée et la National Iranian Oil Company succède à l’AIOC. Une mesure initialement rejetée par l’Angleterre, qui accepte finalement le 30 juillet le principe de la nationalisation, mais porte l’affaire devant la Cour internationale de justice de La Haye, car elle entend négocier les indemnités que devra verser l’Iran. Les responsables iraniens refusent le partage par moitié des bénéfices proposé par le ministre anglais Morrison, une formule déjà appliquée par les Américains en Arabie saoudite dans le cadre de l’ARAMCO.
25 août 1951 : Richard Stokes, le ministre envoyé par Londres à Téhéran, voit rejeter son plan en huit points destiné à sortir de la crise née de la nationalisation du pétrole.
16 octobre 1951 : Mossadegh vient défendre le point de vue iranien devant le Conseil de Sécurité de l’ONU, qui décide d’attendre le verdict de la Cour de La Haye. Londres menace de poursuites les acheteurs de pétrole iranien. Les grandes « majors » font front commun en suspendant leurs achats et Washington refuse de faire crédit à l’Iran.
12 novembre 1951 : Malgré le départ des cadres britanniques, la raffinerie d’Abadan est remise en route par les Iraniens. C’est un succès salué par le chah et par l’opinion publique. Mossadegh est accueilli triomphalement le 23 novembre à son retour de New York.
Février 1952 : Les troubles se multiplient à l’occasion des élections législatives, mais l’annulation, en province, de nombreux scrutins, garantit à Mossadegh, dont le Front national est surtout puissant dans les villes, une majorité suffisante.
20 mars 1952 : Mossadegh décrète ce jour « jour du pétrole ». Le 7 septembre suivant, il rejette les propositions anglo-américaines sur la question pétrolière alors que les Anglais dénoncent toujours la rupture unilatérale du contrat conclu en 1933 qu’a représentée la nationalisation de l’AIOC.
13 juillet 1952 : Le Majlis refuse les pleins pouvoirs à Mossadegh, qui démissionne le 17 pour laisser sa place, le 18, au revenant Ahmad Ghavam, mais, dès le 21, un « soulèvement national » a jeté des milliers de manifestants dans la rue et contraint le chah et le Majlis à rappeler Mossadegh le 22, le jour où le tribunal de La Haye se déclare, au grand dam de l’Angleterre, incompétent dans le conflit qui l’oppose à l’Iran.

3 août 1952 : Le Majlis vote les pleins pouvoirs à Mossadegh dont les relations avec le chah et la famille royale sont de plus en plus tendues. Mossadegh, qui a le soutien des communistes du Toudeh, met à la retraite seize généraux monarchistes.

20 janvier 1953 : Votés pour six mois en août 1952, les pleins pouvoirs sont prolongés d’un an.

8 février 1953 : Interdiction de l’alcool. Cette mesure vaut à Mossadegh le soutien des religieux.

25 février 1953 : Arrestation du général Zahedi, un fidèle du chah, créateur un Comité pour sauver la patrie qui tend à préserver le roi et l’Iran du chaos, au moment où l’isolement international du pays aggrave la situation économique et sociale.

22 avril 1953 : Le préfet de police, le général Afchar Touss, proche de Mossadegh, est retrouvé assassiné. Les soupçons se portent sur les monarchistes.

25 juin 1953 : La CIA met sur pied le plan Ajax qui vise à chasser Mossadegh du pouvoir.

Août 1953 : Mossadegh organise un référendum pour obtenir la dissolution du Majlis que le chah lui refuse. Le résultat, très favorable au Premier ministre, suscite des soupçons de fraude (plus de 99 % de « oui »). En villégiature au bord de la mer Caspienne, le chah remet à l’un de ses fidèles, le colonel Nassiri, deux firmans, l’un destituant Mossadegh, l’autre nommant premier ministre le général Zahedi. Le 16 août, le chah et son épouse fuient vers Bagdad, où ils sont accueillis par le roi Fayçal, avant de gagner Rome. Le souverain a appris l’arrestation de Nassiri et craint pour sa sécurité. Dans Téhéran, le bazar et le clergé, encouragés par les fonds distribués par des agents de la CIA, descendent dans la rue le 19 août pour manifester leur opposition à Mossadegh. Le 21, le général Zahedi le fait arrêter. Mohammad Reza est de retour le 22, après avoir annoncé que le pétrole resterait nationalisé.

Septembre 1953 : Nouveau Premier ministre, le général Zahedi renoue avec les Occidentaux en s’appuyant très clairement sur les Etats-Unis d’Eisenhower. Les relations diplomatiques sont rétablies avec Londres le 2 décembre.

24 novembre 1953 : Mossadegh est condamné à trois ans de prison.

5 avril 1954 : Un accord associant l’Iran, la Standard Oil Company, l’AIOC et la Royal Dutch Shell est conclu pour la naissance d’un consortium pétrolier. Le gouvernement iranien jouit seul de la propriété du sous-sol et l’Etat perçoit 50 % des profits et des impôts réglés par les sociétés. Le consortium, autorisé à opérer pour vingt-cinq ans, comprend la British Petroleum, héritière de la défunte AIOC (pour 40 % des parts) et cinq compagnies américaines (35 %), le reste étant réparti entre diverses sociétés, dont la Compagnie française des pétroles (pour 6 %). Les indemnités dues à l’AIOC ne seront payées qu’à partir de 1958, le temps pour l’Iran de rétablir sa situation économique et financière. Le 31 août, l’Iran reprend ses livraisons de pétrole.

10 novembre 1954 : Hossein Fatémi, ministre des Affaires étrangères de Mossadegh, est exécuté. La répression est sévère, notamment contre le Toudeh qui voit quarante de ses dirigeants exécutés.

Décembre 1954-février 1955 : Visite du chah aux Etats-Unis où le président Eisenhower l’assure de son aide militaire et financière.

23 octobre 1955 : L’Iran adhère au Pacte de Bagdad dont faisaient déjà partie l’Irak et la Turquie depuis le 24 février, la Grande-Bretagne depuis le 4 avril et le Pakistan depuis le 1er juillet. Il s’agit d’un accord de défense inspiré par les Etats-Unis pour contenir la poussée soviétique vers l’océan Indien et les régions pétrolières du Golfe.

25 juin-13 juillet 1956 : Voyage du chah en URSS.

30 janvier 1957 : Création de la Savak, service chargé de la sécurité intérieure et du contre-espionnage et dirigé par le général Teymur Bakhtiar.

24 août 1957 : Accord pétrolier avec l’ENI de l’Italien Enrico Mattei, qui accorde 75 % des bénéfices à la NIOC, la compagnie nationale iranienne. Au cours de la même année, un accord est conclu entre les Etats-Unis et l’Iran en matière de recherche sur l’utilisation pacifique de l’atome, et les Etats-Unis cèderont à l’Iran en 1959 un réacteur nucléaire de recherche.

14 mars 1958 : Annonce à la radio du divorce du chah et de Soraya qui ne peut lui donner d’enfant.

20 mars 1958 : Le chah inaugure, à Rey, l’oléoduc transiranien, long de 1 200 kilomètres.

24 mars 1959 : Le CENTO (Central Treaty Organization) se substitue au Pacte de Bagdad après la défection de l’Irak, gagné au nationalisme arabe après le coup d’Etat du 14 juillet 1958 qui a renversé Fayçal II, le souverain hachémite.

21 décembre 1959 : Mariage du chah et de Farah Diba.

9 septembre 1960 : Fondation à Bagdad de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui comprend alors l’Iran, le Koweït, l’Arabie saoudite, le Vénézuela et l’Irak.

Octobre 1961 : Visite du chah à Paris où se tient, au Petit Palais, une grande exposition consacrée à l’art iranien.

Novembre 1961 : Mise en œuvre par le Premier ministre Ali Amini d’une réforme agraire permettant l’accès à la propriété de milliers de petits paysans. Elle est complétée en janvier puis en octobre 1963 par une nationalisation des terres non cultivées et des canaux d’irrigation.

26 janvier 1963 : Un référendum boycotté par les religieux et le Front national se conclut sur l’approbation massive de l’ensemble des réformes dont l’addition constitue la « Révolution blanche » présentée le 9 janvier. Le droit de vote est accordé aux femmes et une « armée du savoir » a pour mission de généraliser l’alphabétisation. Le clergé – qui voit mis en cause ses biens fonciers – et les grands propriétaires sont naturellement hostiles aux réformes.

