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Guinée - Sarcelles... un jeune au grand coeur

Mr Elhadji Touré

mardi 13 avril 2010, par Frederic Praud

texte Frederic Praud


Foécaria, mon village natal de Guinée

Je suis né en janvier 1974 en Guinée, dans un petit village qui s’appelle Foécaria. Dans mon enfance, visuellement, je n’avais aucun souvenir de mes parents car ils vivaient en France et m’avaient laissés là-bas. Je suis l’aîné de la famille et le seul à être né en Afrique. Mes parents sont partis pour préparer le terrain, afin de pouvoir nous faire venir après. On ne peut pas partir avec du poids ! Ce n’est pas possible… On est obligé de partir seul ; du moins, c’est comme ça que vois les choses aujourd’hui. Par contre, quand j’étais gamin, je ne savais pas pourquoi ils avaient quitté le village ! Sans doute pour construire une vie meilleure ; je ne sais pas… Je n’ai jamais au l’occasion de leur poser la question depuis car ma vie a été un peu compliquée, un peu hachée…

Quand ils sont partis, je suis resté avec mes grands-parents. Je devais avoir trois ans à l’époque. Ma grand-mère était tout pour moi : ma mère, mon père… C’est elle qui m’a tout appris. Je vivais comme dans les films que l’on montre aujourd’hui à la télé, c’est-à-dire le petit Noir, à poil, qui coure le zizi à l’air. Là-bas, à sept heures du matin, le soleil tape déjà ! Tu te lèves, tu bois un petit thé, puis tu vas dans le village rejoindre tes petits camarades. C’est la liberté totale ! Il n’y a pas de contraintes… On fait ce qu’on veut jusqu’à être fatigués… Il n’y avait pas d’école. Pour y aller, il fallait se rapprocher un peu de la ville.

Les maisons étaient rondes, en terre, avec un toit de paille ou de taules. Avec le soleil, ça chauffait ! Mais par temps de pluie, ça servait. On récupérait l’eau avec dans des seaux pour se laver le lendemain matin. Là-bas, rien ne se perd ! Á l’époque de la moisson, je dormais sur le dos de ma grand-mère pendant qu’elle coupait. Son geste me berçait naturellement. Après, elle me déposait sur le petit coin d’un arbre et continuait son travail.

Jusqu’à mon arrivée en France, à l’âge de huit ans, je ne savais pas qui étaient mes parents. Pour moi, ils n’existaient pas… Lorsque je suis arrivé à Roissy, mon père est venu me chercher et quand il m’a dit : « Je suis ton père », cela a ne m’a fait ni chaud ni froid. « Oui, oui, si tu veux ! Tu me dis que tu es mon père mais je n’ai pas de souvenirs, je n’ai rien ! » Après, en grandissant, j’ai eu des petits flashs. Je me suis revu petit sur sa moto, etc., mais bon…

Au village, vers l’âge de cinq ans, je faisais des petits travaux. Je ramassais du petit bois que j’allais vendre au marché avec ma grand-mère, pour avoir ne serait-ce que la moitié d’une pièce. Un jour, j’ai eu un petite peur ! J’étais dans une plantation avec ma grand-mère et j’ai été mordu à la jambe par un serpent. Alors, c’était la panique ! Tout le monde pensait que c’était fini pour moi… Là-bas, il n’y avait pas de médecin. La seule médecine, c’était les plantes et la connaissance. Le venin m’a creusé la chair jusqu’à l’os et partir de là, je n’ai plus eu d’amis car matin, midi et soir, les mouches étaient autour de ma jambe et les parents des autres enfants ne voulaient plus qu’ils jouent avec moi… Je me suis donc retrouvé seul… Je passais l’après-midi sur un arbre, la jambe au soleil pour sécher la plaie, pour cicatriser plus vite mais en vain… Ça ne passait pas…

Par la suite, on m’a emmené consulter un médecin mais pour ça, il a fallu vendre du bois, économiser de l’argent, se priver de manger… Malheureusement, il n’a pas pu faire grand-chose… Nous sommes donc revenus au village déçus, à tel point que l’on était prêt à m’amputer la jambe… C’est grâce à ma grand-mère que j’ai guéri. Je ne sais si ça vient d’elle ou de là haut, mais elle a pris une pile qu’on met dans les walkmans, l’a ouverte et en a déposé le contenu sur ma plaie pour la brûler… C’était une sorte d’acide. Je crois que j’ai dû tomber dans les pommes… En tout cas, peu de temps après, j’ai cicatrisé complètement. C’est allé très très vite. Mais, je suis resté des semaines vraiment à plat, KO ! Jusqu’au jour où je me suis levé, où j’ai vu que ma chair se reconstituait et recouvrait l’os. C’était rose et avec le soleil, ça a bronzé… Ma grand-mère était folle de joie !

