Accueil > MÉMOIRES CROISÉES : La Mémoire source de lien social > Associations et Partenaires > Réseaux - anniversaires - commémorations > la Décolonisation - 1959-2009 - L’indépendance des colonies françaises > 1959/2009 - l’indépendance de la Guinée > sortie impasse en guinée

sortie impasse en guinée

vendredi 18 décembre 2009, par Thierno Bah

maladies infantiles de la décolonisation de la Guinée à diagnostiquer pour les soigner.

Docteur Thierno Bah Paris le 20/12/09.

Comment sortir de l’impasse en Guinée ?

1-. Préambule.
Lorsqu’un médecin reçoit un malade, il l’accueille, l’interroge, l’examine et lui prescrit des examens complémentaires si nécessaires. Suite à cette démarche immuable, le praticien peut faire un diagnostic étiologique qui permet de prescrire un traitement des causes de la maladie. Le respect de cette méthode médicale débouche le plus souvent sur la guérison totale du patient : lorsqu’on découvre les causes du mal, on trouve le traitement efficace. Voilà le fil conducteur qui me guide dans toutes mes réflexions sur les problèmes de la Guinée.

2-. Constat : Etat des lieux.
En 2010, notre pays entame sa deuxième année de son deuxième cinquantenaire. Faute d’avoir évalué son parcours politique et sa gestion humaine, économique, sociale, culturelle et morale, il a succombé dans le chaos avec son cortège de massacres du 28/09/09, de viols, de chômage, d’insécurité des personnes, des biens publics et privés et de pauvreté. Ceux qui bloquent ce regard rétrospectif nous condamnent ainsi à une éternelle répétition de l’histoire. Cette mal gouvernance du pays a secrété des maladies infantiles qui asphyxient les habitants en les réduisant à la misère alimentaire et à la mendicité.

3-. Quelles sont ces maladies infantiles ?
Ces maladies s’appellent dislocation de la société, destruction des repères sociaux, des valeurs morales, privatisation de l’Etat au profit des gouvernants, insécurité, domestication de l’armée et déclin économique financé par le pillage illimité et impuni des deniers publics. Les lobbies ethniques empêchent toute évaluation de la gestion du pays depuis notre indépendance. Cet embargo politique assure une continuité immuable de la présidence à vie instaurée et pratiquée par Sékou Touré de 1958 à 1984. Il est nécessaire d’examiner les méfaits des pouvoirs inamovibles successifs pour trouver le fil d’Ariane pour sortir le pays de l’impasse dans laquelle il est enlisé depuis 50 ans.

A*-. Les méfaits du PDG.
Il n’est pas inutile de rappeler les étapes de la descente aux enfers de la Guinée sous le règne de Sékou Touré. En 1959, il décrète la prééminence du parti sur l’Etat, trahissant sans hésitation notre vote historique du 28/09/1958. En 1960, il assassine un avocat et un imam accusés d’avoir comploté avec des armes françaises alors qu’il fait exposer des armes tchèques de l’armée guinéenne… à la permanence du PDG à Conakry. Dans ce convoi d’élimination des cadres universitaires, rentrés pour servir le pays, il inclue des techniciens comme l’ingénieur des PTT Diallo Yaya. En 1961, il emprisonne les Responsables du Syndicat des Enseignants et provoque la révolte populaire dans le pays et dans les colonies guinéennes à l’étranger.
Cette colère populaire n’a été captée par aucune organisation parce que toutes les structures de lutte avaient été dissoutes. Les Guinéens n’avaient pas prévu cette forfaiture du PDG et son chef qui a pris tout le monde au dépourvu. Ces deux décisions surmontées lui donnent les moyens d’un pouvoir personnel sans concertation et sans partage.
A partir de cette survie politique, le PDG a construit une autoroute pour mettre en œuvre « le système du gouvernement par le complot permanent. » Cette stratégie diabolique a éliminé les meilleurs fils du pays. De ce fait, on ne peut pas parler de Sékou Touré sans parler de Diallo Telli, de Camara Bala, anciens élèves de l’Ecole Nationale de la France d’Outremer. On ne peut pas parler de Ismaël Touré, simple aide ingénieur météo sans parler de Fofana Karim, ingénieur des Mines, diplômé de l’Ecole des Mines de Nancy, de Baldé Oumar OERS, ingénieur des Ponts et Chaussées de Paris et tant d’autres non moins méritants que j’ai cités dans mon livre Trente ans de violence politique en Guinée. Les deux frères ont éliminé sans état d’âme ces hauts fonctionnaires parce que ceux-ci leur portaient ombrage par leur seule présence dans une tribune publique.