16 avril 1963 : Un nouveau Code de la famille rejette la répudiation, décourage la polygamie et autorise les femmes à demander le divorce.

Juin 1963 : Des émeutes déclenchées par le clergé éclatent à Qom – où l’agitation a commencé dès le mois de mars – et Meched. On remarque, parmi les meneurs, un certain Ruollah Khomeyni, qui est arrêté le 3 juin sur l’ordre du Premier ministre Assadollah Alam. Les religieux reprochent au chah une réforme agraire qui prive le clergé d’une partie de ses terres, mais aussi l’émancipation des femmes. La répression, sévère, fait plusieurs milliers de victimes.

4 novembre 1964 : Khomeyni, devenu ayatollah, est expulsé vers la Turquie (d’où il gagnera ensuite Nadjaf, en Irak) après avoir pris la tête de la contestation d’une loi qui, votée par le Majlis, met les soldats américains séjournant en Iran à l’abri de toute poursuite devant la justice locale. Ayatollah, « signe miraculeux de Dieu », est un titre honorifique qualifiant les hauts dignitaires du clergé chi’ite depuis le début du XXe siècle. Ce titre est attribué à un mojtahed, c’est-à-dire un théologien chargé de l’interprétation de la loi religieuse et qui devra accéder au titre de hojjat ol eslam, « preuve de l’Islam », avant de devenir ayatollah. Le titre de « grand ayatollah » et celui de « modèle à imiter » (marja-e taqlid) sont les plus élevés de la hiérarchie chi’ite.

27 janvier 1965 : Amir Abbas Hoveyda devient premier ministre en remplacement de son prédécesseur Hassan Ali Mansour, assassiné quelques jours plus tôt par un fanatique religieux.

30 décembre 1965 : Création de l’organisation clandestine des Moudjahiddine du Peuple, un groupe d’opposition islamo-marxiste.

16 mars 1966 : Le chah inaugure, à Kharg, sur le golfe Persique, le port pétrolier le plus grand du monde.

11 décembre 1966 : L’Iran obtient du consortium pétrolier de nouvelles conditions, plus favorables.

6 mars 1967 : Mort de Mossadegh qui vivait en résidence surveillée.
1967 : Création de l’office de télévision iranien.

26 octobre 1967 : Couronnement solennel du chah et de son épouse, l’impératrice Farah Diba. Le souverain prend le titre de shahinshah, « roi des rois », à la manière des anciens empereurs achéménides et sassanides.

Août 1968 : Une femme devient ministre de l’Education nationale.

1968 : L’Iran signe le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) qu’il ratifiera en 1970.

19 avril 1969 : L’Iran dénonce le traité frontalier conclu avec l’Irak en 1937.

Octobre 1969 : Le ministre de l’Economie annonce un taux de croissance annuel de 9,4 % au cours des cinq années écoulées.

14 février 1971 : Accord de Téhéran qui augmente de 20 % le prix du pétrole.

12-14 octobre 1971 : L’Iran organise les fêtes de Persépolis pour célébrer le 2500e anniversaire de la fondation de l’Empire perse achéménide.

21 octobre 1971 : Inauguration du gazoduc vers l’URSS.

Novembre 1971 : Après le départ des Britanniques qui abandonnent leurs positions à l’est de Suez, les Iraniens occupent les trois îlots de Grande et Petite Tomb et d’Abou Moussa, à l’entrée du golfe Persique.

Mai 1972 : Visite de Richard Nixon à Téhéran. L’Iran apparaît plus que jamais comme un allié privilégié de Washington. Au cours de l’année suivante, l’Iran intervient au Dhofar, à la demande du sultan Qabous d’Oman, pour y briser l’insurrection du Front patriotique de libération d’Oman et du golfe Arabique, une organisation marxiste soutenue par le Yémen du Sud passé dans l’orbite soviétique. La même année 1973 voit quadrupler le budget de défense de l’Iran, devenu le « gendarme du Golfe ».

24 mai 1973 : L’Iran reprend le contrôle de son industrie pétrolière.

Octobre-décembre 1973 : La guerre israélo-arabe du Kippour entraîne un premier « choc pétrolier ». La flambée des prix profite évidemment à l’Iran qui vend même son pétrole aux enchères. C’est à Téhéran que l’OPEP décide, le 23 décembre, un quadruplement du prix du baril.

20 février 1974 : Un décret institue l’enseignement obligatoire et gratuit jusqu’à seize ans.

Octobre 1974 : Téhéran accorde à Londres un prêt de 400 millions de dollars.
14 décembre 1974 : Tension entre Iran et Irak. Deux avions irakiens sont abattus par des missiles iraniens.

23 février 1975 : Signature d’un accord de coopération nucléaire avec la France. La construction de deux sites industriels atomiques est engagée depuis l’année précédente dans la région de Bouchehr.

6 mars 1975 : Un accord est conclu à Alger entre l’Iran et l’Irak. Saddam Hussein et le chah s’entendent sur le tracé de leurs frontières à hauteur du Chatt el Arabe et dans le Golfe, mais l’Iran renonce à tout soutien aux Kurdes irakiens.

2 mai 1975 : Instauration d’un parti unique, le Rastâkhiz ou Parti de la rénovation, dont la direction est confiée à Hoveyda.

1976-1977 : La consommation progresse très vite, mais l’inflation aussi et l’exode rural massif entraîne la formation de nombreux bidonvilles à la périphérie des grands centres urbains, ce qui engendre une situation sociale tendue dans un pays en pleine explosion démographique, alors que l’autoritarisme du régime est dénoncé par les intellectuels et les étudiants et des leaders religieux comme l’ayatollah Taleghani. Plus inquiétant, la campagne électorale américaine est l’occasion, pour les démocrates hostiles à Gerald Ford et Henry Kissinger, notamment Ted Kennedy, de critiquer le régime de Téhéran qui est, pourtant, un allié sûr de Washington.

Mars 1976 : Introduction d’un nouveau calendrier qui ne prend plus pour origine l’Hégire, mais la fondation de l’Empire achéménide.

6 août 1977 : Amir Abbas Hoveyda, demeuré treize ans à la tête du gouvernement, est remercié et remplacé par Djamchid Amouzégar. L’opinion n’en est pas moins critique contre la corruption répandue dans les cercles proches du pouvoir et contre les excès de la Savak devenue une redoutable police politique.

Novembre 1977 : Des manifestations hostiles au chah éclatent lors de son voyage officiel à Washington. En visite à Téhéran en décembre, Jimmy Carter, le président américain pourtant attaché à la défense des droits de l’homme, confirme l’alliance américano-iranienne. Ses déclarations du mois de mars précédent ont cependant encouragé la contestation. En mars, l’écrivain Ali Asghar Djavadi a adressé une lettre ouverte au chah ; il a été suivi par des hommes politiques de l’opposition comme Chapour Bakhtiar puis par une soixantaine d’avocats et de juristes exigeant l’indépendance de la justice. En octobre, des manifestations religieuses ont éclaté à Rey et à Qom, suivies, en novembre, par une forte agitation universitaire.

Janvier 1978 : Manifestations à Qom en faveur de Khomeyni qui a été attaqué par la presse gouvernementale. L’agitation se développe au cours des semaines suivantes. Des émeutes éclatent à Tabriz (18-19 février) et à Yazd (29-30 mars) puis de nouveau à Qom (9-10 mai). La répression fait, à chaque fois, des dizaines de tués.

22-25 juillet 1978 : De violents affrontements font deux cents tués à Meched. Le chah remplace le chef de la Savak, le général Nassiri, par un militaire réputé modéré, et annonce, le 5 août, son intention d’organiser des élections générales ouvertes à plusieurs partis. Le 11 août, la loi martiale est décrétée à Ispahan. Le 19 août, l’incendie d’un cinéma d’Abadan, qui fait 377 morts, engendre les rumeurs les plus folles puisque l’on soupçonne alors la Savak d’en être responsable alors que tout laisse penser que l’incendie a été allumé par des militants religieux. Installé le 27 août, le nouveau gouvernement de Djaffar Charif Emami, qui remplace celui de Jamshid Amouzégar, se propose de renouer les liens avec le clergé chi’ite.