J’avais six ans lorsque je l’ai quittée. J’ai beaucoup pleuré au moment du départ… J’étais accroché à son coup et je ne voulais pas la lâcher mais les gens m’ont arraché à elle… Elle a retenu ses larmes pour ne pas me montrer sa peine… Je suis parti avec quelqu’un que je ne connaissais pas. Je ne sais même pas si c’était un membre de la famille ! En fait, c’est comme si je voyageais seul… Ma grand-mère m’avait expliqué que j’allais revoir mes parents. Je ne pouvais rien dire ! On est montés dans un car, un de ces cars africains où l’on s’entasse à cinquante avec les chèvres sur le toit, etc. On a roulé jusqu’au centre ville de Conakry et là-bas, j’ai pris l’avion. Seulement, je n’ai pas atterri en France mais en Côte d’Ivoire.

Un an en Côté d’Ivoire : la découverte d’un autre monde

Je me suis retrouvé chez des gens que je ne connaissais pas. C’est à ce moment-là que je me suis rapproché un peu de la vie d’aujourd’hui. J’étais en centre ville. Ce n’était pas un village. Il y avait des touristes, des voitures, tout. Je n’étais pas habitué ! Ça klaxonnait dans tous les sens. Mais, la première chose qui m’a vraiment choqué, c’est la télévision. Á l’époque, vous pouviez me laisser tout seul devant et sortir faire vos courses, je ne bougeais pas. Je restais scotché. De même, j’ai découvert la bonne nourriture. Je ne crache pas sur ce que je mangeais quand j’étais petit mais c’était différent. Il y avait de l’évolution, de la saveur, du goût…

La dame qui là-bas s’occupait de moi était très gentille. Elle était claire de peau, sentait bon et comme je croyais que c’était ma mère, je me suis accroché à elle… En fait, il s’agissait d’amis de mes parents. Je suis resté chez eux un an. Pour un enfant, c’est très long ! Je pense que mes parents avaient besoin de ce temps pour faire les papiers avec les assistantes sociales. Et un beau jour, on m’a dit que j‘allais partir pour la France. Moi, ça ne m’a fait ni chaud ni froid car là où j’étais, j’étais bien. Je n’avais pas envie de bouger ! Par contre, lorsque les gens ont su que j’allais en France, je suis devenu à leurs yeux un véritable petit roi… « La chance qu’il a ! Il doit avoir de riches parents ! » Certains en pleuraient même de joie ! Ils venaient me toucher ! La France était pour eux la Terre promise, comme dans les films.

Arrivée et intégration à Sarcelles

Cette fois, j’ai pris l’avion tout seul jusqu’à Roissy. J’étais un petit bout chou au crâne rasé, vêtu d’un petit boubou blanc et trimballant une petite valise marron. Une hôtesse de l’air veillait sur moi. Elle m’a équipé d’une petite pancarte. Á Roissy, mon père est venu me chercher et je suis arrivé directement à Sarcelles, à Marie Blanche………………. Durant le trajet en voiture, mes yeux étaient collés à la vitre ! Á un moment, boum ! Avec la fatigue, je suis tombé de sommeil. Mais, il est clair que j’étais émerveillé ! Je voyais les bâtiments, les buildings qui montaient, les voitures qui circulaient partout, les gens qui étaient tous habillés différemment…

En arrivant chez mes parents, je suis rentré dans ma chambre et je me suis assis sur le lit. Je ne savais pas si j’avais le droit d’aller au salon ! J’étais complètement perdu… On m’a également « présenté » ma petite sœur, dont j’ignorais jusqu’ici l’existence. Maintenant, je prends ça avec un peu d’humour ! Mes parents ont eu trois enfants en tout.

Je suis allé à l’école primaire Anatole France, juste derrière la MJC. J’ai appris le français en six ou sept mois, en même pas un an. J’étais tout le temps dehors ! Á la maison, ma mère parlait soussou, ma langue maternelle, alors que mon père parlait français. C’est d’ailleurs souvent comme ça dans les familles. Je me suis rapidement lié d’amitié avec un voisin, un petit métis, qui s’appelait Rudy. Nous sommes restés là-bas à peine trois ans. Après mon CE2, on est parti s’installer de l’autre côté, aux Rosiers, où j’ai fréquenté l’école Pierre et Marie Curie.

