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combattants volontaires juifs 1939/1945

Jacques et Michel Rencus, père et fils dans la résistance.

mardi 28 septembre 2010, par Frederic Praud

Jacques Rencus est né le 18 octobre 1900 à Bucarest (Roumanie), sixième fils de Leiba et Tzalik Rencus. Son père était dégustateur en tsuika, l’eau de vie roumaine. Sa mère mourut d’une pneumonie alors qu’il n’avait pas six mois.
Jacques prit part aux derniers combats de la première guerre mondiale, et fit plus tard son service militaire dans une unité équivalente aux Chasseurs Alpins, mais il en fut réformé en 1923 à cause de sa mauvaise condition cardiaque : il avait un souffle au cœur.

Le 7 décembre 1924, Jacques épousa Etty Rosenberg, fille de Marc Rosenberg de Falticeni en Bucovine.

Leur fils aîné Mircea naquit le 18 avril l927, à Bucarest, le deuxième jour de Pessach.

Jacques était négociant en textile, ainsi que deux de ses frères. Ceux-ci décidèrent de tenter leur fortune en France, et Jacques leur emboîta le pas. C’est ainsi que fin 1930 Jacques, Etty et Mircea (renommé Michel pour la bureaucratie française) se retrouvent à Paris, où Jacques tenta de monter une usine de textile, en association avec un de ses frères. Ce fut l’échec financier, et Jacques et Etty s’installèrent à Périgueux en 1931, pour vendre du textile sur les opulents marchés de Dordogne. Ce sont des années de travail acharné qui furent payantes, et à la veille de la guerre la situation financière des Rencus est florissante. Une petite fille s’est rajoutée à la famille en 1934, Lydia.
Engagé dans les Volontaires Étrangers dès l’entrée en guerre, Jacques fut incorporé dans le 23 ème RMVE et fit ses classes à Barcarès.
De l’attaque allemande de mai 1940 et de la débâcle, Jacques ne parlait pas.
Michel racontait seulement qu’une fois rentré dans ses foyers, son père eut un geste fort symbolique : il ôta la Mezuza du chambranle de la porte d’entrée.
On ignore quand exactement Jacques entra dans la résistance, toujours est-il qu’il prit part à un coup de main audacieux, qui visait à libérer des officiers Belges incarcérés à la prison de Périgueux. C’est peut-être à l’occasion de cette première action, improvisée par un groupe d’hommes décidés à ne pas baisser les bras, que Jacques fit connaissance de ceux avec qui il vivra l’aventure de la résistance.

Avant l’invasion de la zone libre, Jacques a participé au rapatriement de patriotes, qui rejoignaient De Gaulle et le combat en franchissant tout d’abord la ligne de démarcation. Michel, alors adolescent âgé de 14-15 ans, devait monter le guet et signaler l’approche de tout individu louche aux abords du point de passage de la ligne.

Pour Michel, la résistance commença également par une corvée que lui faisait faire son père : recopier les passages des prédictions de Nostradamus, qui annonçaient la défaite de l’Allemagne, et que son père envoyait sous forme de lettres anonymes aux Vichystes notoires de Périgueux.
Michel fut mit souvent à contribution dans les activités clandestines de son père, et fut tour à tour agent de liaison, transporteur de faux papiers d’identité, passeur d’armes, espion des troupes allemandes stationnées en ville, en face de son lycée...

Jacques Rencus prit part à de nombreux coups de mains. Par ailleurs, à maintes reprises les Rencus hébergèrent des maquisards qui se « mettaient au vert » après une opération audacieuse.
La famille Rencus a également fait partie d’un réseau de prise en charge des aviateurs alliés, dont les avions avaient été abattus au-dessus de la Dordogne. Ceux-ci étaient hébergés, équipés en vêtements civils, et dirigés de cache en cache en direction de l’Espagne.

Michel raconte souvent une anecdote au cours de laquelle il devait traverser un pont en compagnie d’un aviateur Américain dénommé Leroy. L’extrémité du pont était gardée par un soldat allemand armé d’une mitrailleuse. A l’entrée du pont, l’aviateur paniqua et s’adressa à Michel à voix basse en Anglais. Michel lui siffla entre les dents : « Shut up... »

Le jour du débarquement, 6 juin 1944, père et fils (âgés respectivement de 43 et 17 ans) furent incorporés dans la compagnie Jean Bart de l’Armée Secrète.
La division blindée SS Das Reich (tristement célèbre pour avoir rasé le village d’Oradour-sur-Glane), remontait depuis le sud en direction du front de Normandie, et subit un harcèlement incessant notamment de la part du maquis de Dordogne dont faisaient partie les Rencus. Son avancée en fut retardée de près de deux semaines.

Père et fils furent engagés côte à côte dans les âpres combats contre la Wehrmacht et la Waffen SS.

Michel évoque la première embuscade tendue aux soldats Allemands : ceux-ci s’approchent, sans se douter de l’embuscade. Michel a un soldat dans sa ligne de mire, et demande à son officier à quel moment ouvrir le feu. Ce dernier lui répondit : « Tu ouvres le feu lorsque tu peux me dire la couleur de ses yeux ».
A l’issue d’une journée de patrouille dans la campagne, alors que l’armée allemande est partout et fait la chasse aux maquisards, Michel rentre au camp et est accueilli par son père en larmes : la rumeur disait qu’il avait été tué avec tous les hommes de la patrouille.

A partir du 16 août 1944, les Rencus participèrent à la libération de Périgueux puis du reste de la Dordogne, au sein des Corps Francs Roland et Paul-Henri.
Après la guerre, Michel Rencus a fait carrière dans l’Education Nationale. Il dirigea quatre établissements scolaires en métropole. Son épouse Liliane et lui-même sont aujourd’hui grands-parents de treize petits-enfants ! A 81 ans, Michel vit avec Liliane à Rehovot (Israël), auprès de leur fils et de sa famille, dont est issu le premier Sabra.

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