30 août 1978 : Depuis l’Irak, Khomeyni lance un appel à la population iranienne pour continuer le mouvement jusqu’au renversement du « régime d’oppression et de dictature ».
Le 8 septembre ou « vendredi noir », au lendemain de la proclamation de la loi martiale dans la capitale où d’immenses manifestations se développent depuis le 4, l’armée tire sur des manifestants à Téhéran et il y a des centaines de tués. Au cours des jours suivants, le chah ne parvient pas à renouer avec le clergé modéré, hostile à l’occidentalisation et à la révolution culturelle qu’elle a véhiculée. En octobre, l’ayatollah Khomeyni, expulsé d’Irak par Saddam Hussein, vient s’installer en France, à Neauphle-le-Château.

6 novembre 1978 : Au lendemain de nouvelles émeutes, le général Golam Réza Azhari devient premier ministre, à la tête d’un gouvernement militaire chargé de rétablir l’ordre.

9 novembre 1978 : Khomeyni lance un ordre de grève générale qui affecte notamment l’extraction pétrolière. Le mouvement est déjà engagé à Abadan depuis le 18 octobre.

11 décembre 1978 : L’insurrection s’étend à la faveur du jour de deuil chi’ite de l’Achoura qui commémore le martyre de Hossein, deuxième fils d’Ali, survenu à Kerbala, en Irak, au VIIe siècle. Un million et demi de personnes défilent dans Téhéran. Partisan d’une répression brutale, le général Oveissi est désavoué. L’administration Carter prend nettement ses distances avec le régime au nom de la défense des droits de l’homme.

31 décembre 1978 : Démission du général Azhari. Le chah confie le poste de premier ministre à Chahpur Bakhtiar, un cousin de Soraya qui a été secrétaire d’Etat sous Mossadegh et qui présente son gouvernement le 6 janvier. Les ambassadeurs américain et britannique encouragent le souverain à partir en exil. Le 5 janvier, le général américain Robert Huyser est venu convaincre les officiers de l’armée de rester neutres, mais, le 8 janvier, il y a plus de dix morts lors de la répression d’une manifestation contre Bakhtiar. Le 11, c’est le secrétaire d’Etat américain Cyrus Vance qui annonce que le chah va quitter le pays « pour quelques semaines de vacances ».

16 janvier 1979 : Le chah et la chahbanou quittent l’Iran pour gagner Assouan, en Egypte, où ils sont accueillis par le président Sadate. Le 17, des incidents survenus à Ahwaz font plusieurs centaines de morts. Le surlendemain, plusieurs millions de manifestants réclament, à Téhéran, la démission de Bakhtiar. Le 20, le président Carter fait savoir que la présence du roi aux Etats-Unis n’est pas souhaitée. Le 22 janvier, le souverain repart pour Marrakech.

La République islamique

1er février : Retour à Téhéran de l’ayatollah Khomeyni. La foule lui fait un accueil triomphal.

5 février 1979 : Khomeyni désigne Mehdi Bazargan comme futur premier ministre après trente-sept jours de gouvernement de Bakhtiar. Le 9, des heurts éclatent entre diverses unités de l’armée.

10-11 février : Téhéran est livrée à l’insurrection. Les partisans de Khomeyni et une partie de l’armée prennent d’assaut les bâtiments officiels.

12 février : Constitution d’un gouvernement provisoire islamique. Le gouvernement Bazargan est constitué le lendemain et remplace celui de Chapour Bakhtiar, disparu de fait depuis plusieurs jours. L’URSS et les Etats-Unis reconnaissent le nouveau régime.

18 février : Le Palestinien Yasser Arafat est la première personnalité étrangère accueillie par la République islamique. Téhéran rompt avec Israël le même jour.

19 février : Création par les partisans de Khomeyni du Parti de la République islamique dont la cheville ouvrière est l’ayatollah Beheshti.

26 février 1979 : Annonce de la nationalisation complète de la production pétrolière.

8 mars 1979 : Manifestation de femmes hostiles à la charia qui sont violemment dispersées par les partisans de Khomeyni.

13 mars 1979 : L’Iran annonce son retrait du CENTO.

14 mars 1979 : Bazargan dénonce les procès expéditifs organisés par des comités de partisans de l’ayatollah. Le 18 mars, de violents affrontements éclatent au Kurdistan entre les autonomistes kurdes et islamistes. Ils vont s’aggraver à partir du 20 avril et le Parti démocratique du Kurdistan iranien sera interdit le 19 août. Le 3 septembre, le « siège » de Mahabad fera environ six cents morts.

1er avril 1979 : Après un référendum organisé les 30 et 31 mars (qui voit le « oui » l’emporter officiellement par 98 % des votants), l’Iran devient une république islamique.

7 avril 1979 : Hoveyda est exécuté après un simulacre de procès. Madame Farrokh Rou Parsa, la première femme à être devenue ministre (de l’Education) en 1968, est, elle-même, exécutée pour « corruption sur terre ».

30 avril 1979 : Rupture des relations diplomatiques avec l’Egypte.

Mai 1979 : Exécution de nombreux officiers supérieurs et anciens ministres. Le religieux Sadegh Khalkhali, Fouquier-Tinville du nouveau régime, tient un décompte, à la télévision, du nombre des exécutés (au moins sept cents morts parmi les responsables de l’ancien régime).

30 mai 1979 : Affrontements à Khorramchahr, au Khouzistan, entre population arabophone et forces de l’ordre.

16 juin 1979 : Un décret permet de confisquer les biens des propriétaires absents, emprisonnés ou morts exécutés. Les banques ont été nationalisées le 7 juin ainsi que les chambres de commerce ; le clergé retrouve une partie de ses biens antérieurement confisqués. Nationalisation de la production industrielle.
Le rétablissement de la charia et les restrictions apportées aux libertés individuelles entraînent une émigration massive dans les couches les plus privilégiées et les plus cultivées de la population, mais le nouveau régime n’en a cure tant est forte sa volonté de « purification » du pays. Les masses populaires se reconnaissent en revanche en lui en ce qu’il prend le contre-pied d’une occidentalisation assimilée à la corruption et au relâchement des mœurs. Pour le peuple iranien, la réislamisation prend la dimension d’une affirmation identitaire face à un Occident perçu comme étranger et hostile. Le nouveau régime se gagne également le soutien des déshérités en mettant en œuvre une politique sociale égalitaire qui vise à l’augmentation des salaires ouvriers, en subventionnant les petits paysans et en organisant le partage des grands domaines abandonnés par les émigrés.

21 juillet : Manifestation de 50 000 personnes à Téhéran, à l’appel des formations nationalistes, laïques, libérales et de gauche.

3 août 1979 : Election de l’Assemblée des Experts (Majlis e-Khobregan) qui entame la rédaction de la constitution de la République islamique. L’élection a été boycottée par le Front national, les formations de gauche et les minorités kurde et arabe. Le PRI en est sorti grand vainqueur.

6 août 1979 : Etablissement d’une censure de la presse interdisant la publication d’articles « outrageants ou calomnieux » sur la révolution islamique. Un quotidien libéral, Ayandegan, est fermé dès le 7.

9 septembre 1979 : Mort de l’ayatollah Taleghani qui souhaitait la légalisation des partis de gauche et la laïcité de l’Etat.

4 novembre 1979 : Occupation de l’ambassade américaine de Téhéran et prise d’otages (au nombre de 52) par « les étudiants musulmans suivant la ligne de l’imam », qui réclament l’extradition du chah, hospitalisé depuis le 22 octobre à New York.

6 novembre 1979 : Démission de Bazargan. Le Front national est, de fait, écarté du pouvoir.

12 novembre 1979 : Jimmy Carter annonce l’arrêt des importations de pétrole iranien et le gel des avoirs iraniens aux Etats-Unis.

15 novembre 1979 : L’Assemblée des Experts adopte le texte de la Constitution ; elle soumet l’Etat au pouvoir suprême du clergé chi’ite et confère à l’imam Khomeyni le pouvoir suprême en tant que première autorité religieuse. Il est approuvé par référendum en décembre (avec une faible participation).

6-10 décembre 1979 : Heurts à Tabriz entre partisans de Khomeyni et ceux de l’ayatollah Shariat Madari qui sont vaincus, puis exécutés en janvier après une nouvelle révolte.