Moi, je venais de l’extérieur alors que la plupart des jeunes de mon âge étaient nés ici. En fait, c’est mon ami Rudy qui m’a servi de lien avec les autres. Il me protégeait, me présentait, prévenait que je ne savais pas bien parler français et qu’il ne fallait pas se moquer de moi, etc. Je ne sais pas s’il y avait à Sarcelles une grosse communauté africaine quand je suis arrivé en 82. Je n’ai pas fait attention à ça. Mais honnêtement, je ne pense pas…

Pour moi, les Rosiers, c’était une petite cité où il y avait de l’animation. J’y ai connu les incidents d’il y a une dizaine d’années, lorsqu’il y a eu un mort… Il faisait beau ce jour-là et je rentrais juste du foot avec mon ami. Je crois que c’était lors d’une kermesse ou plutôt d’une fête de quartier. Nous avons vu des gens qui couraient derrière un bâtiment et nous les avons suivis pour voir ce qui se passait. Une personne était allongée par terre, le ventre ouvert…

J’avais dix-sept ans à l’époque et ça m’a fait prendre beaucoup de recul… C’était soi-disant une histoire de canette… Se faire ouvrir le ventre pour une cannette, c’était démesuré ! Je ne voulais pas tomber dans ce type de schéma… Heureusement, pour y échapper, j’avais le sport. Le dimanche, je jouais au foot et je ne traînais pas dans la cité. Sinon, ce jour-là, il n’y avait rien à faire ! On s’asseyait, on attendait le premier imbécile qui venait nous embrouiller et on y allait… Avec le foot, je n’avais pas le temps ! Á cette époque-là, il n’y avait pas que le sport pour les jeunes. Il y avait aussi les études…

Sortir de la galère quand on est livré à soi-même à dix-sept ans…

Mes parents m’ont foutu dehors à l’âge de dix-sept ans et jusqu’à aujourd’hui, je me suis toujours démerdé tout seul… Mon père habite Sarcelles et ma mère, sur Paris, mais je vois davantage la seconde que le premier. J’ai commencé à travailler dans un champ de poires près du Quick de Saint-Brice, pour m’acheter des fournitures scolaires. C’est mon premier boulot. J’étais payé mille francs la semaine à cueillir des poires. Pour un jeune de dix-sept ans, c’était bien ! Mais, on n’avait pas de fiches de paye. Quoi qu’il en soit, pendant ce temps-là, mes amis profitaient tranquillement de leurs vacances… Ils me demandaient : « - Mais pourquoi tu travailles ?
  Parce que nous n’avons pas les mêmes besoins… »

Á l’époque, je n’avais pas de logement. Je dormais dans les caves… Le matin, je me levais très tôt et je me rendais chez un ami pour me laver vite fait le visage. Je prenais ensuite une banane et j’allais à l’école. Mes bouquins restaient dans mon sac à dos. Je dormais avec… Un beau jour, mon réveil a sonné mais j’étais tellement fatigué que je ne l’ai pas entendu. C’est la gardienne qui m’a réveillé.
Elle était triste pour moi ! Elle m’a dit :
« - Ce n’est pas possible ! Tu ne peux pas dormir dans la cave ! On va t’aider !
  Non, non ! Ce n’est pas la peine… Ça va…
  Il faut que tu ailles voir une assistante sociale et que tu lui parles de ton cas. »
Moi, je suis quelqu’un qui n’aime pas demander de l’aide. Seulement là, j’étais un peu obligé.

Je suis donc allé voir l’assistante sociale. Je me suis assis devant elle et je lui ai raconté ma vie : « Je vais sur mes dix-huit ans. Je ne suis plus chez moi et je n’ai pas d’argent mais je suis toujours scolarisé. Que pouvez-vous faire pour moi ? » Et bien, je me souviendrai toujours de ce qu’elle a fait… Elle a pris sa carte, elle a marqué son numéro et m’a gentiment assuré : « Écoute, tu viens me voir quand tu as des problèmes. » Les choses étaient claires ! Je ne rentrais pas dans sa grille… J’ai donc pris la carte, en lui disant : « OK, merci… » et le me suis démerdé tout seul…