B*-. Le pillage des richesses nationales.
Lansana Conté, en prenant le pouvoir en 1984, ne s’attendait probablement pas à exercer une présidence à vie aussi durable que celle qu’il avait servie fidèlement pendant 26 ans. Ses inconditionnels lui ont aménagé une présidence à vie tranquille. Ils ont créé un système de gestion qui lui a permis de piller de façon illimitée et impunie les biens publics. Totalement étranger aux arcanes politiques, il a réussi à gouverner la Guinée sans jamais avoir rencontré les partis politiques qu’il avait pourtant légalisés. Il ne s’est jamais adressé aux populations dans un rassemblement populaire. Il n’a jamais présenté un programme politique et économique.
Il y a eu gabegie et pillage des biens publics pendant la révolution du PDG. Mais la cruauté du responsable suprême de la révolution ayant étouffé tout déballage des détournements des biens publics, les voleurs ont caché leurs forfaits. Ayant libéré la parole et les comportements, Lansana Conté a révélé le vrai visage de « l’homme nouveau » que l’école du PDG a formé. Les fortunes détournées ont fait leur apparition dans le pays à travers la promotion de « bana-banas » devenant experts en économie et en commerce.
Un homme d’affaires, surnommé « sans lois », est nommé président de la Chambre de Commerce. Un autre, chauffeur de taxi à New York, rentre au pays pour servir Lansana Conté, déclare au cours d’une réunion de Guinéens à Paris, avoir construit à Conakry, une maison de 16 milliards de francs guinéens. Il est nommé président du patronat guinéen. Tout un programme.
L’entourage de Lansana Conté lui assure une agonie de deux ans à la tête du pays alors qu’il connaît la gravité de sa maladie le rendant incapable de gouverner. Les autorités légales, chargées de gouverner le pays, gouvernement, assemblée nationale et cour suprême, ayant abdiqué leurs missions de déclarer la vacance du pouvoir pour raison de santé du président, sont balayées le 23/12/08 par une junte militaire dirigée par un capitaine âgé de 45 ans.

4-. L’avènement de « l’homme nouveau. »
Durant tout son règne, Sékou Touré a martelé, dans ses discours fleuves, que « lui mourra mais le PDG ne mourra jamais. » La prise du pouvoir par la junte militaire le 23/12/08, semble lui donner raison. Il est vrai que le personnel politique et administratif qu’il a formé et nommé à tous les emplois, civils et militaires, est au pouvoir depuis sa mort il y a 25 ans. Cet « homme nouveau » a été repéré et promu sur la base d’uns seul critère : fidélité inconditionnelle à la personne du chef du PDG. La qualification scolaire et universitaire n’a aucune place dans le choix des ministres et hauts fonctionnaires, civils et militaires.
Cet « homme nouveau » a servi avec zèle la révolution pour échapper au sort de ceux qui avaient cessé de plaire et qui disparaissaient au camp Boiro. La brève émergence du jeune capitaine, autoproclamé président de la Guinée, traduit l’échec posthume de l’école guinéenne du PDG. L’interdiction d’enseigner autre chose que les discours délirants de la révolution, a privé la génération de Sékou Touré des repères tels : le respect de la famille, des Aînés, des Etrangers, la probité intellectuelle et matérielle. Ignorant toute remise en cause et toute évaluation des effets, des efforts et des résultats des décisions prises sans concertations, ils ne regardent pas le chemin parcouru par le pays.
De ce fait, cette génération, âgée de 50 ans aujourd’hui, gouverne le pays avec les méthodes brutales en vogue durant son développement psychoaffectif et le climat social de la révolution. Cette culture de violence a débouché sur le constat qu’un Sékou Touré sommeille en beaucoup de Guinéens. Mais l’éphémère escapade du chef de la junte à la tête du pays montre que n’est pas Sékou Touré qui veut…

5-. Comment sortir de l’impasse ?
Les discours et les comportements de ce qui reste du CNDD montrent que ces militaires ne veulent que rester au pouvoir à tout prix. Ils indiquent qu’il ne faut pas compter sur l’armée pour rétablir la paix civile et la sécurité collective et individuelle dans le pays. Leur sigle est antinomique de son intitulé : ils ne veulent ni la démocratie ni le développement.
Il faut donc trouver une autre voie politique pour débloquer la situation actuelle. L’absence de dialogue inter guinéen et les massacres du 28/09/09 ont conduit à la mise sous tutelle de la Guinée à travers la médiation du Burkina. Pour reconquérir notre souveraineté, nous devons inventer une stratégie guinéenne pour refonder une société solidaire soucieuse des conditions de vie de tous les fils et habitants du pays.
A cet effet, nous présentons ici quelques pistes d’orientation, de réflexions, de travail et d’actions simples, Elles sont à notre portée s’il y a une volonté collective de dialogue national pour évaluer l’état du pays, sans haine, sans hargne et sans allégeance autre que la refondation d’une société unie et solidaire. La tâche principale de notre démarche est centrée sur la réhabilitation de la seule méthode de travail rationnelle, éradiquée par le système de la présidence à vie : la pensée et la réflexion doivent impérativement précéder l’action. Cette approche nécessite plusieurs années de mise en œuvre pour donner des fruits.

6-. Propositions concrètes.
A *-. Création du Comité de Pilotage du dialogue de Réconciliation des Guinéens.
Cette structure ad hoc doit être un cadre de concertation et d’actions ouvert à tous ceux qui, libérés de toute allégeance ethnique et partisane, veulent refonder une Guinée neuve et solidaire.
B *-. Moyens d’actions.
Vaincre la méfiance en travaillant dans la collégialité et reconquérir la confiance en rassemblant les compétences professionnelles dans des groupes de travail pour entrer dans la transition pour rédiger les réformes nécessaires pour rétablir un Etat de droit normal, impartial et protecteur de tous les habitants.

C *-.Investir nos efforts dans deux volets :
Réconciliation des Guinéens : rédiger des témoignages en bien, en mal ou les deux à la fois pour écrire le livre noir de la décolonisation de la Guinée.

Rédiger les Réformes nécessaires pour gérer le pays au profit de tous ses habitants pour les 50 prochaines années. Merci de votre écoute. Docteur Thierno Bah.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.