4 janvier 1980 : Echec de la mission du secrétaire général de l’ONU, Kurt Waldheim, à Téhéran.

25 janvier 1980 : Abolhassan Bani Sadr est élu président de la République islamique avec 75,7 % des voix, mais Khomeyni conserve la réalité du pouvoir.

Mars 1980 : Après avoir quitté le Maroc, le chah a séjourné aux Bahamas et au Mexique avant d’être opéré à New York d’un lymphome. Après un court séjour dans un hôpital texan, il doit gagner Panama d’où les Iraniens exigent son extradition, d’autant qu’ils entendent négocier celle-ci contre la libération des otages de l’ambassade américaine. C’est au Caire que le chah revient finalement, pour y être opéré de nouveau le 4 avril.

14 mars 1980 : Victoire du PRI aux élections législatives, confirmée le 9 mai lors du deuxième tour.

29 mars 1980 : Réforme agraire islamique.

7 avril 1980 : Rupture des relations diplomatiques entre l’Iran et les Etats-Unis.

18 avril 1980 : Le Conseil de la Révolution ordonne d’évincer des universités toutes les organisations politiques. De violents heurts opposent islamistes et étudiants de gauche.

25 avril 1980 : Echec complet, à Tabas, de la tentative de libération des otages par l’armée américaine. Le simoun, le vent soufflant dans le désert, a été fatal aux hélicoptères américains.

27 juin : Khomeyni critique « l’inaction » de Bani Sadr. Au cours des semaines suivantes, l’offensive contre la gauche se poursuit, sur fond d’épuration des universités et de l’administration et d’imposition de la « tenue islamique » pour les femmes.

18 juillet 1980 : Tentative d’attentat contre Chapour Bakhtiar réfugié à Neuilly. Un policier et une voisine sont tués.

27 juillet 1980 : Mohammad Reza Pahlavi meurt au Caire.

29 juillet 1980 : Ali Akbar Hachémi Rafsandjani est élu président du Majlis. Dissolution du Conseil de la Révolution.

11 août 1980 : Mohammad Ali Radjai devient Premier ministre en remplacement de Bani Sadr.

22 septembre 1980 : Début de la guerre Iran-Irak qui fait suite à l’offensive lancée par Saddam Hussein, excédé par les condamnations que Khomeyni lance contre le régime baasiste irakien, nationaliste arabe et laïque (dans un Irak où la moitié de la population est chi’ite) et désireux de remettre en cause l’accord qui lui avait été imposé à Alger en 1975 et qu’il a dénoncé dès le 17 septembre. La lutte s’engage d’abord au Khouzistan iranien, mais Téhéran, Bagdad et Bassorah subissent des bombardements. Saddam Hussein accepte le cessez-le-feu réclamé par l’ONU le 29 septembre, mais l’Iran le refuse.

24 octobre 1980 : Les Irakiens prennent Khorramchahr.

16 novembre 1980 : Bataille de Suzengerd sur le front irano-irakien.

20 janvier 1981 : Suite à un accord conclu à Alger, les 52 diplomates américains et canadiens retenus à l’ambassade des Etats-Unis depuis novembre 1979 sont libérés.

Mars 1981 : Un meeting organisé par Bani Sadr est suivi d’affrontements entre ses partisans et le camp des religieux.

21 juin 1981 : Votée par le Parlement, la destitution de Bani Sadr est confirmée par Khomeyni. Ses pouvoirs étaient régulièrement réduits depuis plusieurs mois et Khomeyni a fini par l’accuser d’entretenir l’agitation dans le pays. Il se réfugie à Paris le mois suivant. Sa chute fait suite au retournement des Moudjahiddine du Peuple contre le régime de Khomeyni. Massoud Radjavi, le chef de ces derniers, se réfugie également à Paris à la fin du mois de juillet. L’échec de Bani Sadr signifie, après celui de Bazargan, la fin de tout espoir d’une évolution progressiste de la révolution de 1979, passée désormais sous le contrôle du pouvoir clérical.

28 juin 1981 : Un attentat à la bombe contre le Parti de la République islamique fait 72 morts dont quatre ministres (dont l’ayatollah Beheshti) et vingt députés. La répression s’abat sur les Moudjahiddine du Peuple suspectés de l’avoir organisé. En exil, ils prendront parti pour l’ennemi irakien mais se couperont ainsi totalement de l’opinion publique iranienne.

24 juillet 1981 : Mohammad Ali Radjai est élu président de la République alors que Mohammad Javad Bahonar devient premier ministre.

30 août 1981 : Radjaï et Bahonar sont assassinés. L’intermède du pouvoir est assuré par l’ayatollah Mhadavi-Kani.

27 septembre 1981 : Les Iraniens reprennent l’initiative face à l’Irak. Leur contre-offensive dans le Khouzistan permet de débloquer Abadan assiégé depuis un an.

2 octobre 1981 : L’hodjatoleslam Ali Khamenei, secrétaire général du PRI, devient le troisième président de la République islamique. Mir Hosein Musavi est premier ministre.

1982 : Naissance au Liban du Hezbollah, mouvement chi’ite fondé avec l’aide des Pasdarans (Gardiens de la Révolution) iraniens.

Mars 1982 : Les Iraniens reprennent l’offensive dans la région de Dezful et de Suse. Le 30 avril, ils franchissent le Karun et prennent le contrôle de la route Ahwaz-Khorramchahr.

24 mai 1982 : Reprise par les Iraniens de Khorramshahr. L’échec est sévère pour les Irakiens désormais sur la défensive, mais soutenus par les Etas arabes du Golfe et par la Jordanie, ainsi que par les pays occidentaux, notamment la France, les positions américaine et israélienne apparaissant nettement plus ambiguës, comme le révèlera le scandale de l’Irangate (ventes secrètes d’armes américaines à l’Iran qui permettent, grâce à des intermédiaires israéliens, de financer clandestinement, en échappant au contrôle du Congrès, l’action des contras nicaraguayens opposés au gouvernement sandiniste).

1982 : Alors que l’ayatollah Khomeyni avait initialement suspendu le programme nucléaire iranien en 1979, Téhéran annonce la création à Ispahan d’un centre de technologie nucléaire ayant vocation à produire de l’uranium enrichi. L’année suivante, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) préconise un accord de coopération et d’assistance technique avec l’Iran, mais ce projet est abandonné sous la pression de Washington.

13 juillet 1982 : Les Iraniens lancent une vaste offensive en direction de Bassorah.

15 août 1982 : L’aviation irakienne porte la guerre dans le golfe Persique dans le but d’empêcher l’exportation du pétrole iranien.

16 septembre 1982 : Exécution de Sadegh Ghobtzadeh, qui avait pourtant été l’un des fidèles de Khomeyni durant son exil.

9 décembre 1982 : L’ayatollah Khomeyni allège l’état d’exception établi de fait depuis le début de la République islamique et alourdi par la guerre contre l’Irak.

5 février 1983 : Démantèlement du Parti communiste Toudeh qui s’était initialement associé à la Révolution islamique, et arrestation de son secrétaire général, Noureddine Kianouri, accusé de trahison et d’espionnage au profit de l’URSS. La dissolution du parti est confirmée le 4 mai, et 1500 de ses cadres sont arrêtés, dont plusieurs dizaines seront exécutés au cours des mois suivants. Sur le plan extérieur, l’Iran se dresse maintenant contre les « deux Satan » américain et soviétique (dix-huit diplomates soviétiques sont expulsés).

29 juillet 1983 : Les Irakiens parviennent à contenir l’offensive iranienne Aurore III.

7 octobre 1983 : Livraison à l’Irak de cinq Super-Etendard français, qui seront utilisés dans le bombardement des terminaux pétroliers iraniens (ou 17 septembre ?).

13 octobre 1983 : Attentats de Beyrouth contre les forces américaines et françaises.

24 février 1984 : L’Iran occupe les îles Majnoun. L’Irak emploie des armes chimiques.

avril-mai 1984 : Les élections législatives voient le succès des islamistes, car tous les candidats sont issus de leurs rangs.

Février 1985 : Création d’une Organisation de coopération économique entre l’Iran, la Turquie et le Pakistan.

