Le calvaire du peuple Arménien
"Medz Yeghern - Le grand mal", génocide Arménien 1915
Édition Dargaud
"Cette fiche fait partie du répertoire de la bande dessinée migrante créé par Paroles d’Hommes et de Femmes. Ce répertoire est destiné aux enseignants, éducateurs, associations, collectivités qui souhaitent utiliser la BD ayant pour thèmes la migration, l’altérité, l’intégration, comme une source de lien social et d’action éducative"
Auteur : Cossi Paolo
Éditeur : Dargaud
Planches : 133
Parution : 01/2009
Résumé : 1915 - 1916 Le génocide des Arméniens. Un récit poignant construit autour du génocide arménien de 1915. Des personnages attachants. Des hommes politiques cyniques. Des profiteurs, comme il y en a toujours en temps de guerre. Et un graphisme, résolument contemporain, qui participe à la mise en lumière
Chronique : Quatre génocides ont été officiellement reconnus par l’ONU. Celui commis par l’empire ottoman à l’encontre du peuple arménien, le premier du 20e siècle, en fait partie. Le gouvernement des Jeunes Turcs a profité du contexte historique pour justifier le massacre de plus d’un million de personnes. Désertion, pacte avec les Russes, autant de prétextes dont les conséquences furent dramatiques : tortures, actes de barbarie, déportation et exécution des prisonniers…
Paolo Cossi, jeune auteur italien, revient avec Medz Yeghern sur le calvaire subi entre 1915 et 1916 par tout un peuple. Le récit suit le destin d’hommes et de femmes, acteurs ou spectateurs de l’une des plus atroces tragédies du siècle dernier, qu’il s’agisse d’Amar, soldat arménien en fuite et témoin de l’assassinat de ses compagnons, de Mona, seule rescapée de sa famille décimée, ou de Wegner, officier allemand ayant voulu dénoncer, à ses dépends, le drame qui se dessinait sous ses yeux. Quelques touches optimistes parsèment ces histoires : une amitié naissante entre un Turc et un Arménien, une poignée d’élans de solidarité salvateurs ainsi qu’une conclusion ouvrant sur la commémoration du génocide par les Arméniens, symbole de l’avènement d’une nouvelle nation.
Des notes d’espoir finalement très marginales comparées à la violence et à la haine, omniprésentes. Paolo Cossi n’épargne jamais le lecteur en mettant en images séances de torture, scènes de viol ou avilissement et "animalisation" de l’être humain. Si l’auteur parvient à décrire l’horreur, à dénoncer le silence des instances internationales, à rythmer le récit par le jeu d’un découpage en plusieurs chapitres, il ne peut, en revanche, éviter l’utilisation de personnages dont les traits et les caractères sont forcés, à la limite de la caricature.
Cette dualité s’exprime aussi au travers du dessin. A un trait très clair en noir et blanc succède un autre, plus tortueux, qui vient déformer les visages de soldats turcs ou métamorphoser des hommes et des femmes décharnés en zombies décérébrés. Si ce choix graphique permet de mieux se rendre compte de l’atrocité des actes perpétrés par l’empire ottoman, il peut aussi provoquer l’inverse de l’effet escompté, à savoir éloigner quelque peu de l’aspect authentique et historique des événements.
Aujourd’hui encore, la république turque nie l’existence du génocide arménien, les exigences politiques et financières demeurant prioritaires. Au même titre que Rwanda 1994, Medz Yeghern donne l’occasion d’apprendre mais aussi de ne pas oublier, de transmettre des témoignages, poignants, que certains préfèreraient étouffer. L’utilité d’un tel ouvrage prenant finalement le pas sur les quelques défauts rencontrés ici ou là.
L. Gianati
Source : http://www.bdgest.com/chronique-3399-BD-Medz-Yeghern-Le-grand-mal.html