Heureusement que je me suis éduqué moi-même ! Heureusement que ma base d’éducation, c’est le respect ! Je me suis fait tout petit et j’ai fermé ma gueule, j’ai serré les fesses… Je suis resté dans les caves au moins huit mois. Tous les soirs, avec des amis, on se donnait rendez-vous devant un hall. On parlait, on buvait des bières, etc. et arrivée une certaine heure, tout le monde se disait au revoir. Á ce moment-là, je jouais le jeu ! Je faisais semblant que je rentrais chez moi pour ne pas qu’ils sachent la vérité et ensuite, je revenais sur mes pas et je redescendais dans ma cave… D’ailleurs, encore aujourd’hui, certains de mes amis ne sont pas au courant ! C’est une question de fierté…

Par la suite, des amis portugais m’ont hébergé. C’est aussi pour ça qu’à mes yeux, le respect compte beaucoup ! Comme je suis quelqu’un qui ne s’endort pas facilement, je me suis dit : « Je ne vais pas rester là à me mettre la gamelle dans la bouche ! » J’ai donc demandé à gauche à droite à des amis s’ils connaissaient un endroit où l’on cherchait quelqu’un pour travailler. Là, un ami avec qui je faisais de la musique m’a proposé : « Ecoute, je sais qu’il y a une place chez Buffalo Grill, à la plonge. » Moi, ça ne me dérangeait pas ! J’ai donc fait la vaisselle pendant un an et demi deux ans… C’était de l’escroquerie mais quand on vient d’en bas, on ferme sa bouche… On demande juste son petit truc… Avec ce que je gagnais, je pouvais participer aux frais du loyer.

Je suis resté un an et demi hébergé mais après, mon ami portugais s’est tourné des films dans sa tête. Je le comprends ! J’aurais sans doute réagi de même ! Il s’est imaginé que je couchais avec sa femme. Alors, j’ai préféré partir. Je lui ai dit : « Ecoute, on ne pas aller très loin. On va s’arrêter là. Je te remercie de m’avoir accueilli. » J’ai pris mes clics et mes claques et je suis allé chez un autre ami, qui m’a hébergé à son tour. Mais, c’était encore plus dur chez lui… Moi, il me fallait seulement une petite place ! Le matin, je me levais et j’allais au boulot…

Au bout d’un certain temps, je suis sorti avec une fille. On s’est aimé tous les deux et je n’ai pas voulu lui faire part de ma vie, pour ne pas l’attrister… Je tenais donc toujours à lui montrer l’aspect positif. Quand elle me demandait : « Tu habites où ? Je lui répondais :
« - Chez un ami.
  Et ça se passe bien ?
  Oui, oui ! Tout va bien… »
Seulement un jour, elle a voulu voir où je vivais… Je lui ai dit :
« - Tu veux vraiment savoir ! Mais, tu sais qu’en voyant ça, les choses peuvent finir entre nous !
  Non, non, je m’en fous… »
Lorsqu’elle a vu où je logeais, elle a eu du mal à y croire… « Mais, comment tu fais pour rester propre dans ta tête comme ça ? » En fait, je vivais dans un squat, au Village… Il n’y avait pas de lumière, pas d’eau chaude… On s’éclairait à la bougie… Á l’époque, je payais quand même cent ou cent cinquante euros par mois ! Le reste, je le mettais de côté…

Toujours est-il qu’elle a craqué et m’a proposé de venir habiter avec elle chez sa mère, aux Sablons. L’avantage là-bas, c’est que je ne payais pas de loyer. Sa mère était institutrice et bénéficiait d’un logement de fonction. Nous vivions donc à trois, parfois à quatre, car ses parents étaient divorcés et sa sœur, qui habitait avec le père, venait pendant les vacances. Chaque mois, je participais aux courses, même si sa mère ne voulait pas. Je lui disais : « Ecoutez Madame, vous m’hébergez ; c’est la moindre des choses ! »

Entre temps, de dix-huit à vingt-sept ans, je suis resté sans papiers… Jusque-là, j’avais une carte de séjour ! Mais si je pense l’avoir perdue, je sais qu’au fond, ce n’est pas vrai… C’est mon père qui a dû me la prendre pour me mettre dans la galère… Pour refaire des papiers, il faut une adresse fixe de logement ! Je n’ai donc pu entreprendre cette démarche qu’à partir du moment où j’ai vécu chez ma copine…

En ce qui concerne la nationalité, c’est une autre histoire. Je n’ai pas réussi à l’obtenir… Pourtant, j’ai aujourd’hui trente deux ans et ça fait vingt-quatre ans que je suis là ! En plus, je n’ai pas de casier judiciaire ! Rien !