5 mars 1985 : Début de la première « guerre des villes », marquée par l’emploi de missiles utilisés dans le bombardement des centres urbains. Durant tout le mois de mars, les combats font rage dans les marais d’Hoveiza, sur la rive gauche du Tigre, mais les Iraniens doivent renoncer à s’emparer de Bassorah.

16 août 1985 : Ali Khamenei est réélu président, et Mir Hosein Musavi demeure Premier ministre.

17 août 1985 : Le terminal pétrolier de Kharg est détruit par l’aviation irakienne.

22 novembre 1985 : L’ayatollah Hossein Ali Montazeri est désigné comme successeur éventuel de l’imam Khomeyni.

10 février 1986 : Les Iraniens s’emparent de Fao.

17 septembre 1986 : Attentat de la rue de Rennes à Paris. Il est commandité par l’Iran, qui entend punir la France du soutien qu’elle apporte à Saddam Hussein.

Novembre 1986 : L’affaire de l’Irangate éclate au grand jour et engendre une crise politique à Washington.

20 juillet 1987 : Le Conseil de Sécurité de l’ONU demande l’arrêt immédiat des combats entre l’Iran et l’Irak. Bagdad accepte, mais l’Iran exige comme préalable à tout cessez-le-feu que l’Irak soit reconnu comme l’agresseur.

31 juillet 1987 : Graves incidents lors du pèlerinage de La Mecque. Des manifestations de pèlerins iraniens entraînent des affrontements qui font 402 morts, dont 275 Iraniens. L’hostilité entre Téhéran et Riyad, entre l’Iran chi’ite et l’Arabie saoudite wahhabite est relancée par la rupture des relations entre les deux capitales.

Juillet-novembre 1987 : « Guerre des ambassades » avec la France, consécutive aux attentats perpétrés à Paris.

8 octobre 1987 : L’US Navy coule trois vedettes iraniennes dans le golfe Persique.

Février-mars 1988 : Reprise, entre Iran et Irak, de la « guerre des villes » qui voit cent trente-cinq missiles toucher Téhéran.

12 mars 1988 : Elections pour le troisième Majlis de la République islamique. Cent treize religieux sont élus.

17 mars 1988 : Bombardement chimique irakien sur Halabja, dans le Kurdistan. Près de cinq mille civils sont tués dans ce bourg disputé entre Irakiens et Iraniens.

Avril 1988 : Les Iraniens évacuent Fao et les îles Majnoun et se retrouvent désormais sur la défensive.

3 juillet 1988 : Un Airbus d’Iran Air est abattu par un missile tiré depuis le croiseur américain Vincennes. Il y a 290 tués.

18 juillet 1988 : L’ayatollah Khomeyni accepte le principe d’un cessez-le-feu réclamé par la résolution 598 de l’ONU formulée un an plus tôt par le Conseil de Sécurité. Annoncé le 8 août par Javier Perez de Cuellar, le Secrétaire général de l’ONU, l’arrêt des combats sera effectif le 20 août. La guerre, très meurtrière pour les deux adversaires, a contribué à la légitimation du régime islamique qui, complètement isolé sur le plan international, a réussi à faire face à l’agression irakienne.

14 février 1989 : Une fatwa de l’ayatollah Khomeyni condamne à mort l’écrivain pakistanais Salman Rushdie, auteur des Versets sataniques.

28 mars 1989 : L’ayatollah Ali Montazeri – qui se voit reproché ses prises de position contre la répression très brutale de l’opposition – est écarté de la succession à Khomeyni.

4 juin 1989 : Mort de l’ayatollah Khomeyni. Plusieurs millions de fidèles assistent à ses obsèques le 6 juin. Elles sont l’occasion de scènes d’hystérie collective qui font huit morts.

28 juillet 1989 : Ali Akbar Rafsandjani est élu président de la République, en même temps qu’un référendum est organisé en vue d’une réforme de la constitution. Rafsandjani, réélu, conservera cette fonction jusqu’en 1997.

Août 1989 : Le leader du Parti démocratique du Kurdistan iranien, A. Qasemlu, est assassiné à Vienne.

9 août 1989 : Ali Khamenei est élu Guide de la République islamique et succède ainsi à Khomeyni.

2 août 1990 : Invasion du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein. Une coalition suscitée par les Etats-Unis et mandatée par l’ONU s’engage contre l’Irak pour obtenir, au mois de février suivant, la libération du Koweït.

20 août 1990 : Irak et Iran, qui se sont affrontés de 1980 à 1988, signent un traité de paix. Le conflit a fait entre 500 000 et 1 200 000 morts. Les dépenses militaires et les pertes en PIB sont évaluées, pour les deux pays, à 500 milliards de dollars.

Octobre 1990 : Les islamistes radicaux, écartés un an plus tôt du gouvernement par Rafsandjani – qui a constitué alors une équipe de techniciens dont beaucoup avaient été formés en Occident –, le sont de l’Assemblée des Experts, avec l’accord du Guide Ali Khamenei.

16 mars 1991 : La Banque mondiale accorde un prêt à l’Iran.

Avril-mai 1991 : Les élections législatives voient la défaite des religieux radicaux et sont suivies de la mise en œuvre d’une nouvelle politique économique. Le Majlis déclare les privatisations décidées conformes à la Constitution.

6 août 1991 : Assassinat de Chapour Bakhtiar à Paris.

29 décembre 1991 : Fin du différend financier, négocié depuis 1981 à La Haye entre l’Iran et la France. Le contentieux Eurodif remontant à l’époque du chah est réglé.

10 avril 1992 : Election du quatrième Majlis de la République islamique. Seulement quarante-neuf religieux sont élus. Les partisans d’Ali Akbar Hachémi Rafsandjani l’emportent sur les radicaux.

Juin 1992 : Explosion d’émeutes populaires à Téhéran, Machad et Chiraz. Elles témoignent de la lassitude de la population.

12 décembre 1992 : L’Union européenne décide d’entretenir avec l’Iran un « dialogue critique ».

28 mars 1993 : Dévaluation du rial. C’est l’aboutissement logique de l’isolement économique du pays et des immenses dépenses engagées durant la guerre contre l’Iran.

13 mai 1993 : Inauguration du chemin de fer reliant l’Iran au Turkménistan.

16 mai 1993 : Les Etats-Unis de Bill Clinton définissent leur politique de dual containment contre l’Irak baassiste et l’Iran islamiste.

11 juin 1993 : Rafsandjani est réélu président pour cinq ans avec 63,5 % des voix.

20 juin 1994 : Un attentat perpétré à Meched à l’occasion de la fête de l’Achoura fait plusieurs dizaines de victimes. Il est attribué par le régime aux Moudjahiddine du Peuple.

Janvier 1995 : La Russie reprend la construction de la centrale nucléaire de Bouchehr. En 1997, un accord de coopération technique est conclu entre l’Iran et l’AIEA.

4 avril 1995 : Des émeutes dues à la vie chère éclatent à Téhéran.

30 avril 1995 : Bill Clinton décide un embargo total contre l’Iran, considéré comme un « pays terroriste » et accusé de vouloir se doter de l’arme nucléaire. C’est devant les représentants du Congrès juif mondial réunis à New York que le président américain a annoncé l’arrêt de tous les investissements et échanges commerciaux avec l’Iran. Washington a également invité le président russe Boris Eltsine à annuler la vente de réacteurs nucléaires russes à Téhéran et les partenaires des Etats-Unis à « revoir en profondeur » leurs relations économiques avec le régime des mollahs (l’Iran de la République islamique est ainsi qualifié, du fait de l’importance qu’y ont prise les clercs ou les « personnes instruites » qui ont accompli des études de théologie et se distinguent des simples fidèles par le port d’un turban). Les mesures annoncées doivent entrer en vigueur dans un délai de trente jours. Radio-Téhéran a qualifié cette décision de « déraisonnable » et a estimé qu’elle était « dictée par une manœuvre électorale de la faction sioniste aux Etats-Unis ». Les mesures annoncées par Bill Clinton s’inscrivent dans la continuité de l’annulation, en mars, du contrat signé par une filiale de la compagnie américaine Conoco pour l’exploitation de gisements offshore et de la mise à l’écart de Téhéran, en avril, d’un consortium mis en place par les Américains avec l’Azerbaïdjan pour exploiter le pétrole de la mer Caspienne. Les Américains entendent également tout faire pour éviter que le pétrole ou le gaz de la mer Caspienne et de l’ancienne Asie centrale soviétique ne transitent pas par l’Iran, mais par la Turquie, considérée comme un allié fidèle de Washington. On verra, au cours des années suivantes, les responsables de Washington encourager un accord avec les talibans afghans pour mettre en place le tracé d’un oléoduc passant par l’Afghanistan et le Pakistan. Les principaux partenaires de Washington vont rejeter l’appel du président Clinton. Seul le Premier ministre israélien Itzhak Rabin a exprimé sa satisfaction. La Grande-Bretagne s’est déclarée sceptique et l’Union européenne a privilégié les « relations commerciales ». Lee Raymond, président d’Exxon, la première compagnie pétrolière du monde, a déclaré pour sa part au Financial Times que cet embargo « serait vain et inefficace ». L’Australie, l’Allemagne, l’Italie et la France sont sur la même ligne, ainsi que le Canada qui appuie toutefois la demande présentée à la Russie de cesser sa coopération nucléaire avec Téhéran. En juillet, la firme française Total annoncera même son intention de reprendre le contrat dénoncé par Conoco.

