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PONTIVY - on se sauvait souvent !

Madame RAY Anne-Marie née le 20 août 1935 à Pontivy.

mercredi 21 novembre 2007, par Frederic Praud

Mon village s’appelait Le Bois. Il n’y avait qu’un petit chemin creux pour s’y rendre. Ce n’était pas très beau. Mes parents y étaient fermiers dans une petite exploitation de quinze ou vingt hectares. Nous avions des vaches et des chevaux. Ils cultivaient la pomme de terre de sélection comme cela ce faisait là-bas. On cultivait également, comme à Cessoy, du blé et de l’avoine.

Maison

Au niveau des sanitaires, nous n’avions rien du tout : pas d’eau, pas d’électricité, pas de chauffage. Le sol était en terre battue. Nous n’avions même pas de cuisinière au début : le foyer servait à faire la cuisine avec des gamelles qui chauffaient sur un trépied.

Il n’y avait qu’une grande pièce dans laquelle on faisait même le pain. On le posait ensuite sur des claies au plafond et on le mangeait même sec jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus. Nous employions une bonne et tout le monde couchait dans la même pièce dans des lits de coin. Nous étions quatre filles avec nos parents et la bonne en plus.

Dans cette maison-là, il n’y avait pas d’étable au bout de la maison. Mais, très souvent, on pouvait passer directement de la maison à l’étable.

Quotidien

Il y avait alors beaucoup de gens malheureux mais nous, nous n’étions pas malheureux. Nous élevions des poules et des lapins. Nous allions chez le boucher tous les dimanches parce que nous mangions du rôti de veau ce jour-là. C’était ainsi en Bretagne. Mais nous ne mangions pas grand-chose la semaine : des patates avec du lait baratté, du petit beurre, des crêpes, très peu de viande, des œufs lorsqu’il y en avait et du poisson puisque nous nous trouvions au bord de la mer.

Nous faisions au moins cinq kilomètres à pied pour aller à l’école. Pour manger le midi, une personne dans le village faisait du bouillon de légume et mes parents nous coupaient des lèches de pain que l’on mettait dans un bol. C’est tout ce que l’on avait ! C’était pauvre.

Fêtes

Les fêtes communales avaient lieu le premier dimanche mai et d’octobre. Il y avait des manèges, des confiseries, une rotonde et un bal. Les forains s’installaient sur la place de la mairie au mois d’octobre et sur celle des Tilleuls au mois de mai. C’étaient toujours les mêmes forains qui venaient et nous étions habitués à eux. Ils tournaient dans les communes alentours.

Ecole

Il y avait deux écoles : une de bonnes sœurs et une communale. J’allais chez les sœurs. Peu de monde était à l’école communale : les enfants de cantonniers et des petits ouvriers.

Les sœurs faisaient l’école jusqu’au Certificat d’Etudes. L’école n’était pas mixte. Certains élèves ne parlaient que breton. La discipline était très sévère. Si on n’obéissait pas, on nous mettait dehors ou on nous faisait copier des verbes.
En arrivant, on se mettait en rang et l’instituteur vérifiait la propreté de nos mains et nos cheveux à cause des poux.

1939

Tout le monde était au village quand on a annoncé que ça allait être la guerre. Tout le monde avait un peu peur et moi aussi. Les églises ont sonné le glas pendant assez longtemps et la sirène a retenti.

Exode

Nous étions dans les bois. Nous n’avons pas bougé. Notre père ainsi que le commis sont partis à la guerre. Il ne restait que les quatre enfants, ma mère et la bonne.

Nous n’avions pas tellement peur : nous ne nous rendions pas trop compte. Mais, ma mère avait peur.

Mon père n’a pas été fait prisonnier, il est revenu de la guerre et est ensuite allé dans le maquis. Mon oncle est resté prisonnier pendant quatre ans.

Toute la famille est venue s’installer en Seine et Oise en 1948.

Je ne me souviens pas de l’arrivée des Allemands.

Guerre

J’étais petite. On nous disait que c’était la guerre mais je ne savais pas trop ce que c’était. Je me souviens qu’il y eut beaucoup de tueries quand les maquisards étaient dénoncés. On se sauvait souvent. Il y avait des massacres. Même dans la commune, beaucoup ont été fusillés par les Allemands.

Je ne savais pas trop où mon père était passé. Il était dans le maquis. Il venait souvent la nuit. Nous n’en parlions pas à l’école : nous avions reçu l’ordre de nous taire.

Sinon… on vivait normalement !

Libération

Au moment du débarquement on nous a dit que les Russes (engagés volontairement dans l’armée allemande) revenaient. Nous sommes partis nous cacher dans les bois pendant trois jours. Nous étions allés au bord de la route avec des bouquets de fleurs pour accueillir les libérateurs, mais nous avons tout laissé sur place pour fuir ! Comme mon père était dans le maquis, on nous avait annoncé que tout le village allait sauter.

Message aux jeunes

Ils ne sont pas élevés comme nous. Il faudrait qu’ils s’entendent mieux.

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