Les liens entre les gens sont vraiment bizarres… Quand j’étais dans la merde, c’est Tonio qui m’a aidé, le fils de Mr et Mme Macedo qui sont présents ici aujourd’hui… Très gentiment, il est venu me voir et m’a donné quatre cents francs. Je lui ai dit :
« - Non,non ! Je n’en veux pas !
  Ecoute, tu ne parles pas beaucoup mais moi, je sais que tu es en galère. Allez, prends-les…
  Oui mais je ne pourrais pas te rembourser !
  Mais, je ne t’ai rien demandé ! »
J’ai donc pris l’argent… Tonio est vraiment quelqu’un qui a vraiment un grand cœur…

En fait, mon père m’en a toujours voulu à cause du foot. Je n’étais pas un cancre à l’école ! Je me défendais ! J’avais toujours dans les onze douze de moyenne mais je ne forçais pas plus, je ne me prenais pas la tête… Seulement, quand des clubs m’ont sollicité pour que j’aille en centre de formation, mon père a refusé, par manque d’informations… Il ignorait que je pouvais faire sports études… Pour lui, il ne m’avait pas ramené d’Afrique pour faire du foot ! Et en plus, j’étais le premier. Mais attention ! Comme je le dis toujours dans mes écrits : « Il y a un mal pour un bien et un bien pour un mal. » Le mal qu’il m’a fait m’a été bénéfique car aujourd’hui, je suis moi…

Et puis, j’ai vécu plein d’histoires ! Un jour, au Village, j’ai failli mourir après avoir reçu un coup de couteau en demandant ce qui se passait à quelqu’un… Avant la banque, il y avait une boucherie et c’est la dame qui tenait le magasin qui m’a sauvé… Quand elle a vu le sang couler, elle a failli tomber dans le pommes et a appelé son mari qui a posé un mouchoir sur la plaie. Mais, en même pas trente secondes, le mouchoir était complètement imbibé… J’avais pris un coup de couteau alors que je n’y étais absolument pour rien…. On m’a recousu à Gonesse et ensuite, la police est venue me chercher pour prendre ma déposition.
Quand j’ai raconté les faits, le policier m’a demandé :
« - Mais, vous êtes sûr que ce n’est pas vous qui avez agressé le monsieur ? Il se sera défendu !
  Non, non ! Je n’ai rien à voir là-dedans ! J’ai juste demandé ce qui se passait et la personne s’en est prise à moi. C’est tout…
  Vous êtes bien sûr ? Parce que bon, vous les jeunes de Sarcelles… », etc., etc. »
Alors là, je lui ai posé une question qu’il n’a pas appréciée :
« - Ecoutez Monsieur, qu’auriez-vous fait si votre enfant avait été à ma place ?
  Mais, ce n’est pas le cas… »
J’ai donc pris la déposition, je l’ai déchirée et je suis parti…

J’ai encore beaucoup d’autres histoires du même genre ! Je n’ai pas fait que Sarcelles dans les squats ! J’ai connu Aulnay-sous-Bois, je suis allé dans les Yvelines, à gauche à droite… Aujourd’hui, je suis assistant d’éducation depuis trois ans. Auparavant, j’ai été assistant responsable de magasin chez ED pendant un an mais à cause du racisme, j’ai laissé tomber, je suis parti… Après, j’ai fait la plonge, etc. …

Actuellement, j’habite à côté de la gare de Saint-Brice, boulevard du Général de Gaulle, après le tabac. Je suis assistant d’éducation au collège Victor Hugo, à côté du cimetière. En parallèle, je fais du soutien scolaire avec les gamins des Rosiers et je suis également entraîneur de foot à Ecouen, où je m’occupe des seniors. Mon temps libre, je le consacre à écrire des textes, à faire de la musique.

Je n’ai jamais voulu quitter Sarcelles. C’est ici que j’ai atterri il y a vingt-quatre ans, en arrivant de mon pays ! Donc à mes yeux, c’est chez moi et je trouve qu’on y est très bien.

Message aux jeunes

Je voudrais qu’ils sachent que l’on ne vit qu’une fois. On peut faire des bêtises ! C’est clair ! Mais, je crois que pour durer, il faut respecter son prochain et s’ouvrir à lui…


Voir en ligne : La Bande Dessinée : Les Migrants

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