13 juillet 1995 : L’Iran engage une nouvelle politique dans le domaine pétrolier, avec l’accord conclu entre la NIOC et Total.

8 mars 1996 : Election du cinquième Majlis de la République islamique.

3 août 1996 : Par la loi d’Amato-Kennedy, les Etats-Unis menacent de sanctions les compagnies pétrolières investissant en Iran, ce qui vise directement la compagnie française Total.

23 mai 1997 : Election à la présidence de la République de Mohammad Khatami, qui sera réélu et exercera la fonction jusqu’en 2005.

Février 1999 : Premières élections municipales initiées par Khatami.

Juillet 1999 : Emeutes étudiantes, réprimées par les Gardiens de la Révolution.

5 mai 2000 : A l’issue du deuxième tour des élections législatives, les réformateurs modérés l’emportent avec 189 sièges sur 290.

17 avril 2001 : Signature d’un accord de sécurité entre l’Arabie saoudite et l’Iran concernant la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent.

8 juin 2001 : Réélection de Mohammad Khatami avec 78,5 % des voix.

Janvier 2002 : Lors de son « discours sur l’état de l’Union », George W. Bush réunit dans « l’Axe du Mal » l’Iran, l’Irak et la Corée du Nord.

2003 : Les élections municipales voient la première percée du courant conservateur de Mahmoud Ahmadinedjad.

26 août 2003 : Les inspecteurs de l’AIEA affirment avoir découvert sur le site de Natanz des taux d’uranium enrichi supérieurs aux normes civiles. Le 12 septembre, l’Agence demande à l’Iran de prouver qu’il ne développe pas l’arme nucléaire. Le 23 octobre, la troïka européenne composée de la France, de l’Allemagne et de l’Angleterre obtient un engagement iranien à propos de la suspension de la production d’uranium enrichi et, le 11 novembre, l’Iran confirme son intention d’engager des négociations sur un partenariat nucléaire civil. Enfin, le 18 décembre, Téhéran signe le protocole additionnel au TNP.

Octobre 2003 : L’avocate et militante des droits de l’homme Shirin Ebadi obtient le prix Nobel de la Paix.

15 novembre 2004 : Téhéran accepte de geler l’enrichissement de l’uranium, et reprend les négociations avec la troïka le 13 décembre.

17 janvier 2005 : George W. Bush déclare qu’il n’exclut aucune option contre l’Iran. Un article du New Yorker, mollement démenti par les autorités, prétend que les forces spéciales américaines effectuent des reconnaissances clandestines en Iran, en vue d’éventuelles frappes contre les sites nucléaires.

24 juin 2005 : Election du conservateur Mahmoud Ahmadinedjad à la présidence de la République. Il succède à Mohammad Khatami, président pendant deux mandats depuis 1997. Religieux modéré, ce dernier avait suscité des espoirs auprès des jeunes, des femmes, de la presse et de la société civile en général, ce qui lui a valu les critiques des conservateurs qui le suspectaient de « mollesse » du fait de sa politique de « détente » face aux Occidentaux, notamment sur le dossier nucléaire. Il a, au final, renoncé à la plupart des réformes annoncées, ce qui témoigne des limites du pouvoir présidentiel dans un système « en double commande » où les organes religieux et le Guide suprême Ali Khamenei, hostiles aux réformes, ont le dernier mot. Le nouvel élu, né en 1956 et d’origine modeste, a été un militant de la première heure de la cause islamiste et certains, sur la base d’une ressemblance, l’ont même accusé – apparemment à tort car il était alors plus antisoviétique qu’antiaméricain – d’avoir participé à la prise d’otages de l’ambassade américaine de 1979. Officier des Gardiens de la Révolution durant le conflit contre l’Irak, il a été préfet d’Ardebil, en Azerbaïdjan iranien, de 1993 à 1997. Il a rejoint ensuite l’organisation des milices bassidji, puis devient, en 2003, maire de Téhéran et fait de cette fonction un tremplin en vue de la présidentielle car il est hostile aux réformes voulues par Mohammad Khatami. C’est à la surprise des observateurs occidentaux qu’il bat son principal rival, l’ancien président Rafsandjani, qui apparaissait à beaucoup comme le successeur probable de Khatami.

Juillet 2005 : Visite du Premier ministre irakien, le chi’ite Ibrahim Jaafari en Iran.

Août 2005 : Après avoir informé, le 1er août, l’AIEA de son intention de réactiver à Ispahan son programme d’enrichissement (ce sera effectif le 8), l’Iran rejette le 5, comme « inacceptables et insultantes », les propositions européennes de coopération et d’abandon de ce programme. Les Etats-Unis réclament la saisine du Conseil de Sécurité de l’ONU. Le 24 septembre, l’AIEA adopte une résolution prévoyant un recours au Conseil de Sécurité.
Novembre 2005 : Le président irakien Jalal Talabani se rend à Téhéran, c’est la première visite d’un président irakien en Iran depuis 1968.

2006 : Les élections municipales et celles pour l’Assemblée des Experts sont gagnées par les modérés.

4 février 2006 : L’AIEA demande le transfert à l’ONU du dossier iranien alors que Téhéran décide de suspendre les inspections-surprises prévues par le traité de Non-Prolifération.

11 avril 2006 : Le président iranien Mahmoud Ahmadinedjad annonce que l’Iran a rejoint le club des pays disposant de la technologie nucléaire.

16 juin 2006 : En réponse aux propositions présentées par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité auxquels s’est jointe l’Allemagne, Téhéran se dit prêt à négocier, mais sans conditions préalables. Le 31 juillet, l’ONU donne un mois à l’Iran pour suspendre ses activités sous peine de sanctions.

22 août 2006 : Téhéran se dit prêt à négocier « sérieusement », mais sans évoquer la suspension de l’enrichissement de l’uranium. Le 31 août, un rapport de l’AIEA remis à l’ONU indique que l’Iran n’a pas respecté l’ultimatum fixé et a repris ses activités

23 décembre 2006 : Le Conseil de Sécurité vote la résolution 1737 qui impose des sanctions visant la poursuite du programme nucléaire iranien, mais n’autorise pas le recours à la force. Deux mois sont accordés à Téhéran pour suspendre l’enrichissement.

18 janvier 2007 : Le physicien Ardeshir Hassanpour meurt, victime d’un empoisonnement. Le 7 février suivant, Ali Reza Asagari, un responsable des Gardiens de la Révolution qui participait à la protection des sites nucléaires fait défection pour rejoindre les Etats-Unis via la Turquie, ce qui traduit l’intensité de la lutte livrée dans l’ombre autour du programme nucléaire iranien. Depuis 2005, Téhéran dispose d’un nouveau service de renseignement, Oghab 2, exclusivement chargé de la protection des sites nucléaires contre d’éventuelles opérations extérieures.

24 mars 2007 : L’ONU adopte la résolution 1747 qui durcit les sanctions économiques et commerciales contre l’Iran. Au cours du même mois de mars, les Etats-Unis et l’Iran sont représentés dans une même réunion à Bagdad, au moment où l’administration Bush accuse l’Iran de participer à la déstabilisation de l’Irak.

Août 2007 : L’Iran s’engage auprès de l’AIEA à faire la lumière sur ses activités nucléaires passées.

15 novembre 2007 : L’AIEA fait état de progrès dans la coopération de l’Iran, mais déplore l’opacité cultivée par les Iraniens dans le domaine nucléaire.
3 décembre 2007 : Un rapport des services de renseignement américains conclut que l’Iran a gelé son programme nucléaire militaire, ce qui contredit la dénonciation de la menace iranienne telle qu’elle est formulée alors par le président G.W. Bush et par Hillary Clinton, la candidate à l’investiture démocrate. C’est un désaveu pour la tendance belliciste de Washington, représentée par le vice-président Dick Cheney et pour le lobby pro-israélien très influent à Washington.

Janvier 2008 : Le Guide suprême Ali Khamenei rappelle à l’ordre Ahmadinedjad, engagé dans un conflit avec le Parlement sur des questions budgétaires, économiques et sociales.

25 février 2008 : Prenant le contre-pied du rapport des agences de renseignement américaines publié en décembre 2007, le Finlandais Olli Heinonen, directeur général adjoint de l’AIEA, fait état de documents qui semblent prouver la réalité d’un programme nucléaire militaire iranien. Le directeur de l’Agence, l’Egyptien Mohammed El Baradei, échaudé par les mensonges américains de 2003 à propos de prétendues armes nucléaires irakiennes, demeure beaucoup plus réservé et adopte sur la question une posture plus « politique » que « technique ».

2 mars 2008 : La commission des Affaires étrangères du Parlement britannique affirme « qu’une frappe militaire contre l’Iran aurait peu de chances de réussir et pourrait provoquer des répercussions extrêmement violentes à travers la région. » Une prise de position qui témoigne des incertitudes des puissances occidentales quant à la conduite à tenir vis-à-vis de la République islamique – dont le programme nucléaire a naturellement de quoi inquiéter, ne serait-ce que par les risques de prolifération régionale qu’il implique – mais contre laquelle toute action militaire risquerait de déclencher une crise aux conséquences totalement imprévisibles.

3 mars 2008 : Visite à Bagdad, qualifiée « d’historique », de Mahmoud Ahmadinedjad, la première d’un président iranien depuis la révolution islamique de 1979. Vingt ans après la fin de la guerre Iran-Irak, elle officialise la normalisation des relations entre Bagdad et Téhéran.
L’avènement d’un pouvoir chi’ite en Irak, même s’il est la conséquence de l’invasion américaine de 2003, a évidemment favorisé ce rapprochement. Le président Jalal Talabani (un Kurde) et le Premier ministre Nouri al Maliki (un chi’ite) ont accueilli le président iranien. Celui-ci souhaite contribuer à la réconciliation des deux grands courants qui se partagent la population chi’ite irakienne, le Conseil islamique d’une part – dont la force Badr est financée et armée par Téhéran – et, d’autre part, le mouvement de Moqtada al Sadr – dont le chef est réfugié à Qom – qui représente la tendance la plus radicale, farouchement engagée contre les sunnites irakiens, en réaction aux attentats anti-chi’ites perpétrés par la branche irakienne d’al Qaeda. La stabilisation du pays voisin est un enjeu important pour le pouvoir islamique de
Téhéran car il craint un éclatement de l’Irak, générateur d’un chaos susceptible, comme dans les années quatre-vingt, lors de la chute du chah, d’avoir un écho en Iran chez certaines minorités. Le président iranien cherche de plus à nouer de bonnes relations avec les pays arabes, eux-mêmes divisés et privés d’un chef charismatique (ce que fut Nasser ou ce que tenta d’être Saddam Hussein) à même de satisfaire la « rue Arabe » dans le cadre d’une opposition radicale à Israël.

Mars-avril 2008 : Les élections législatives mettent en lumière une évolution significative du jeu politique. La lutte entre conservateurs et réformateurs, qui domina les deux mandats présidentiels de Mohammad Khatami (1997-2005) n’est plus à l’ordre du jour. La compétition qui prévaut désormais est celle opposant la vieille garde religieuse et les anciens combattants de la guerre Iran-Irak de 1980-1988. La montée en puissance des Pasdarans, Gardiens de la Révolution, et des bassijis (miliciens volontaires) – qui représentent cette nouvelle génération – s’est affirmée aux élections municipales de 2003, aux législatives de 2004 et, enfin, à la présidentielle de 2005. Il est significatif que le petit-fils de l’ayatollah Khomeyni, Ali Eshragi, ait renoncé à se présenter en dénonçant la « militarisation » de la vie politique. Bon nombre de candidatures de réformateurs ont été écartées et ceux-ci n’ont pu se présenter que pour 111 des 290 sièges que compte le Parlement. Les pasdarans ne constituent pas pour autant un groupe homogène. Le Front des défenseurs des principes, la tendance représentée par Mahmoud Ahmadinedjad, acquise à l’idéologie islamique radicale et favorable à la confrontation avec l’Occident, se distingue en effet de la Coalition élargie des défenseurs des principes, tendance des nationalistes islamiques plus pragmatiques – tels que Ali Laridjani, qui a été négociateur sur les questions nucléaires avant d’être évincé, ou Mohammad Baqer Qalibaf, le maire de Téhéran – qui souhaite éviter un trop grand isolement international du pays.
10 juillet 2008 : Le P.-D.G. de Total, Christophe de Margerie, annonce la suspension des projets gaziers de son groupe en Iran, malgré le protocole d’accord signé en 2006. Cette annonce intervient dans un contexte tendu. Le 9 juillet, Téhéran annonçait le lancement de missiles de moyenne et longue portée, dont le Shahab 3, capable d’atteindre Israël. La semaine précédente, le chef d’état-major de l’armée avait prévenu que si ses intérêts étaient en jeu, l’Iran n’hésiterait pas à fermer le détroit d’Ormuzd, à l’entrée du Golfe, par lequel transite plus du tiers du pétrole mondial. Il avait également menacé de « mettre le feu » à Tel Aviv et à la Ve flotte américaine basée à Bahrein si Israël ou les Etats-Unis attaquaient les sites nucléaires iraniens.

19 juillet 2008 : L’annonce de l’envoi à Genève, pour participer aux négociations engagées avec l’Iran sur la question nucléaire – aux côtés de la France, du Royaume-Uni, de la Chine, de l’Allemagne et de la Russie – du sous-secrétaire d’Etat américain William Burns est perçue comme un geste de détente de la part de l’administration américaine, au point que l’un des faucons de Washington, l’ancien ambassadeur à l’ONU John Bolton, constate que « c’est comme si l’administration Obama commençait avec six mois d’avance. ». Au cours des jours suivants, la tendance à l’apaisement semble se confirmer à Washington. Deux experts reconnus, le démocrate Zbigniew Brzezinski et le général Brent Scowcroft, intervenant devant le Center for Strategic and International Studies, ont, tour à tour, critiqué tout recours prématuré à la force contre l’Iran avec lequel ils ont conseillé de renouer des relations régulières tout en levant l’embargo sur les technologies pétrolières. Ces positions vont dans le sens de celles discrètement formulées par la secrétaire d’Etat Condolezza Rice et par le secrétaire à la Défense Robert Gates. Une évolution qui inquiète les dirigeants israéliens. Au cours de la même semaine, Ehoud Barak, ministre de la Défense, Tzipi Livni, ministre des Affaires étrangères et Shaul Mofaz, vice-Premier ministre, se sont en effet succédé à Washington pour pousser les Américains à lancer un ultimatum à l’Iran, conscients qu’ils n’auraient guère de chances d’obtenir une telle décision de l’administration démocrate de Barack Obama dont tout laisse déjà penser qu’elle succédera à celle de George W. Bush. L’avenir montrera que, s’il entend mener une politique étrangère clairement différente de celle de son prédécesseur, le nouveau président finalement élu en novembre, nuancera ses positions au cours de sa campagne électorale et après son accession à la Maison blanche. Le choix de certains de ses proches conseillers (Axelrod, Rahm Emmanuel) et celui d’Hillary Clinton pour occuper le département d’Etat marqueront une évolution plus favorable à Israël, compensée par la nomination de George Mitchell comme responsable des questions du Proche-Orient. A l’inverse, celle de Dennis Ross comme responsable des questions iraniennes semble indiquer un durcissement sur ce dossier particulier. Il apparaît toutefois que celui-ci restera sans doute « gelé » dans une large mesure jusqu’aux élections présidentielles iraniennes de juin 2009 qui verront Mahmoud Ahmadinedjad remettre son pouvoir en jeu, une victoire de son adversaire Mohammad Khatami, plus modéré, ouvrant sans doute de nouvelles perspectives à la négociation.

15 septembre 2008 : Mohammad el Baradei dévoile un nouveau rapport de l’AIEA dénonçant le refus de coopération du gouvernement iranien sur la question nucléaire et faisant état d’études visant à la militarisation du programme iranien (dont les plans, documents et photos auraient été découverts en 2004 par les services secrets américains dans un ordinateur portable reçu d’une source clandestine… Les mêmes services qui, à la fin de 2007, avaient publié un rapport faisant état de la suspension des recherches militaires iraniennes depuis 2003…). Face à Herman Nackaerts, chef des inspecteurs de l’AIEA pour le Moyen-Orient, Ali Asghar Soltanieh, ambassadeur iranien à l’ONU, a pointé les incohérences identifiées dans les documents présentés et a rappelé les falsifications opérées par les Américains en 2002 pour justifier la guerre déclenchée contre l’Irak au printemps de 2003.

25 septembre 2008 : Moscou annule une réunion des six grandes puissances qui devaient, en marge de l’assemblée générale de l’ONU, examiner un renforcement des sanctions contre Téhéran. C’est la réponse russe aux réactions occidentales consécutives aux évènements survenus en Géorgie un mois plus tôt.

22 octobre 2008 : Le Pentagone accuse Téhéran de tenter de faire « dérailler » le Status of Forces Agreement (SOFA) négocié entre Washington et le gouvernement irakien en vue du maintien des troupes américaines en Irak au-delà du 31 décembre, date butoir du mandat accordé par les Nations unies.

29 janvier 2009 : M. Ahmadinedjad prononce à Kermanshah un discours qui se veut une réponse aux offres de dialogue formulées par Barack Obama et Hillary Clinton. Pour saisir « la main tendue » par l’Amérique, il exige que celle-ci présente des « excuses au peuple iranien » et répare les « crimes commis contre la République islamique » (coup d’Etat contre le régime Mossadegh en 1953, hostilité à la République islamique, embargo, occupation de l’Irak depuis 2003…).

6 février 2009 : Annonce de la mise en fonctionnement de la centrale nucléaire de Bouchehr construite par les Russes avant la fin de l’année. Cette annonce intervient deux jours après la mise en orbite d’un satellite artificiel iranien par la fusée Safir 2 Omid (Espoir) dont les deux à trois mille kilomètres de portée inquiètent les Occidentaux. C’est un premier aboutissement du programme spatial engagé en 1998.

8 février 2009 : L’ancien président réformateur Mohammad Khatami annonce qu’il se présentera aux élections présidentielles du mois de juin. Il devra compter avec la candidature de Mehdi Karroubi, un religieux modéré, ancien président du Parlement, et avec celle de Mahmoud Ahmadinedjad soutenu par le Guide Ali Khamenei, par les religieux conservateurs et par le chef d’état-major de l’armée, le général Hassan Firouzabadi. Les conservateurs sont cependant divisés et les fondamentalistes regroupés autour d’Ahmadinedjad ne font pas l’unanimité en raison de sa politique économique et sociale inflationniste et de l’isolement du pays auquel ses déclarations anti-israéliennes ont contribué.

18 février 2009 : Le ministre iranien de la Défense, Mohammad Najjar, entame une visite de trois jours en Russie dans le but d’acheter des missiles sol-air S-300, ce qui inquiète Israël et son allié américain.

19 février 2009 : Un nouveau rapport de l’AIEA critique les entraves mises par Téhéran au travail de ses inspecteurs et affirme que l’Iran dispose de 1 010 kilogrammes d’uranium faiblement enrichi, quantité suffisante pour fabriquer, s’il le décide, la matière fissile pour une arme nucléaire.

23 février 2009 : Dennis Ross est nommé par Hillary Clinton « conseiller spécial pour le Golfe et l’Asie du Sud-Ouest ». L’Iran n’est pas officiellement mentionné, mais il est clair que c’est ce pays qui retiendra en priorité son attention, au moment où George Mitchell doit gérer le dossier proche-oriental et Richard Holbrooke le dossier afghan et pakistanais.

5 mars 2009 : Responsable du département d’Etat, Hillary Clinton propose, depuis Bruxelles, la réunion, le 31 mars, d’une conférence internationale consacrée à l’Afghanistan à laquelle l’Iran serait invité. Un débat est en cours parmi les experts américains, certains pensant que l’Iran pourra se satisfaire d’accéder simplement au « seuil nucléaire », c’est-à-dire à la capacité de fabriquer la bombe, sans pour autant s’en doter. D’autres insistent sur le fait qu’il faut parler avec l’Iran avant les élections de juin pour ne pas laisser à Ahmadinedjad la possibilité de prétendre que les Etats-Unis attendent son éventuelle défaite pour négocier, ce qui serait pour lui un excellent argument électoral auprès d’une opinion publique très attachée à l’idée que l’Iran a le droit, comme son voisin pakistanais, ou comme l’Inde ou Israël, de se doter de la bombe. Des signaux d’ouverture ont également été envoyés en mars par Barack Obama, et des représentants iraniens ont bien participé à la conférence consacrée à l’Afghanistan. Du côté iranien, l’ancien Premier ministre, Mir Hossein Moussavi (qui exerça cette fonction à l’époque de la guerre entre l’Iran et l’Irak et qui apparaît comme le candidat des « modérés » après la renonciation de Mohammed Khatami) et Ahmadinedjad – qui sera lui même candidat à l’élection présidentielle du 12 juin prochain – fourbissent leurs arguments. Le premier reproche au second sa rhétorique agressive vis-à-vis de l’Occident alors que le second l’accuse de vouloir « vendre son âme à l’Amérique ». Deux autres candidats se sont déclarés : le réformiste Mehdi Karoubi et Moshen Rezaï, un ancien responsable des Gardiens de la Révolution. Le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, demeure discret, mais son soutien à Ahmadinedjad paraît assuré. Il n’est cependant pas exclu, si les ouvertures américaines se confirment, que des hommes tels que Ali Larijani ou Ali Akbar Hachémi Rafsandjani puissent revenir au premier plan dans le cadre d’une négociation limitée à certains sujets.

La situation de la République islamique apparaît, à beaucoup d’égards, paradoxale en ce printemps 2009, à quelques semaines de l’élection présidentielle de juin. Elu en 2005, Ahmadinedjad a voulu donner la priorité aux « déshérités » qui constituaient la base sociale de la révolution islamique. « J’apporterai l’argent du pétrole à votre table » avait-il promis aux huit millions d’Iraniens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, et il a effectivement engagé de vastes programmes d’aide sociale et de réalisation d’infrastructures appelées à améliorer le quotidien de ses compatriotes, mais la chute des prix du pétrole est désormais durement ressentie (un pétrole qui représente 90 % des recettes d’exportation et permet d’assurer 75 % des dépenses budgétaires). Avec un pétrole à moins de 50 dollars le baril, le fonds de réserve qui a alimenté la politique populiste du gouvernement risque de s’épuiser rapidement, au moment où les sanctions économiques liées au dossier nucléaire coûtent de 10 à 15 milliards par an et alors que le chômage (15 %) et l’inflation (29 %) augmentent rapidement. Les mutations sociales – issues d’une augmentation considérable du nombre des étudiants dans l’enseignement supérieur ou d’une émancipation féminine qui, toute relative qu’elle est, n’en est pas moins une réalité dans un pays où le nombre des étudiantes est supérieur à celui des étudiants et où la contraception est légale – ont profondément transformé un pays dont la population reste extrêmement jeune malgré son entrée dans la transition démographique. On peut penser que les nouvelles générations aspireront à la remise en cause du système hérité de la révolution islamique. Les incertitudes économiques et les éventuels développements de la crise du nucléaire auront peut-être pour effet d’accélérer des remises en cause sans doute inéluctables, mais, quelles que soient les turbulences que l’on peut imaginer à moyen terme, l’Iran conserve de très importants atouts pour s’affirmer comme la grande puissance régionale.

http://www.clio.fr/CHRONOLOGIE/chronologie_iran.asp

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